Nathalie Janne d’Othée
Dans une analyse intitulée "Il y a dix ans Camp David : une rétrospective", Bichara Khader [1] revisite les événements de juillet 2000
Il y a dix ans déjà, Bill  Clinton, Ehud Barak et Yasser Arafat négociaient à Camp David. L’échec  de ces pourparlers est souvent pointé du doigt comme une des causes de  la Seconde Intifada. C’était en effet une grande déception pour tous  ceux qui avaient misé sur la paix, et encore plus pour les Palestiniens,  toujours sans Etat.
Dans une analyse intitulée Il y a dix ans Camp David :  une rétrospective, Bichara Khader revisite les événements de juillet  2000 afin de mettre fin à un mythe : Arafat aurait refusé l’offre  généreuse de Barak et serait dès lors responsable de l’échec du sommet  de Camp David. La « généreuse »  proposition de Barak était la suivante.  Israël garderait ses grands blocs de colonies et échangerait ces 10% de  la Cisjordanie, contre l’équivalent dans le désert du Néguev. Israël  conserverait également la frontière orientale le long du Jourdain, ainsi  qu’un contrôle militaire temporaire sur quelque 10% du reste de la  Cisjordanie. Le « droit au retour » des réfugiés palestiniens est  totalement rejeté, et la souveraineté d’Israël sur l’entièreté de  Jérusalem ne peut être discutée. Comment Arafat aurait-il pu accepter  cette offre sans perdre le soutien de son peuple ?
Dix ans plus tard, juillet 2010. Mahmoud Abbas est  encouragé par les Etats-Unis et l’Europe à s’engager dans des  négociations directes et sans conditions préalables avec Benjamin  Netanyahou. La position de l’Autorité Palestinienne est pourtant  claire : pas de reprises des négociations sans arrêt de la colonisation.  S’il revient sur cette décision, Mahmoud Abbas perdra le peu de  crédibilité qui lui reste en interne. Le processus de paix est dans une  impasse, et de nouveau la responsabilité semble en incomber aux  Palestiniens.
Les leçons de Camp David ne semblent donc pas avoir été  assimilées, et le même scénario se reproduit aujourd’hui à cette  différence près que Mahmoud Abbas ne jouit pas de l’aura de son  prédécesseur. Depuis 2007, les tentatives de négociations avortées à  répétition n’ont fait qu’éroder sa popularité. Bien qu’il ne paraisse  pas toujours le comprendre, Israël a besoin d’un partenaire fort pour  bâtir la paix. Plus neutre dans le conflit que son voisin  outre-Atlantique, l’Union Européenne a un rôle à jouer pour tenter  d’équilibrer les rapports de force entre les parties.
Dix ans après, les Palestiniens sont toujours sans Etat.
[1]  Bichara Khader, né en 1944 à Zababdeh, village palestinien à majorité  chrétienne situé près de Jénine, est chercheur et enseignant,  spécialiste du monde arabe. Il vit en Belgique.
Professeur à la Faculté de sciences politiques,  économiques et sociales de l’Université catholique de Louvain  (Louvain-la-Neuve), il y dirige le Centre d’Etudes et de Recherches sur  le Monde Arabe Contemporain (CERMAC) et y enseigne notamment un cours  intitulé Enjeux contemporains du développement.
Il est le frère de Naïm Khader, premier représentant de l’OLP à Bruxelles, assassiné en 1981.
Il a été membre du Groupe des Hauts Experts sur la  Politique Européenne de Sécurité Commune et membre du Groupe des Sages  pour le dialogue culturel euro-méditerranéen [présidence européenne  2003-2004]. Il est également membre du Centre d’Etudes des Crises et  des Conflits Internationaux de LLN.
 
 
