Khaled Amayreh
L’annonce de nouveaux projets de construction de colonies par
Israël continue de saper les espoirs de voir reprendre les pourparlers
de paix avec l’Autorité Palestinienne.
Apparemment déterminé à saper les efforts renouvelés du Quartet International
pour encourager la reprise des pourparlers de paix entre Israël et
l’Autorité Palestinienne (AP), le gouvernement israélien vient de faire
part de sa décision de construire une grande colonie au sud de Jérusalem
en Cisjordanie occupée.
La nouvelle colonie, qui comprendra des milliers de
maisons, a pour but de créer une barrière démographique irréversible
entre Jérusalem Est, la Jérusalem arabe, et la région de Bethlehem qui
comprend les villes palestiniennes de Bethlehem, Beit Jala et Beit Sahur
ainsi que des douzaines de petites villes et villages.
La semaine dernière, le premier ministre Binyamin
Netanyahou a annoncé la nomination d’un panel qui aura pour mission de
"légaliser" les colonies et les avant-postes coloniaux construits
illégalement sur des terres palestiniennes privées. Selon le droit
international, toutes les colonies juives établies en terre occupée
depuis 1967 sont illégales.
La nouvelle colonie au nord de Bethlehem comportera 2610
logements. Selon des sources israéliennes, le nouveau "quartier"
encerclera étroitement Jérusalem Est et le coupera, du point de vue
démographique, du reste de la Cisjordanie. En d’autres termes, la
nouvelle colonie anéantira encore davantage les espoirs palestiniens de
faire de Jérusalem Est la capitale d’un futur — et de plus en plus
illusoire — état palestinien.
Le cartographe palestinien, Khalil Tufakji, dit
qu’Israël a l’intention de construire au moins 5000 logements sur de la
terre arabe confisquée coupant ainsi Bethlehem et ses alentours des
villages et villes de Jérusalem, soit Beit Safafa, Shofat, Sur Baher et
Ain Tuba.
Selon les médias israéliens, la décision de construire cette nouvelle colonie juive a été prise au moment où les efforts du Quartet International
(USA, UE, Russie et ONU) pour redémarrer le processus de paix étaient
les plus importants. Dans sa proposition, le Quartet stipulait qu’aucun
des deux camps ne devrait prendre des mesures susceptibles de porter
préjudice à l’accord sur le statut final.
Les membres du Quartet ont dénoncé la décision israélienne. Cependant, Israël se moque pas mal des reproches verbaux.
Au début de la semaine, les diplomates du Quartet ont
dit qu’ils allaient rencontrer séparément les officiels palestiniens et
israéliens dans l’espoir de ranimer les pourparlers, qui sont au point
mort, entre les deux camps. Mark Toner, un porte-parole du Département
d’Etat des USA a dit que les diplomates du Quartet essayaient de mettre
en place un programme de reprise des négociations.
Entre autres choses, les propositions du Quartet pour
reprendre le processus de paix entre Israël et l’Autorité Palestinienne
(PA) incluent la clause que la reprise des pourparlers serait basée sur
le projet ("roadmap") mis au point par la précédente administration
Bush.
Le document, qui a été accepté à contre-coeur par
Israël, demande aux deux camps de s’abstenir d’actes unilatéraux qui
pourraient peser sur l’issue des pourparlers de paix. Il demande aussi à
Israël de s’abstenir d’agrandir les colonies juives, y compris pour la
soi-disant "croissance naturelle".
Cependant Israël n’a jamais vraiment respecté le
document et a continué à construire des colonies partout dans les
territoires occupés et en particulier dans Jérusalem Est.
Le gouvernement de Netanyahou a fait preuve de duplicité
en disant qu’il acceptait les dernières propositions du Quartet. En
effet la récente décision israélienne de construire plus de colonies en
Cisjordanie montre que son accord n’est probablement qu’une ruse
destinée à faire échouer les efforts palestiniens pour obtenir de l’ONU
la reconnaissance d’un futur état palestinien.
Jusqu’ici, l’AP n’a pas réussi à prendre une position
claire par rapport aux propositions du Quartet. Les officiels de l’AP
ont réagi favorablement en disant que les propositions contenaient des
éléments encourageants. Mais ils ne se sont pas avancés davantage.
Quant à Mahmoud Abbas, le président de l’AP, il a dit
que son gouvernement n’accepterait les propositions du Quartet que si
Israël acceptait de geler la construction des colonies et de reconnaître
les frontières de 1967 comme base des négociations.
Dans le discours qu’il a fait à Ramallah le mardi 18
octobre pour accueillir des dizaines de prisonniers palestiniens libérés
par Israël lors de l’échange de prisonniers entre Tel Aviv et le Hamas,
Abbas a dit : "Les prochains pourparlers porteront sur un Etat dans les
frontières de 1967."
Abbas a aussi révélé que "Il y aura bientôt un autre
accord concernant les prisonniers. Je ne trahirai pas de secret en vous
disant qu’il y aura un autre accord du même genre. Nous demandons aux
Israéliens de respecter leurs engagements, si tant est qu’ils prennent
vraiment ces engagements au sérieux".
Selon des observateurs se trouvant dans les territoires
palestiniens, Abbas fait l’objet d’une énorme pression de la part du
peuple palestinien qui attend des résultats politiques tangibles,
surtout depuis que le Hamas s’est fait une énorme publicité en parvenant
à un accord avec Israël pour que soient libérés des prisonniers en
échange de Gilad Shalit.
De fait, comme Abbas est incapable d’obtenir quoi que ce
soit d’Israël, ni la libération de prisonniers de longue durée du
Fatah, comme Marwan Barghouti, ni le gel des incessantes constructions
dans les colonies juives, les Palestiniens ne risquent pas de lui
laisser une période de grâce pour prouver la validité de sa ligne
politique, à savoir davantage de négociations.
L’avenir est sombre d’autant que les experts en Israël
et en Palestine occupée sont tous à peu près d’accord pour dire que, en
dehors du fait que le Quartet parvienne ou non à rétablir les
négociations, la réalité sur le terrain a rendu le processus de paix
caduque dans la mesure où l’instauration d’un Etat palestinien viable et
d’un seul tenant en Cisjordanie est d’ors et déjà devenue virtuellement
impossible.
Cela est dû principalement à la prolifération de
colonies juives qu’aucun gouvernement israélien actuel ou futur
n’acceptera de démanteler pour évacuer des centaines de milliers de
colons juifs établis dans les colonies de Cisjordanie.
L’avenir est d’autant plus sombre que le gouvernement
des USA se montre incapable de résister à la pression — pour ne pas dire
à l’étranglement — des lobbys pro-israéliens de Washington, qui
s’assurent qu’Israël puisse bénéficier du soutien des principales
superpuissances de la planète (même si celles-ci sont déclinantes).
20 octobre 2011 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2011/106...
Traduction de l’anglais : Dominique Muselethttp://weekly.ahram.org.eg/2011/106...