Cisjordanie - 4 mars 2011
Par Khaled Amayreh
Sa "position de marchandage" vis-à-vis du Hamas étant très affaiblie par les changements révolutionnaires dans le monde arabe, en particulier en Égypte, l'Autorité palestinienne contrôlée par le Fatah montre une volonté sans précédent à offrir d'importantes concessions au Hamas. Ceci coïncide avec des appels populaires renouvelés et plus déterminés à "mettre fin aux divisions" politiques palestiniennes. Toutefois, il est prématuré de dire avec certitude si cette volonté est authentique ou simplement une réponse tactique aux développements imprévus. Avec la disparition du régime d'Hosni Moubarak, le Fatah a perdu son principal soutien arabe dans la région. De plus, le "document égyptien" - accord de réconciliation qui était supposé conduire à un rapprochement entre le Fatah et le Hamas - est maintenant devenu, de fait, hors de propos.
Le Fatah avait signé le document mais le Hamas s'était montré réticent, estimant que le proposition était trop partiale en faveur du Fatah. De plus, le Hamas estimait que l'approche du régime Moubarak envers le mouvement islamique palestinien n'était jamais amicale, probablement une extension de la politique vindicative du régime envers les Frères musulmans égyptiens, précurseurs idéologiques du Hamas.
L'Égypte a également servi de courtier et même de garant des "démarches de paix" de l'AP avec Israël, démarches qui ont rencontré peu d'enthousiasme parmi la plupart des Palestiniens. Lorsque l'AP a été durement critiquée après la divulgation récente de ce qui a été appelé "les papiers Palestine" par la chaîne de télévision Al-Jazeera, Abbas et d'autres responsables de l'AP ont argué, pour leur défense, que "tout ce que nous avons fait a été communiqué à nos frères arabes," en référence à l'Égypte, à l'Arabie Saoudite et à la Jordanie.
Maintenant, à la lumière d'un changement radical de régime en Égypte, le soi-disant camp modéré arabe a subi un sérieux coup, et c'est sans aucune doute une mauvaise nouvelle pour les dirigeants palestiniens de Ramallah. Tout ceci semble avoir sérieusement affecté la position de l'AP vis-à-vis du Hamas, ce qui explique aussi les ouvertures inhabituelles du Fatah et les propositions ostensiblement généreuses pour une réconciliation nationale et la restauration de l'unité nationale palestinienne.
Parmi les ouvertures déclarées envers le Hamas, on trouve une déclaration récente du premier ministre du gouvernement de Ramallah, Salam Fayyad, qui aurait dit qu'il serait d'accord pour former un gouvernement d'unité nationale avec le Hamas, même si cela signifiait que ce dernier garderait le contrôle de la Bande de Gaza.
On ne sait pas si la déclaration de Fayyad reflète son point de vue personnel, ou si elle a été coordonnée avec la direction de l'AP. Le Fatah a pris ses distances vis-à-vis de ces propos, disant qu'ils allaient trop loin et exprimaient essentiellement les positions de Fayyad.
On a également cité Nabil Shaath, dirigeant du Fatah et négociateur, qui aurait dit que le Fatah était prêt à accepter la plupart -sinon toutes - les exigences et objections du Hamas relatives à la proposition égyptienne. Il semble cependant que ce soit plus facile à dire qu'à faire, étant donné l'opposition catégorique des services de sécurité de Cisjordanie à tout rapprochement véritable avec le Hamas, en particulier la garantie que le mouvement islamique aurait toute liberté d'action à l'intérieur du territoire occupé, ces services craignant que le Hamas se reconstruise et recouvre son influence d'antan.
Le Fatah, en coopération avec Israël et le général étasunien Keith Dayton, s'est acharné à affaiblir le Hamas en Cisjordanie en arrêtant des milliers de personnes suspectées de sympathie islamique et en bouclant des centaines d'institutions islamiques.
De plus, Abbas a dit qu'il n'y aurait aucune élection en Cisjordanie s'il n'y en avait pas dans la Bande de Gaza. Ses remarques à ce sujet ont été considérées comme une justification de la position du Hamas, à savoir qu'un consensus national devait précéder toutes futures élections dans les territoires occupés puisque des élections sans accord ne feraient qu'approfondir la scission entre les deux camps.
La déclaration d'Abbas a suscité des réactions fraîches de la part de certains partenaires de gauche du Fatah au sein de l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP), qui ont vu ses remarques comme une "capitulation devant le coup d'État à Gaza."
