Comme les pins, Israël et les Israéliens n’ont rien à faire au Moyen-Orient, écrit Gilad Atzmon.
"Catastrophe dans le nord d’Israël. Au moins quarante morts, tandis que l’incendie continue à faire rage et à progresser dans le Mont Carmel. Une évacuation massive est en cours."
Au moment où j’écris ceci, les équipes de pompiers israéliens se battent contre les flammes. Ils n’expriment aucun espoir d’être à même de contrôler le feu avant longtemps. « Nous avons perdu le contrôle du feu », a indiqué le porte-parole des services des pompiers de Haïfa. « Il n’y a pas suffisamment de pompiers réservistes en Israël pour éteindre cet incendie ».
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s’est rendu précipitamment sur les lieux de l’incendie hier. Il a demandé l’aide des Etats-Unis, de la Grèce, de l’Italie, de la Russie et de Chypre, sollicités pour seconder les pompiers israéliens. Un pays normal aurait probablement sollicité l’assistance des pays voisins. Mais l’Etat juif n’a pas de voisins : de tous ses voisins, sans exception, il a fait des ennemis.
Mais c’est là où ce fait divers revêt une profonde signification. Cet incendie dans le nord d’Israël n’a rien d’un événement fortuit. Le paysage rural d’Israël est saturé de plantations de pins. Ces arbres sont totalement étrangers à la région. Il n’y avait aucun pin (en Palestine) avant les années Trente. Ces pins ont été introduits dans le paysage palestinien au début des années Trente par le Fonds National Juif (FNJ), qui tentait (prétendait-il) « réhabiliter les terres » (voire « les rédimer »).
En 1935, le FNJ avait planté 1,7 million de pins sur une superficie totale de 1 750 acres (soit environ 700 hectares, ndt). Durant les cinquante années suivantes, le FNJ a planté plus de 260 millions d’arbres (pour la plupart, des pins) sur des terres très majoritairement confisquées à des propriétaires palestiniens. Le FNJ a fait cela dans une tentative - vaine - de dissimuler les ruines des villages palestiniens détruits et ethniquement « épurés » (par les sionistes), soucieux qu’ils étaient d’en faire effacer jusqu’à l’histoire.
Au long de toutes ces années, le FNJ a déployé une tentative grossière d’éliminer la civilisation palestinienne et le passé des Palestiniens. En même temps, il s’est évertué à faire en sorte que la Palestine ressemble à l’Europe. La forêt primaire palestinienne a été éradiquée. Les oliviers ont été déracinés. Les pins ont pris leur place. Dans le sud du Mont Carmel, les Israéliens ont baptisé une région « la Petite Suisse ».
J’ai appris ce soir même qu’il n’y a plus de « Petite Suisse » car la « Petite Suisse » a entièrement brûlé.
Reste que, sur le terrain, la situation est carrément dévastatrice pour le FNJ. Le pin ne s’est pas plus adapté au climat de la Palestine que les Israéliens ne se sont adaptés au Moyen-Orient. Selon les propres statistiques du FNJ, six sur dix des nouveaux plants de pin n’ont pas pris. Les rares pins qui ont survécu n’ont rien formé d’autre qu’un bûcher en puissance. Vers la fin de chaque été israélien, chacune des pinèdes israéliennes devient une zone mortelle en puissance.
En dépit de sa puissance nucléaire, de son armée de criminels de guerre, de son occupation, de son Mossad et de ses lobbyistes répandus dans le monde entier, Israël s’avère très vulnérable. Il est catastrophiquement aliéné à la terre qu’il prétend posséder.
Comme les pins, Israël et les Israéliens n’ont rien à faire au Moyen-Orient.
Gilad Atzmon est écrivain et musicien de jazz, il vit à Londres. Son dernier CD : In Loving Memory of Americ.
2 décembre 2010 - Gilad Atzmon - Source : http://www.gilad.co.uk/writings/gil...
Traduction : Marcel Charbonnier
Traduction : Marcel Charbonnier