dimanche 11 juillet 2010

Obama va à Canossa

USA-Israel - 10-07-2010

Par Comaguer 
L’attaque de la flottille de la paix par Israël : un détail déjà oublié. Il aura fallu à peine plus d’un mois pour que la politique USraélienne reprenne son cours habituel : celui de la grande complicité. L’embarras face à l’ampleur des réactions internationales a été de courte durée et dès la réunion du Conseil de Sécurité qui débouchait sur la honteuse résolution demandant à l’agresseur de mener une enquête sur sa propre agression, comme s’il existait le moindre doute sur la responsabilité pénale d’Israël, il était évident que rien n’allait une nouvelle fois troubler l’alliance mortifère du sionisme et de l’impérialisme états-unien.
















Canossa, par Carlo Emanuelle.

Le fait vient d’être confirmé avec éclat à l’issue de la visite de Netanyahu à Washington et de sa rencontre avec Obama. Le compte-rendu qu’en a fait le 8 Juillet le correspondant à New-York du quotidien israélien Ha'aretz (traduit ci-après) est éclairant puisque non seulement l’attaque de la flottille est passée sous silence mais que Netanyahu a obtenu que toutes les tentatives allant dans le sens d’un contrôle de l’armement nucléaire d’Israël soient abandonnées et que Obama reconnait le droit à Israël de se servir de l’arme nucléaire pour sa défense sans qu’il soit même précisé que la défense nucléaire serait limitée à la riposte à une menace nucléaire (aujourd’hui inexistante) : ce qui veut donc dire le droit de mener une attaque nucléaire de première frappe.
Israël vient donc, et il s’agit d’un événement politique important, de passer, avec l’accord explicite de la Maison Blanche, de sa stratégie traditionnelle de l’ambigüité nucléaire (non reconnaissance officielle de la détention de l’arme nucléaire) à la stratégie de la menace nucléaire effective qui est celle que seuls au monde les Etats-Unis utilisaient jusqu’à présent, et à une menace qu’Israël exerce seul (Israël n’est pas membre officiel d’une alliance militaire) et en fonction de ses seuls intérêts.
Face à pareille évolution, il faut à l’Iran, régulièrement menacé de bombardement, y compris nucléaire, depuis près de trois ans, énormément de sang-froid pour ne pas hurler « A l’assassin » et pour ne pas tomber dans le piège de la fausse symétrie qui pour lui consisterait à dire : « les menaces contre ma sécurité sont désormais permanentes -et de citer tous les discours, interviews, confidences et autres prises de position contenant ces menaces, ils sont légion– et ceci me met dans l’obligation de me doter de la dissuasion nucléaire pour y mettre un terme ».
Signalons incidemment que le premier réacteur nucléaire civil iranien construit par la Russie à Busher devrait commencer à fonctionner en août prochain avec 11 ans de retard.
Ci-joint un article de Barak David dans l'éditon (new-yorkaise) du quotidien Haaretz, 8 juillet 2010, New-York. Traduction Comaguer :
L’administration Obama : Israël a le droit à des capacités nucléaires à des fins de dissuasion
L'administration Obama a révélé au grand public, au cours de la visite du Premier ministre Benjamin Netanyahu à Washington, une série d'accords entre les deux pays sur la politique israélienne « d'ambiguïté nucléaire »- qui jusqu’à ce jour avaient été tenus secrets.
Au centre de ces accords se trouve un veto israélien contre la tenue d'une conférence internationale pour la dénucléarisation du Moyen-Orient, ainsi qu’une volonté sans précédent des Etats-Unis de coopérer avec Israël dans le domaine de l'énergie nucléaire à usage civil.
Les révélations viennent à la suite de la conférence de non-prolifération nucléaire d'examen du Traité, tenue en mai, qui a appelé Israël à accepter des inspections internationales de ses installations nucléaires, et à la tenue d'une conférence internationale pour la dénucléarisation du Moyen-Orient. Le document final de la conférence a été adopté en dépit de vives protestations d'Israël auprès des Etats-Unis.
En pourparlers depuis la conférence, les Etats-Unis ont précisé que cette décision avait été une « erreur ». (?) Dans un effort pour clarifier la position de l'administration sur la question du nucléaire israélien, il a été décidé que - en coordination avec Israël - les détails des arrangements de haut niveau entre les deux parties, arrêtés durant les années 1960, seraient finalement révélés.
Les arrangements ont été mis à jour au fil des ans, y compris au cours de l’année écoulée.
L’objectif de Washington par ces révélations a été d’assainir l'atmosphère et de corriger l'impression donnée lors de la conférence que les États-Unis ne soutenaient pas Israël.
Suite à leur réunion à la Maison Blanche mardi, une annonce spéciale a été faite une heure plus tard concernant les assurances données à Netanyahou par le président américain Barack Obama.
Selon l'annonce, "le président a dit au premier ministre, qu’il reconnaît qu'Israël doit toujours avoir la capacité de se défendre par lui-même, contre toute menace ou possible combinaison de menaces, et que seul Israël peut déterminer ses besoins de sécurité. Le Président s'est engagé à poursuivre les efforts états-uniens pour lutter contre toutes les tentatives internationales pour contester la légitimité de l'État d'Israël."
"Le président a souligné que les États-Unis continueront leur longue pratique de travail en étroite collaboration avec Israël pour s’assurer que les initiatives et les politiques de contrôle des armements ne portent pas atteinte à la sécurité d'Israël, et pour soutenir leurs efforts communs afin de renforcer la paix et la stabilité internationales," poursuit la déclaration.
Dans le cas où le projet de conférence sur la dénucléarisation du Moyen-Orient aurait lieu, "les Etats-Unis insistent pour que cette conférence soit consacrée à une discussion visant à un échange de vues sur un vaste programme, afin d'inclure les questions de sécurité régionale, de vérification et de respect (ndt. sous-entendu : des accords), et toutes les catégories d'armes de destruction massive et de leurs systèmes de transport."
"Le président a souligné que la conférence n'aura lieu que si tous les pays sont convaincus qu'ils peuvent y assister, et que tous les efforts visant à montrer du doigt Israël rendront peu probable la tenue d'une telle conférence. À cet égard, les deux dirigeants ont également convenu de travailler ensemble pour s'opposer aux efforts pour montrer du doigt Israël lors de la Conférence générale de l'AIEA en Septembre."
Entre-temps, avant le départ pour New-York, Netanyahu a rencontré le secrétaire à la Défense Robert Gates et lui a exposé les nécessités de la sécurité d'Israël dans le cadre d'un accord permanent pour la création d'un Etat palestinien.
(Traduction Comaguer)
Apostille de la rédaction d'ISM :
Aller à Canossa : expression rappelant la "Pénitence de Canossa" : en 1077, l'empereur du Saint Empire romain germanique Henri IV vint s'y agenouiller devant le pape Grégoire VII pour que ce dernier lève l'excommunication qui le frappait. Celui-ci, histoire de lui montrer qui c'est qui commandait, le fit attendre 3 jours et 3 nuits, dans la neige, avec sa petite famille, dit la chronique... Le pape aura à s'en repentir quelques années plus tard, semble-t-il.
L'expression "aller à Canossa" indique généralement le fait de s'agenouiller devant son ennemi, dit Wikipedia... ou : petits arrangements entre "amis".