par K. Selim
Alors qu’en Egypte, la campagne pour que Gamal Moubarak puisse hériter « démocratiquement » du pouvoir de son père a reçu l’appui du pape copte Chenouda et du comédien commercialement avisé Adel Imam, le président Hosni Moubarak est aux Etats-Unis pour évoquer la paix au Proche-Orient.
L’administration Obama, de manière très pragmatique, fait peu cas de la démocratie au pays de Moubarak, cet allié si sûr. Le président américain l’a montré en choisissant de s’adresser au monde musulman à partir du Caire et le démontre en accueillant un président égyptien qui, quoi qu’il en dise, prépare le terrain à son fils. Hosni Moubarak a quand même eu le réflexe de préparer sa visite à Washington, où le lobby israélien l’attendait de pied ferme et où l’administration Obama veut des « signes » arabes amicaux en direction de Tel-Aviv.
Il a rappelé le « service minimum » des Etats arabes dits modérés dans un entretien publié dans le journal gouvernemental Al-Ahram. Les Etats arabes, a-t-il indiqué, ne reconnaîtront Israël et ne normaliseront leurs relations avec lui qu’après la conclusion d’un accord de paix équitable au Proche-Orient. C’est une position déjà exprimée par l’Arabie Saoudite malgré les pressions américaines. Cette « résistance » des Etats alliés des Américains n’a qu’une seule signification : le préalable de la solution avant la reconnaissance et la normalisation est une limite au-delà de laquelle ils n’auront plus le moindre crédit.
Les interminables processus de « paix » ont clairement montré que les concessions arabes ne sont suivies que par de nouvelles exigences israéliennes. A telle enseigne qu’on est arrivé aujourd’hui à l’os. Si les Etats arabes reconnaissent et normalisent les relations avec Israël avant que celui-ci n’ait restitué les territoires occupés en 1967, ce serait un enterrement honteux de la cause palestinienne. Les opinions et les élites arabes sont aujourd’hui suffisamment informées pour qu’aucun discours, pas même celui de la fantomatique menace chiito-perse, ne puisse justifier ce pas fatal.
Hosni Moubarak, chef d’Etat d’un pays qui entretient des relations diplomatiques avec Israël, sait parfaitement que l’écrasante majorité de la population égyptienne est contre la normalisation. Il ne pouvait donc que répéter - et avant d’arriver à Washington - la limite à ne pas dépasser. Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, a fait la même chose à sa manière. Quand le congrès du Fatah réaffirme le « droit à la résistance », Mahmoud Abbas le corrige en affirmant que la négociation est la « seule voie ». Cette « correction » est, bien entendu, destinée à satisfaire les Américains qui ont froncé les sourcils.
Elle n’en incarne pas moins l’impasse dans laquelle se trouvent les alliés arabes des Américains dans la région. Ils doivent renoncer au droit naturel des peuples sous occupation étrangère de se défendre, y compris par les armes, et s’en remettent totalement à Washington où le système est structurellement sous influence du lobby israélien. Leur marge est très étroite. Obama a demandé, sans trop d’ailleurs forcer le ton, à Israël de stopper la colonisation des territoires palestiniens. Ce qui n’est qu’une exigence, très tardive, d’application du droit international est présenté comme un grand geste. En contrepartie, cette administration Obama, plus velléitaire que décidée, exige des Etats arabes de reconnaître Israël.
Combien de temps tiendront les Etats arabes, faibles parce que non démocratiques, avant de trouver un prétexte pour abandonner le minimum pour le dérisoire ?
Le Quotidien d’Oran - Editorial