Avant les changements révolutionnaires dans plusieurs pays arabes, le Fatah et l'AP avaient plus ou moins adopté des attitudes hostiles envers le Hamas, certains porte-paroles du Fatah accusant le groupe islamique de vouloir installer un émirat islamique terroriste, de style Ben Laden, dans la Bande de Gaza.
A un moment donné, certains responsables de l'AP sont allés jusqu'à avertir le Hamas que le Fatah saisirait Gaza par la force, vraisemblablement en coopération avec Israël et l'ancien régime d'Hosni Moubarak, ou en fomentant une insurrection locale contre le le mouvement élu. Ces menaces ont maintenant complètement disparu.
De plus, le récent veto des États-Unis à un projet de résolution condamnant l'expansion coloniale juive en Cisjordanie, qui était présenté par l'AP, a sérieusement embarrassé les dirigeants de l'AP parce qu'il démontrait que les Palestiniens ne pouvaient compter sur les États-Unis pour négocier une paix digne et juste dans la région.
Un responsable de l'AP, commentant le veto américain au Conseil de Sécurité des Nations Unions, a dit que "nous nous trompons nous-mêmes si nous pensons que les États-Unis nous donneront un État. Pour avoir un véritable État palestinien, il faut une véritable pression américaine sur Israël, mais les États-Unis n'ont ni la capacité ni l'envie de faire pression sur Israël."
Puis il y a le facteur israélien. Israël continue de tenir l'AP à la gorge, à tel point que toute démarche sérieuse du régime de Ramallah vers un rapprochement véritable et sincère avec le Hamas rencontrera une résistance - même violente- d'Israël. Inutile de dire que ceci met les dirigeants de l'AP dans une position peu enviable, avec une marge de manœuvre faible.
Pendant ce temps, les services sécuritaires de l'AP continuent les arrestations quotidiennes de membres du Hamas, même si le rythme semble ralentir. De même, la coordination sécuritaire avec Israël, même dans ses expressions les plus scandaleuses, continue d'être la norme plutôt que l'exception. Certains observateurs affirment que l'AP est si profondément impliquée dans les accords de coordination sécuritaire avec Israël que rompre ces accords mettrait en danger son existence même. Et on sait bien que pour que le Fatah se rapproche du Hamas, il doit s'éloigner d'Israël.
Le Fatah a toujours cherché à trouver une formule magique qui lui permettrait d'apaiser tant l'opinion publique israélienne que palestinienne. Cependant, étant donné les réalités politiques actuelles dans le monde arabe, en particulier la fin du régime Moubarak, ce qui était possible il y a trois mois ne l'est plus aujourd'hui.
Le processus de paix moribond avec Israël, l'étreinte américaine aveugle d'Israël, et la politique belliciste et extrémiste de ce dernier, dont l'expansion coloniale acharnée, mettent de plus en plus de pression sur l'AP pour qu'elle divorce de l'axe US-Israël. Qu'elle puisse le faire ET survivre est une autre question.
L'Égypte a également servi de courtier et même de garant des "démarches de paix" de l'AP avec Israël, démarches qui ont rencontré peu d'enthousiasme parmi la plupart des Palestiniens. Lorsque l'AP a été durement critiquée après la divulgation récente de ce qui a été appelé "les papiers Palestine" par la chaîne de télévision Al-Jazeera, Abbas et d'autres responsables de l'AP ont argué, pour leur défense, que "tout ce que nous avons fait a été communiqué à nos frères arabes," en référence à l'Égypte, à l'Arabie Saoudite et à la Jordanie.
Maintenant, à la lumière d'un changement radical de régime en Égypte, le soi-disant camp modéré arabe a subi un sérieux coup, et c'est sans aucune doute une mauvaise nouvelle pour les dirigeants palestiniens de Ramallah. Tout ceci semble avoir sérieusement affecté la position de l'AP vis-à-vis du Hamas, ce qui explique aussi les ouvertures inhabituelles du Fatah et les propositions ostensiblement généreuses pour une réconciliation nationale et la restauration de l'unité nationale palestinienne.
Parmi les ouvertures déclarées envers le Hamas, on trouve une déclaration récente du premier ministre du gouvernement de Ramallah, Salam Fayyad, qui aurait dit qu'il serait d'accord pour former un gouvernement d'unité nationale avec le Hamas, même si cela signifiait que ce dernier garderait le contrôle de la Bande de Gaza.
On ne sait pas si la déclaration de Fayyad reflète son point de vue personnel, ou si elle a été coordonnée avec la direction de l'AP. Le Fatah a pris ses distances vis-à-vis de ces propos, disant qu'ils allaient trop loin et exprimaient essentiellement les positions de Fayyad.
