Denis Sieffert
Que nous réservent les élections en Afghanistan ? Celles-ci ont bien eu lieu le 20 août, mais le satisfecit que s’est accordé le jour même Barack Obama paraît bien prématuré. Quatre jours après le scrutin, les deux principaux candidats, l’actuel Président, Hamid Karzaï, soutenu par Washington, et son principal rival, Abdullah Abdullah, revendiquaient l’un et l’autre la victoire, le second accusant le premier de fraudes massives. Accusations corroborées par nombre d’observateurs afghans et internationaux. Pire encore : la participation, d’abord estimée à 40 ou 50 %, serait selon de nombreux observateurs plus proche de 5 ou 10 %. Ce qui constituerait un cuisant échec du processus démocratique et une victoire des talibans.
Des lendemains électoraux à l’iranienne ne sont donc pas à exclure si le candidat vaincu venait à contester sa défaite. Or, Barack Obama a fait de l’Afghanistan sa priorité en politique internationale, prévoyant de renforcer la présence américaine dans ce pays, qui sera prochainement portée à 68 000 soldats sur les 100 000 réunis sous la bannière de l’Otan. Parallèlement, les violences liées à l’insurrection dirigée par les talibans ont atteint cet été un niveau sans précédent depuis 2001, quand les États-Unis de George Bush se sont lancés dans cette aventure, officiellement, pour traquer Ben Laden.
Dans le même temps, la reprise des attentats en Irak vient sérieusement contrarier la politique de retrait entamée par Barack Obama. L’argument du retour à la sécurité qui légitimait le nouveau pouvoir soutenu par Washington ne vaut plus guère. Il faudrait aussi ajouter aux difficultés du nouveau président américain la résistance des durs du gouvernement israélien à sa demande de gel de la colonisation dans les territoires palestiniens. Un gel qui constitue évidemment un préalable à l’ouverture de nouvelles négociations avec les Palestiniens, sur la base d’un texte que rédige ces jours-ci l’envoyé spécial de la Maison Blanche, George Mitchell.
Mais les nuages s’amoncellent aussi au-dessus des États-Unis. Et pas seulement parce qu’un ouragan était annoncé mardi sur l’île de Martha’s Vineyard, où la famille présidentielle passe ses vacances. C’est en effet l’un des volets les plus importants de la campagne du candidat Obama qui est contesté : le projet de réforme du système de santé. Le Président souhaite par cette réforme apporter une couverture maladie aux quelque 46 millions d’Américains qui en sont exclus. L’ancienne candidate républicaine à la vice-présidence, l’ultraréactionnaire Sarah Palin, a donné le ton de l’opposition républicaine en qualifiant cette réforme de « liberticide » et de « socialiste ». Le projet attaque en effet le pouvoir financier des puissantes compagnies d’assurance, qui, dans le système privé, assurent une couverture sélective en pratiquant une discrimination entre riches et pauvres. Tandis que les premiers assurent de gigantesques profits aux compagnies, les autres ne bénéficient d’aucune couverture maladie. Ce qui explique la violence du débat. Bref, l’état de grâce appartient bien au passé pour Barack Obama.
publié par Politis