Rami Almeghari - The Electronic Intifada
Un monceau de ruines et de la poussière est tout ce qui reste d’une laiterie que l’aviation israélienne a détruite hier dans la ville de Khan Younis au centre de la bande de Gaza.
Des hommes nettoyer les restes de la laiterie détruite à Khan Younis après avoir été bombardés par un raid aérien israélien dans le milieu de la nuit - Photo : Ismael Mohamad/UPI/Newscom
Les ruines de la laiterie sont adjacentes à un parc d’attractions dans le parc Asdaa, qui sert de refuge aux habitants de la bande de Gaza assiégée.
Avant le bombardement, la laiterie possédait trois chaînes de production réparties sur 400 mètres carrés. Elle produisait du lait, du fromage et du beurre, fournissant un revenu à quarante familles palestiniennes de Gaza et distribuant ses produits vers diverses parties de la bande de Gaza.
A l’aube, la laiterie a été touchée par au moins deux missiles tirés depuis des avions, répandant les pièces de machines et les équipements à des mètres de distance, transformant l’usine en un tas de décombres. L’attaque sur la laiterie s’est produite au milieu d’une augmentation régulière de l’activité militaire israélienne dans la bande de Gaza. L’aviation israélienne a également frappé d’autres cibles, ce mardi, blessant quatre Palestiniens, dont un gardien dans Asdaa.
En prenant connaissance des dégâts, Shadi al-Batsh, ingénieur en chef de la laiterie, a déclaré à The Electronic Intifada : « cette laiterie avait été un rêve et elle était ensuite devenue réalité, mais cela a finalement tourné au cauchemar - pas seulement pour moi mais aussi pour la quarantaine d’employés qui ont tous travaillé dur pour réaliser quelque chose malgré un blocus israélien paralysant. »
Au milieu des décombres, al-Batsh a raconté comment la laiterie Asdaa avait réussi à distribuer ses produits à travers la bande de Gaza, et il a décrit l’impact de l’attaque sur l’économie locale déjà en difficulté à cause de l’état de siège imposé par Israël et qui dure maintenant depuis 42 mois.
« Nos pertes financières suite à cette attaque sont estimées à environ 300 000 dollars. En plus de ces pertes financières directes, il y a une perte indirecte pour les personnes qui avaient l’habitude de nous fournir en matières premières, en emballages de plastique, et ceux qui transportaient les produits dans les fourgonnettes et les distribuaient aux épiciers dans de nombreuses zones de Gaza. Nous nous demandons vraiment pourquoi un tel endroit a été pris pour cible par l’aviation israélienne. Il ne s’agissait que d’une laiterie et nous ne fabriquions ni armes ni roquettes artisanales », a expliqué al-Batsh.
Et Al-Batsh d’ajouter : « C’est la première fois que le centre d’Asdaa a été pris pour cible. Aujourd’hui nous avons eu une quinzaine d’autobus d’écoliers, pour une visite de terrain au cours de laquelle les enfants des écoles profitent un peu du parc d’attractions et de ce jardin public. Nous avons peur que ces voyages ne commencent à se réduire après un tel bombardement. »
Le centre Asdaa a été construit sur le terrain d’une ancienne colonie israélienne. En plus de la laiterie, il comprend un parc d’attractions, une pêcherie, un élevage de volailles et un jardin public. Le jardin public abrite des animaux sauvages, dont des singes, et un petit train pour les enfants traverse le parc. Le train passe désormais par les ruines de la laiterie. Depuis que ce complexe a été mis en place, il est devenu une attraction pour les habitants de Gaza, qui profitent de la possibilité de passer du temps au dehors, en dépit du siège israélien.
Rusaila Hammad est une enseignante d’une école voisine qui avait 120 de ses élèves dans les jardins d’Asdaa après l’attaque. « Nous avons appris plus tôt que l’installation d’ Asdaa avait été ciblée. Mais l’administration de l’école a insisté pour que nous emmenions les enfants pour le voyage scolaire prévu », a expliqué Hammad.
Elle ajoute : « Où irions-nous ? A la mer ou aux frontières bouclées de Gaza ? Les Israéliens pensent qu’en ciblant des lieux tels que ceux-ci, ils font la bonne chose ? De telles actions ne feront qu’alimenter la haine, et ces enfants ont le droit de jouir de leur enfance normalement comme les enfants à travers le monde. »
Elle explique aussi que Asdaa est « l’un des rares endroits où nos enfants peuvent évacuer le stress qu’ils ont à endurer sous le blocus israélien et les attaques contre nous ».
Une des élèves d’Hammad, Marwa Zain âgée de 14 ans, a laisser s’exprimer sa colère. « Qu’est-ce qu’ils veulent que nous fassions ? Tous les endroits dans la bande de Gaza sont devenus vulnérables aux attaques israéliennes. Qu’est-ce que nous, les enfants, avons à faire avec une telle violence ? Que veulent-ils ? Nous sommes déterminés à continuer à venir ici. Nous avons peu de choix car Gaza est un endroit très petit et Israël nous assiège de toutes parts, y compris sur la côte. »
A un autre coin du jardin public de Asdaa, Fatma al-Hadidy pose une question semblable. « Si nous arrêtons de visiter un tel endroit par crainte des attaques israéliennes, où pouvons-nous aller ? C’est vraiment une honte pour eux de s’attaquer à un tel lieu ».
* Rami Almeghari est journaliste et conférencier universitaire vivant dans la bande de Gaza.
Vous pouvez le contacter à : rami_almeghari@hotmail.com.
Traduction : Naguib