Kharroubi Habib - Le Quotidien d’Oran
Après le Brésil et l’Argentine qui, début décembre, ont officiellement reconnu la Palestine « comme un Etat libre et indépendant à l’intérieur des frontières de 1967 », deux autres pays d’Amérique latine, la Bolivie et l’Equateur, ont fait de même alors qu’un autre, l’Uruguay, a annoncé qu’il les imitera en 2011.
En Europe, l’Espagne a elle aussi fait connaître son intention de procéder à cette reconnaissance à brève échéance alors que d’autres membres de l’Union européenne ont déclaré y réfléchir. Autant de gestes et déclarations qui confirment que la demande formulée dans ce sens à la communauté internationale par l’Autorité palestinienne a produit de l’effet sur les consciences malgré les pressions et les mises en garde exercées par l’État sioniste et son allié américain contre cette démarche. Ils sont annonciateurs qu’un courant grandit dans la communauté internationale déterminé à faire prévaloir le principe décidé par celle-ci du droit des Palestiniens à un État national à l’intérieur des frontières de 1967. Ce qui ne peut que donner du poids aux négociateurs palestiniens aux pourparlers de paix avec Israël. Lequel, encouragé par le peu de cas que font les États-Unis de ce principe, refuse de s’y soumettre.
Bien entendu, l’initiative des pays sud-américains et les déclarations européennes n’excluant pas la reconnaissance de l’État palestinien à l’intérieur des frontières de 1967 ne vont pas mettre fin à l’entêtement du cabinet israélien à vouloir imposer un tout autre tracé. Mais elles ont le mérite de reconnaître la légitimité de la revendication palestinienne. Plus d’une centaine de pays ont avant ceux que l’on a cités accordé leur reconnaissance à l’autorité palestinienne avant ou après qu’elle s’installe en territoires occupés. Beaucoup d’entre eux néanmoins ont entretenu le flou sur les limites territoriales que cette autorité est fondée à revendiquer pour l’État palestinien à créer. Flou qu’a exploité l’État sioniste pour phagocyter par la voie d’installation de colonies juives sur des pans toujours plus larges des territoires occupés. L’affirmation, de plus en plus exprimée dans la communauté internationale, que les frontières de l’État palestinien sont celles de 1967 constitue la délégitimation de la politique de colonisation visant à rendre un fait accompli la spoliation territoriale à laquelle procède l’État hébreu.
Ces reconnaissances annoncées en Amérique latine et celles que des pays européens pourraient bientôt endosser ont suscité « les regrets » d’Israël et la « désapprobation » des États-Unis au motif « qu’elles sont des initiatives unilatérales contre-productives ». Contre-productives du point de vue américano-israélien, c’est certain. Parce qu’elles s’inscrivent en refus du projet des deux alliés de confiner le futur État palestinien, si tant est qu’ils veulent sa création, dans un espace réduit pour n’être qu’un « bantoustan » ouvert à l’expansionnisme et à « l’extension naturelle » que le cabinet israélien déclare inéluctable en terme de perspective pour l’État hébreu. Il n’en demeure pas moins que ces reconnaissances et celles à venir sapent les certitudes israéliennes. D’où le raidissement des autorités de Tel Aviv qui s’exprime par les opérations militaires à répétition lancées ces derniers jours contre la bande de Gaza sous prétexte que des tirs d’obus et de roquettes s’opèrent contre le territoire israélien à partir de cette zone. Tout le monde sait pertinemment qu’Israël a recours à la stratégie de la tension à chaque fois qu’il est en difficulté internationalement ou que des initiatives diplomatiques contrecarrent la réalisation de ses desseins antipalestiniens.
27 décembre 2010 - Le Quotidien d’Oran - Analyse