« Nous sommes arrivés à la conclusion, sur la base des faits que nous avons réunis, qu'il y a de solides preuves établissant que de nombreuses violations graves du droit international, à la fois du droit humanitaire et des droits de l'homme, ont été commises par Israël lors des opérations militaires à Gaza », a déclaré le chef de la mission, le Juge Richard Goldstone, lors d'un point de presse mardi au siège des Nations Unies à New York. « La mission a conclu que des agissements pouvant constituer des crimes de guerre et peut-être, dans une certaine mesure, des crimes contre l'humanité, ont été commis par les forces de défense israéliennes », a-t-il ajouté.
La mission a également estimé qu'il « n'y avait pas de doute que les tirs de roquettes et de mortiers (par les groupes armés de Gaza) étaient délibérés et destinés à causer des pertes en vies humaines, faire des blessés parmi les civils et entraîner des dégâts aux infrastructures civiles. La mission a conclu que ces agissements constituaient également de graves crimes de guerre et peut-être des crimes contre l'humanité ».
Le rapport de 575 pages rédigé par la mission composée de quatre membres a été publié mardi, avant sa présentation devant le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies à Genève le 29 septembre.
« La mission conclut que le comportement des forces armées israéliennes constitue une grave violation de la quatrième Convention de Genève concernant les meurtres délibérés et la volonté de causer de grandes souffrances à des personnes protégées », souligne le rapport. « Elle a aussi découvert que viser directement et tuer arbitrairement des civils palestiniens est une violation du droit à la vie ».
Le rapport critique « la politique délibérée et systématique des forces armées israéliennes de cibler des sites industriels et des installations d'eau », et l'usage de civils palestiniens comme boucliers humains.
Concernant les objectifs et la stratégie de l'opération militaire israélienne, la mission a conclu que les stratèges militaires ont suivi délibérément une doctrine impliquant « l'usage d'une force disproportionnée et suscitant de gros dégâts et des destructions de biens et d'infrastructures civils, et des souffrances chez les populations civiles ».
Sur les tirs de mortiers depuis Gaza par des militants palestiniens, la mission a conclu qu'il s'agissait d'attaques aveugles et délibérées contre une population civile et qu'ils « constituaient des crimes de guerre et pourraient constituer des crimes contre l'humanité ». Elle a ajouté que l'intention apparente de propager la terreur au sein de la population civile israélienne était une violation du droit international.
Le rapport a recommandé que le Conseil de sécurité demande à Israël de prendre des mesures pour lancer des enquêtes indépendantes appropriées concernant les crimes présumés qui ont été commis, conformément aux standards internationaux, et de transmettre ces enquêtes dans les six mois.
Il a également appelé le Conseil de sécurité à nommer un comité d'experts pour surveiller les mesures prises par le gouvernement israélien. Si rien ne se passe, ou si les enquêtes ne sont pas indépendantes ou conformes aux standards internationaux, le rapport a appelé le Conseil de sécurité à renvoyer la situation à Gaza au Procureur de la Cour pénale internationale (CPI).
La mission a également appelé le Conseil de sécurité à demander au comité d'experts d'exercer le même rôle concernant les autorités palestiniennes pertinentes.
Lors de la conférence de presse, le Juge Goldstone a indiqué que la mission avait enquêté sur 36 incidents qui ont eu lieu lors de l'opération israélienne à Gaza. Selon lui, ces incidents ne sont pas liés à des décisions prises dans le feu du combat, mais à des politiques et des décisions délibérées.
A titre d'exemple, il a décrit un incident : une attaque de mortier contre une mosquée à Gaza lors d'un service religieux, qui a tué 15 membres de la congrégation et en a blessé beaucoup d'autres. Le Juge Goldstone a déclaré que même si les accusations selon lesquelles la mosquée était utilisée comme sanctuaire par des groupes militaires et que des armes étaient stockées étaient vraies, il n'y avait malgré tout « aucune justification selon le droit humanitaire international à procéder à des tirs de mortier contre la mosquée lors d'un service religieux », car celle-ci aurait pu être attaquée pendant la nuit quand elle n'était pas utilisée par des civils.
Le Juge Goldstone a précisé que le rapport reflétait le point de vue unanime des quatre membres de la mission.
Les autres membres de la mission sont Christine Chinkin, professeur en droit international à la London School of Economics and Political Science à l'Université de Londres ; Hina Jilani, avocat auprès de la Cour suprême du Pakistan et ancienne représentante spéciale du Secrétaire général sur les défenseurs des droits de l'homme ; et le colonel à la retraite Desmond Travers, membre du conseil des directeurs de l'Institut pour les enquêtes criminelles internationales (IICI).
http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=20067&Cr=gaza&Cr1=isra%EBl