Pour Israël, il s’agit-là d’une autre victoire diplomatique d’avoir ramené les Palestiniens à table sans rien leur proposer au menu.
Dès l'annonce, vendredi à Washington, par la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'est félicité du fait que l'invitation aux négociations directes avait été formulée sans «conditions préalables». Son parti, le Likoud (droite), a applaudi ce «succès diplomatique» dans un communiqué, estimant qu'il prouvait à quel point le chef du gouvernement «avait eu raison de tenir bon et ne pas céder aux pressions» sur un gel de la colonisation. En revanche, l'Autorité palestinienne, présidée par Mahmoud Abbas, n'a donné son accord que dans la nuit de vendredi à samedi, à l'issue d'une réunion du Comité Exécutif de l'Organisation de Libération de la Palestine (CEOLP), qui a débuté avec plus de deux heures de retard.
Selon le quotidien arabe Asharq Al Awsat, «Mme Clinton n'a pas mentionné le communiqué du Quartette et expliqué que les négociations se tiendraient sans conditions préalables, ce qui a provoqué la colère du président Abou Mazen (Mahmoud Abbas).» Dans un communiqué, le Quartette pour le Proche-Orient (Etats-Unis, Russie, Union européenne et ONU) a affirmé, vendredi, son soutien aux discussions directes, qui doivent «mener à un accord négocié entre les parties qui mette fin à l'occupation qui a commencé en 1967 et aboutisse à la constitution d'un Etat palestinien indépendant, démocratique, viable et vivant côte à côte dans la paix avec Israël et ses autres voisins». Selon Asharq Al Awsat, le retard dans la réunion du CEOLP s'explique par des appels répétés des responsables américains à M. Abbas pour calmer sa colère.
Le moratoire, et après ?
Le chef du Parti travailliste, le ministre de la Défense, Ehud Barak, et Tzipi Livni, la dirigeante du principal parti d'opposition, le Kadima (centriste), ont également salué la reprise des négociations prévue le 2 septembre, après 20 mois d'interruption. Le principal négociateur palestinien, Saëb Erakat, a cependant averti hier que si la «colonisation devait continuer après le 26 septembre, les négociations, à notre grand regret, ne continueraient pas». En novembre 2009, Israël avait annoncé un moratoire de la construction de 10 mois en Cisjordanie qui s'achèverait le 26 septembre. «C'est un test de la volonté de paix du gouvernement israélien», a-t-il souligné dans une interview à la radio militaire israélienne. L'annonce de nouvelles négociations a été accueillie avec scepticisme par la presse israélienne qui rappelait les échecs passés et relevait des désaccords de fond. Le quotidien Yediot Aharonot rappelle les précédents d'Oslo et Washington en 1993, de Camp David (Etats-Unis) en 2000, puis de Taba (Egypte) en 2001, puis d'Annapolis (Etats-Unis) en novembre 2007, qui n'ont pas abouti. Il explique la relative indifférence de l'opinion publique par le fait que «beaucoup de paroles ont été échangées depuis dix-sept ans, beaucoup d'encre a coulé mais aussi beaucoup de sang».
Le quotidien gratuit Israël Hayom, proche du Premier ministre, titre sur «Un succès, mais provisoire» et met en garde contre des espoirs exagérés de parvenir à un accord, compte tenu du fossé entre les positions. L'ex-député de gauche, Yossi Beilin, architecte des accords d'Oslo, estime qu'«il n'y a aucune chance de parvenir à un règlement global dans le contexte actuel», dans un déclaration à la radio militaire. Selon lui, le Premier ministre n'acceptera pas une évacuation massive des colonies sans laquelle un accord est impossible.