Le Dr Emad Gad, responsable du programme des études israéliennes et palestiniennes au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, évalue les chances de réussite des pourparlers directs.
Al-Ahram Hebdo : Quelles sont les chances de réussite des pourparlers directs entre Palestiniens et Israéliens ? Pensez-vous qu’ils peuvent aboutir rapidement à un accord finale ?
Emad Gad : Les deux camps peuvent, s’ils le veulent, parvenir à un accord final d’ici quelques semaines. Car, rappelons-le, il s’agit de poursuivre les négociations et non pas de tout recommencer depuis le début. En décembre 2000, l’ancien président américain Bill Clinton avait exercé d’intenses pressions sur les deux parties. Et il avait pu obtenir un règlement accepté par tous. Donc, nous avons déjà une base sur laquelle nous pouvons travailler. Les clauses de cet accord étaient satisfaisantes non seulement pour les Israéliens et les Palestiniens, mais aussi pour le monde arabe et toute la région. Israéliens et Palestiniens s’étaient mis d’accord sur Gaza, la Cisjordanie, le retour des réfugiés, surtout ceux qui vivent au Liban, le désarmement des Palestiniens et même sur Jérusalem. Les points ont été mis sur les i. Il ne manquait que la signature de l’accord, mais à cause des changements politiques aux Etats-Unis et en Israël, l’accord a été suspendu. Aujourd’hui, les négociateurs Palestiniens n’ont pas changé. Ce sont les mêmes. Ils connaissent bien le dossier. Je ne pense pas qu’ils peuvent revenir sur les clauses de cet accord. Et de l’autre côté, Israël sait parfaitement qu’il ne peut pas demander aux Palestiniens de faire des concessions, car leur demande sera rejetée.
— Pourquoi le premier ministre israélien Benyamin Netanyahu a-t-il accepté la reprise des négociations ?
— D’abord, Netanyahu veut de bonnes relations avec les Etats-Unis. Il veut protéger ses intérêts et donc, il ne veut aucune tension dans les relations avec l’administration du président Obama. L’actuel chef de la Maison Blanche avait annoncé, à plusieurs reprises, qu’il voulait une paix globale dans la région. Israël a besoin du soutien américain, notamment sur des dossiers comme l’aide militaire et la question iranienne. Netanyahu a remporté un succès, puisque l’administration américaine a lancé les négociations directes sans conditions préalables. Or, on sait que les Palestiniens exigeaient l’arrêt de la colonisation avant de négocier. Une exigence qui a entravé la reprise des pourparlers pendant des mois. Entre autres, pourquoi Netanyahu refuserait-il la reprise des négociations directes alors qu’elles peuvent échouer toutes seules ? On peut par exemple assister à un scénario à répétition qui freine toutes les tentatives de relancer la paix, c’est-à-dire le lancement par le mouvement Hamas de quelques missiles pendant qu’Israël bombarde la bande de Gaza. Les Israéliens se retireront des négociations et les Palestiniens aussi. Je crois que Netanyahu veut jouer sur le facteur temps.
— Pourquoi le mouvement Hamas refuse-t-il la reprise des négociations de paix, tandis qu’il a annoncé qu’il acceptait le principe des négociations avec l’Etat hébreu ?
— Le mouvement Hamas veut être le numéro 1 dans les négociations, autrement dit, il veut être le cavalier qui aura apporté la paix aux Palestiniens et à la région. Déjà, le Hamas a changé son attitude sur la question de l’occupation israélienne. Ismaïl Haniyeh a confiance en ses capacités. Il croit que s’il accepte maintenant les articles de ce règlement, il peut multiplier plus tard ses privilèges et ses acquis. On doit mettre fin aux différends entre Palestiniens pour parvenir à une position commune. A cet égard, les Palestiniens doivent se réconcilier s’ils veulent réaliser un progrès dans le processus de paix.
Propos recueillis par Maha Salem