Par Georges Malbrunot le 25 septembre 2009 23h44
Coup de poker ! En révélant l’existence d’un second site d’enrichissement d’uranium près de la ville sainte de Qom, le bloc occidental a marqué un point dans son face-à-face avec Téhéran sur le nucléaire. Point décisif ? Ou simple pression supplémentaire, avant les cruciales discussions de Genève, dans une semaine ?
Quelques remarques avant de tirer de premières conclusions.
- Ce site caché sous une montagne, où 3 000 centrifugeuses seraient en cours d’installation, était surveillé par les Américains, depuis plus de quatre ans, c’est-à-dire avant la première élection de Mahmoud Ahmadinejad à la présidence de la République.
C’est une nouvelle preuve qu’à Téhéran, la possession de l’arme nucléaire se décide ailleurs qu’à la présidence : chez le guide suprême, Ali Khameneï, au Conseil national de sécurité et chez les Gardiens de la révolution, qui ont la haute main sur le programme nucléaire. A méditer pour tout ceux qui concentrent leurs flèches contre Nejad, en oubliant les vrais décisionnaires sur ce dossier.
- Ce n’est donc pas une découverte pour la Cia. Celle-ci aurait informé les services de renseignements anglais et français de l’existence de ce site secret. Traditionnellement, les services gardent jalousement un renseignement dit de très haute importance. Il en aurait été tout différemment, si la Cia avait par exemple découvert le centre où l’Iran « militariserait » une bombe. Dans ces conditions, pourquoi Washington a-t-il décidé de partager l’information ? Sans doute parce que celle-ci ne sera pas décisive dans le face-à-face engagé avec Téhéran.
- Mais si la nouvelle a été rendue publique par Barack Obama, Nicolas Sarkozy et Gordon Brown, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, c’est évidemment pour en solenniser l’annonce. Et lui donner plus de gravité, à une semaine du rendez-vous important de Genève, où les Occidentaux vont rencontrer les Iraniens dans l’espoir de régler une crise qui menace la stabilité du Moyen-Orient.
- Que cherchent les Occidentaux ? D’abord à accentuer la pression sur Téhéran dans la perspective de Genève. Même si Téhéran se défend d’avoir voulu dissimuler (l’AIEA a été informée de l’existence du site dans une lettre datée du 21 septembre, soit quatre jours avant ces révélations), l’Iran a été pris une nouvelle fois en flagrant délit de mensonge tout au long des quatre années de construction du site. Conséquence : les durs parmi les Occidentaux voient leur intransigeance renforcée face à l’Iran: on pense en particulier à Nicolas Sarkozy.
- Si d’ici la fin de l’année – terme fixé à la politique de la main tendue américaine envers l’Iran – celui-ci ne se montre pas ouvert à des concessions, les menaces de sanctions plus dures se renforceront. C’est là certainement le principal objectif recherché par les Occidentaux à travers cet effet d’annonce : dialoguer certes, mais avec une épée de Damoclès encore plus proche de la tête du régime islamique. Bien joué en termes de calendrier. D’autant que depuis avant-hier la Russie n’est plus, par principe, opposée à des sanctions renforcées contre Téhéran. Reste maintenant à associer au jeu de poker les Chinois, partenaires commerciaux de premier plan des Iraniens, mais toujours hostiles à un nouveau train de sanctions contre la République islamique.