Georges Malbrunot
Lundi, Benjamin Nétanyahou s’est rendu pendant plus de dix heures au quartier-général du Mossad à Tel Aviv, a indiqué ensuite la radio militaire israélienne. Cette visite ne figurait pas dans l’emploi du temps officiel du Premier ministre, dont dépend le service de renseignement extérieur de l’Etat hébreu. Et pourtant, la nouvelle a filtré. Involontairement ? Ou à dessein : histoire de relancer les rumeurs sur les intentions israéliennes de frapper les sites nucléaires iraniens ? Difficile à dire.
Une chose est sûre : en matière d’informations à publier, les services israéliens en connaissent un rayon.
Le Mossad dispose pour cela de sociétés de relations publiques, chargées de propager telle ou telle information ou plus généralement pour désinformer l’opinion. Ces officines dépendent du département de guerre psychologique du Mossad, le LAP – Lohamma Psichologit – créé il y a plus de trente ans.
Au fil du temps, écrit Gordon Thomas dans son "Histoire secrète du Mossad" (Editions Nouveau monde), "le LAP s’est bâti un vaste réseau de contacts dans les médias étrangers, dont il use avec habileté (fuites suffisamment étayées dans la presse après un attentat pour qu’elles fassent l’objet d’un article, fausses informations relayées par les attachées de presse dans les ambassades israéliennes à travers le monde etc..)".
Un ancien patron d’un service de renseignements français raconte : « après le raid israélien en septembre 2007 sur un site nucléaire syrien, un journaliste d’un quotidien israélien a prétendu être allé sur place, après avoir réussi à déjouer les contrôles syriens. Ca nous a surpris au service. Nous avons fait examiner par nos experts la photo de ses exploits qu’il avait fait publier dans son journal, et nous en avons conclu que c’était un montage. La manip était destinée à entretenir le mythe et susciter la crainte chez les responsables syriens », ajoute ce responsable.
Autre exemple de désinformation savamment orchestrée par le département de guerre psychologique du Mossad : au cours des premiers mois de la seconde Intifada, à partir de septembre 2000, les renseignements israéliens ont inondé les journalistes étrangers en poste à Jérusalem d’informations selon lesquelles c’est Yasser Arafat qui tirait les ficelles de la révolte contre les soldats israéliens. Sous entendu : « comment peut-on faire confiance à un tel Janus à deux visages, ce ne peut-être un partenaire pour la paix avec Israël ». Ce qui était largement exagéré, comme le reconnaîtra quelques années après le général Amos Malka, l’un des plus hauts responsables militaires israéliens de l’époque. Mais, dans cette affaire comme dans bien d’autres qui restent méconnues, la désinformation fonctionnera plutôt bien. Chapeau le Mossad !
publié sur le blog du Figaro, "l’Orient indiscret"