On a également cité Nabil Shaath, dirigeant du Fatah et négociateur, qui aurait dit que le Fatah était prêt à accepter la plupart -sinon toutes - les exigences et objections du Hamas relatives à la proposition égyptienne. Il semble cependant que ce soit plus facile à dire qu'à faire, étant donné l'opposition catégorique des services de sécurité de Cisjordanie à tout rapprochement véritable avec le Hamas, en particulier la garantie que le mouvement islamique aurait toute liberté d'action à l'intérieur du territoire occupé, ces services craignant que le Hamas se reconstruise et recouvre son influence d'antan.
Le Fatah, en coopération avec Israël et le général étasunien Keith Dayton, s'est acharné à affaiblir le Hamas en Cisjordanie en arrêtant des milliers de personnes suspectées de sympathie islamique et en bouclant des centaines d'institutions islamiques.
De plus, Abbas a dit qu'il n'y aurait aucune élection en Cisjordanie s'il n'y en avait pas dans la Bande de Gaza. Ses remarques à ce sujet ont été considérées comme une justification de la position du Hamas, à savoir qu'un consensus national devait précéder toutes futures élections dans les territoires occupés puisque des élections sans accord ne feraient qu'approfondir la scission entre les deux camps.
La déclaration d'Abbas a suscité des réactions fraîches de la part de certains partenaires de gauche du Fatah au sein de l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP), qui ont vu ses remarques comme une "capitulation devant le coup d'État à Gaza."
Avant les changements révolutionnaires dans plusieurs pays arabes, le Fatah et l'AP avaient plus ou moins adopté des attitudes hostiles envers le Hamas, certains porte-paroles du Fatah accusant le groupe islamique de vouloir installer un émirat islamique terroriste, de style Ben Laden, dans la Bande de Gaza.
A un moment donné, certains responsables de l'AP sont allés jusqu'à avertir le Hamas que le Fatah saisirait Gaza par la force, vraisemblablement en coopération avec Israël et l'ancien régime d'Hosni Moubarak, ou en fomentant une insurrection locale contre le le mouvement élu. Ces menaces ont maintenant complètement disparu.
De plus, le récent veto des États-Unis à un projet de résolution condamnant l'expansion coloniale juive en Cisjordanie, qui était présenté par l'AP, a sérieusement embarrassé les dirigeants de l'AP parce qu'il démontrait que les Palestiniens ne pouvaient compter sur les États-Unis pour négocier une paix digne et juste dans la région.
Un responsable de l'AP, commentant le veto américain au Conseil de Sécurité des Nations Unions, a dit que "nous nous trompons nous-mêmes si nous pensons que les États-Unis nous donneront un État. Pour avoir un véritable État palestinien, il faut une véritable pression américaine sur Israël, mais les États-Unis n'ont ni la capacité ni l'envie de faire pression sur Israël."
Puis il y a le facteur israélien. Israël continue de tenir l'AP à la gorge, à tel point que toute démarche sérieuse du régime de Ramallah vers un rapprochement véritable et sincère avec le Hamas rencontrera une résistance - même violente- d'Israël. Inutile de dire que ceci met les dirigeants de l'AP dans une position peu enviable, avec une marge de manœuvre faible.
Pendant ce temps, les services sécuritaires de l'AP continuent les arrestations quotidiennes de membres du Hamas, même si le rythme semble ralentir. De même, la coordination sécuritaire avec Israël, même dans ses expressions les plus scandaleuses, continue d'être la norme plutôt que l'exception. Certains observateurs affirment que l'AP est si profondément impliquée dans les accords de coordination sécuritaire avec Israël que rompre ces accords mettrait en danger son existence même. Et on sait bien que pour que le Fatah se rapproche du Hamas, il doit s'éloigner d'Israël.
Le Fatah a toujours cherché à trouver une formule magique qui lui permettrait d'apaiser tant l'opinion publique israélienne que palestinienne. Cependant, étant donné les réalités politiques actuelles dans le monde arabe, en particulier la fin du régime Moubarak, ce qui était possible il y a trois mois ne l'est plus aujourd'hui.
Le processus de paix moribond avec Israël, l'étreinte américaine aveugle d'Israël, et la politique belliciste et extrémiste de ce dernier, dont l'expansion coloniale acharnée, mettent de plus en plus de pression sur l'AP pour qu'elle divorce de l'axe US-Israël. Qu'elle puisse le faire ET survivre est une autre question.