Par Christian Merville | 04/01/2011
Les incendies de forêt du mois dernier en Israël, notamment sur le mont Carmel surplombant Haïfa - des dévastations sans nombre, 42 morts, dont Ahura Tomer, le plus haut gradé femme de la police - ont révélé l'existence d'un problème d'une extrême gravité dans sa complexité : celui posé par les haredim (pluriel de haredi, celui qui vit dans la crainte du Seigneur). Alors que les flammes gagnaient en intensité et qu'affluaient de toutes parts les propositions d'aide, une offre de secours a été refusée par le ministre de l'Intérieur Eli Yishaï. Une association charitable américaine, l'International Fellowship of Christians and Jews, qui voulait envoyer du matériel de lutte contre les sinistres, s'est vu opposer, sans raison avouée, une fin de non-recevoir. Explication embarrassée de certaines sources officieuses : les organisations chrétiennes seraient soupçonnées d'être en fait de vastes entreprises de conversion. Conséquence, une aggravation soudaine de la tension entre religieux et civils, qui s'est répercutée jusqu'au sein du gouvernement Netanyahu, où M. Yishaï est l'un des représentants du Shass, principal protecteur des ultraorthodoxes. Et le conflit a pris un tour plus aigu encore lorsque le rabbin Ovadia Yossef, chef spirituel de ce parti, a vu dans la catastrophe une punition divine parce que certains Israéliens n'observaient pas le sabbat.
La querelle n'est pas neuve. Ses origines sont vieilles de plusieurs décennies quand, au lendemain de 1948, David Ben Gourion, alors Premier ministre, avait autorisé les étudiants des écoles talmudiques, les yeshivas (le nombre de ces jeunes était alors de 400 ; aujourd'hui, ils sont 60 000), à ne pas servir dans l'armée, définissant du coup, entre l'État et les tenants d'une ligne fidèle aux enseignements religieux, les bases de nouveaux rapports qui devaient déboucher sur l'octroi d'allocations diverses se montant aujourd'hui à l'équivalent de centaines de millions de dollars par an. La Cour suprême, jugeant cette pratique discriminatoire à l'égard des autres étudiants, vient de la déclarer illégale. Yossi Sarid, ancien ministre de l'Éducation, a eu sur le sujet des propos extrêmement durs : « S'ils veulent vivre dans un ghetto, qu'ils le fassent, mais ce ne sera pas grâce aux deniers de l'État. »
La querelle n'est pas neuve. Ses origines sont vieilles de plusieurs décennies quand, au lendemain de 1948, David Ben Gourion, alors Premier ministre, avait autorisé les étudiants des écoles talmudiques, les yeshivas (le nombre de ces jeunes était alors de 400 ; aujourd'hui, ils sont 60 000), à ne pas servir dans l'armée, définissant du coup, entre l'État et les tenants d'une ligne fidèle aux enseignements religieux, les bases de nouveaux rapports qui devaient déboucher sur l'octroi d'allocations diverses se montant aujourd'hui à l'équivalent de centaines de millions de dollars par an. La Cour suprême, jugeant cette pratique discriminatoire à l'égard des autres étudiants, vient de la déclarer illégale. Yossi Sarid, ancien ministre de l'Éducation, a eu sur le sujet des propos extrêmement durs : « S'ils veulent vivre dans un ghetto, qu'ils le fassent, mais ce ne sera pas grâce aux deniers de l'État. »
En 2009 déjà, le Centre Taub des études sociales, un organisme basé à Jérusalem, révélait que le chômage parmi les haredim de 35-54 ans atteignait 65 pour cent et que cette proportion avait triplé au cours des trente dernières années. Si les ultraorthodoxes représentent actuellement le dixième de la population, on prévoit que leur nombre doublera en 2022. En effet, ils se marient de plus en plus jeunes, peuvent avoir jusqu'à huit ou neuf enfants et 50 pour cent des épouses ne travaillent pas. Si la tendance présente se maintient, soutient le Centre Taub, 78 pour cent des écoliers du primaire seront des ultrasorthodoxes et des Arabes. Plus grave : dans les écoles, des matières comme les mathématiques et les langues, principalement l'anglais, représentent une part négligeable, ce qui donne de nouvelles générations incapables d'exercer un métier quelconque dans une économie moderne. Des chiffres encore, autrement plus alarmants ? Cinquante-six pour cent des juifs orthodoxes vivent sous le seuil de pauvreté et dépendent, pour subsister, des subsides de l'État. Pour éviter d'en arriver au point de non-retour, une menace qu'agitent les spécialistes, le gouvernement a mis en chantier divers projets facilitant l'insertion dans la société de ces étranges spécialistes de la Torah : programme Shahar prévu par l'armée pour la formation, sur une période de deux ans, de techniciens du renseignement ou de l'aviation, service communautaire comme sapeurs-pompiers ou ambulanciers, etc.
À la mi-juin de l'an dernier, des dizaines de milliers de personnes ont accompagné des parents qui escortaient leurs enfants condamnés à deux semaines d'internement pour avoir refusé d'appliquer la loi contre la ségrégation dans les écoles décrétée par la Cour suprême. Les banderoles disaient : « Ne touchez pas au Messie ! », une injonction qui en dit long sur l'état d'esprit qui a gagné certains rangs de la société.
Plus prosaïquement, des hommes et des femmes veulent se défendre contre la vague haredi, tel ce sociologue qui s'interroge : « Où allons-nous trouver demain des médecins, des ingénieurs, des savants, des soldats si les orthodoxes venaient à représenter une minorité substantielle ou même une majorité ? »
Haïm Amsellem, un rabbin ultraorthodoxe, a appelé tous ces chômeurs volontaires à travailler au lieu de parasiter. Il a été expulsé de son parti, le Shass. Face aux menaces dont il a fait l'objet, il a engagé un garde du corps. L'intolérance, on peut en faire un mode de vie. Ou de mort.
À la mi-juin de l'an dernier, des dizaines de milliers de personnes ont accompagné des parents qui escortaient leurs enfants condamnés à deux semaines d'internement pour avoir refusé d'appliquer la loi contre la ségrégation dans les écoles décrétée par la Cour suprême. Les banderoles disaient : « Ne touchez pas au Messie ! », une injonction qui en dit long sur l'état d'esprit qui a gagné certains rangs de la société.
Plus prosaïquement, des hommes et des femmes veulent se défendre contre la vague haredi, tel ce sociologue qui s'interroge : « Où allons-nous trouver demain des médecins, des ingénieurs, des savants, des soldats si les orthodoxes venaient à représenter une minorité substantielle ou même une majorité ? »
Haïm Amsellem, un rabbin ultraorthodoxe, a appelé tous ces chômeurs volontaires à travailler au lieu de parasiter. Il a été expulsé de son parti, le Shass. Face aux menaces dont il a fait l'objet, il a engagé un garde du corps. L'intolérance, on peut en faire un mode de vie. Ou de mort.