M. Saâdoune - Le Quotidien d’Oran
L’assassin du Mossad israélien, répondant au nom de Uri Brodsky, a-t-il reçu des fleurs des mains du magistrat allemand qui a ordonné sa libération sous caution ? On ne le sait, mais les fleurs, qui heurtent le sens commun de la justice et qui ont été concédées à cet assassin, ne se comptent pas.
M. Rainer Wolf, porte-parole du parquet de Cologne, a déclaré que l’assassin pouvait « rentrer en Israël aujourd’hui s’il le veut ». Et surtout, on ne sait si cela relève de l’humour germanique, M. Wolf l’a fortement incité à ne jamais revenir, en lui signifiant qu’il pourrait risquer des poursuites pour espionnage s’il revenait au pays de Goethe. L’histoire paraît inconcevable. Pourtant, le parquet de Cologne se révèle comme un zélé conseiller juridique du Mossad !
Quand on connaît la propension des magistrats européens à emprisonner sans ménagement des arabo-musulmans sur la base de vagues soupçons, l’indulgence de la justice allemande à l’égard du criminel Uri Bordsky ne peut en aucun cas être expliquée par un respect des formes juridiques. Toutes ces attentions pour un assassin, ces conseils amicaux d’éviter de revenir en Allemagne où il risquerait des ennuis, tout cela est tellement gros qu’il ne devrait pas seulement susciter l’indignation des autorités émiraties.
Ce qui se passe sous les yeux du monde est tout simplement l’aveu d’une immunité diplomatique pour les assassins d’Arabes. Aucune raison de droit ne saurait être invoquée, le comportement de la justice allemande n’a pas de fondement juridique. La seule raison pouvant expliquer qu’on laisse libre un assassin, invité à quitter l’Allemagne, est bien cette culpabilité allemande, éternelle et sans limite pour le génocide des juifs d’Europe durant la Seconde Guerre mondiale.
Cette culpabilité, savamment entretenue, fait déjà de l’Allemagne l’un des soutiens politique et économique les plus déterminés d’Israël. Les Palestiniens, qui subissent les effets d’une perversion historique perpétrée par des Européens, peuvent constater désormais que les assassins du Mossad peuvent faire ce qu’ils veulent sans que la justice allemande fasse preuve de la moindre curiosité. Une petite caution est le tour est joué !
Il s’agit bel et bien d’une illustration concrète du permis de tuer délivré à Israël par les Occidentaux. Le Hamas n’a pas tort d’y voir une couverture politique allemande de l’assassinat de Mahmoud Al Mabhouh mené par un groupe d’agents du Mossad détenteurs de passeports européens. En exfiltrant officiellement un individu soupçonné d’assassinat, ayant de surcroit usé d’un vrai-faux passeport de l’un de ses citoyens, Berlin fait objectivement preuve de complicité dans la commission d’un meurtre.
L’assassinat d’un Arabe ne cause apparemment aucune émotion, les tueurs israéliens ont confirmation que l’Allemagne est un sanctuaire. Ils sont assurés, même s’ils ont tué et mis en danger des citoyens allemands dont ils ont usurpé les identités, de bénéficier d’un voyage en première classe vers Tel-Aviv. Et sans doute avec de grandes tapes amicales dans le dos des juges et des responsables allemands.
15 août 2010 - Le Quotidien d’Oran - Editorial