Par Salah Salah
Propos recueillis par Jean-Pierre Barrois pour Informations Ouvrières n° 116. Salah Salah, membre du Conseil national palestinien, sera délégué palestinien à la Conférence d’Alger contre la guerre et l’exploitation (26, 27, 28 novembre 2010).
Peux-tu nous dire quelques mots de ta prime jeunesse ?
Oui. Je suis né en 1936 à Khoueir Abu Shoushih, à 10 kilomètres de la ville de Tibériade. Tous les gens qui habitaient le village étaient des Bédouins. Il y avait deux autres villages près de mon village : l’un s’appelait Majdal, à 2 kilomètres au sud, et l’autre Kenosar, à 3 kilomètres à l’est, près du lac. Les relations étaient bonnes avec les juifs du premier village. Le maire de Majdal et celui de mon village collaboraient pour résoudre les querelles ou les disputes de manière pacifique, alors qu’avec le second village, nous n’avions pas de contacts : il était « kepot », interdit pour un Arabe de s’y rendre.
Quand il n’y avait pas d’exclusive, il n’y avait pas de problèmes de cohabitation...
Tout à fait.
La Palestine était alors sous mandat britannique. Comment les troupes britanniques se comportaient-elles ?
Les troupes britanniques arrivaient sans prévenir dans le village pour chercher des armes ou poursuivre des partisans. Une fois, les soldats britanniques sont entrés dans notre maison pour s’emparer de mon père, ils l’ont torturé sauvagement. Trois jours après, il est mort à l’hôpital de Tibériade.
Comment t’es-tu engagé politiquement ?
J’ai pris conscience avec beaucoup d’admiration que ma famille pratiquait le même système que le socialisme : « Chacun donne son travail et chacun prend ce dont il a besoin. » C’est le communisme primitif. Je suis devenu socialiste et j’ai adhéré aux idées du marxisme-léninisme. J’ai gardé de mon enfance des souvenirs très intenses, mais il y a deux événements qui m’ont profondément marqué et qui ont eu, jusqu’à aujourd’hui, une influence considérable sur ma façon de voir les choses et sur mon caractère.
Le premier est lié au jour où nous avons été obligés de quitter la Palestine. C’est ce qu’on appelle la Nakba de 1948. J’avais douze ans et je ne connaissais pas les raisons politiques de cet événement. Mais je n’oublierai jamais les souffrances que nous avons endurées lorsque nous avons dû nous rendre au Liban. Nous avons marché avec des milliers d’autres Palestiniens, croisant d’autres groupes qui venaient de toutes les directions. C’était une terrible épreuve.
Le second souvenir m’ayant profondément marqué se rapporte à la situation intolérable qui nous était imposée dans le camp de Ein el-Hilweh. Un jour, nous étions en train de discuter, exprimant nos craintes, notre impatience et notre désespoir. Ma mère, comme elle le faisait tous les jours, est alors venue apporter le thé et a cité, avec son accent bédouin, un proverbe arabe, qui dit : « Le gouvernement arabe est responsable de la perte de la Palestine, il faut que vous la repreniez. » A partir de ce moment-là, j’ai décidé de lutter pour le droit au retour dans ma maison, au village de Khoueir Abu Shoushih, de m’engager et de respecter cette promesse pour ma mère.
Ma famille et mes proches vivent encore dans le camp de Ein el-Hilweh. 1964 a vu la création de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), et, dès le début, j’ai eu une responsabilité dans son bureau de Beyrouth. En 1967, j’ai participé à la fondation du Front populaire de libération de la Palestine. J’y ai occupé des fonctions de direction jusqu’en 1992. J’ai été élu à la direction de l’OLP en 1972. J’ai démissionné de certaines de mes fonctions à la suite des accords d’Oslo. Je suis membre du Conseil national palestinien depuis 1970. Je suis également président du Comité permanent des réfugiés et, depuis 1989, président de l’association d’amitié entre Cuba et la Palestine.
Tu as également joué un rôle important dans la reconstruction du mouvement syndical palestinien dans les années 1960.
J’ai participé avec d’autres syndicalistes à la reconstruction de la confédération syndicale palestinienne en 1964. J’ai été élu secrétaire de la section libanaise par le congrès de 1965. En 1969, j’ai rejoint le secrétariat général au Caire. J’ai quitté le mouvement syndical en 1972, parce que j’étais trop impliqué dans les activités politiques.
Tu vas participer à la conférence d’Alger. Qu’en attends-tu ?
Nous avons beaucoup de choses en commun avec les organisateurs de la conférence. Nous avons le même point de vue sur la cause palestinienne. Nous croyons que la méthode juste et correcte pour mettre fin au conflit sanglant du Moyen-Orient et à ces guerres interminables est la création d’un Etat démocratique et laïque en Palestine. Nous défendons le droit des réfugiés palestiniens à retourner sur leur terre, dans les villages et les villes où ils habitaient avant la Nakba de 1948. Nous essayons de prouver cela en paroles et en actions. Je suis maintenant membre d’un comité international qui prépare une conférence sur les migrations et les réfugiés devant se tenir à Quito, en Equateur. Ce serait très bien si une délégation de participants à la conférence d’Alger pouvait se rendre à la conférence de Quito pour établir des contacts avec des militants d’Amérique latine qui nous apportent leur soutien.
Oui. Je suis né en 1936 à Khoueir Abu Shoushih, à 10 kilomètres de la ville de Tibériade. Tous les gens qui habitaient le village étaient des Bédouins. Il y avait deux autres villages près de mon village : l’un s’appelait Majdal, à 2 kilomètres au sud, et l’autre Kenosar, à 3 kilomètres à l’est, près du lac. Les relations étaient bonnes avec les juifs du premier village. Le maire de Majdal et celui de mon village collaboraient pour résoudre les querelles ou les disputes de manière pacifique, alors qu’avec le second village, nous n’avions pas de contacts : il était « kepot », interdit pour un Arabe de s’y rendre.
Quand il n’y avait pas d’exclusive, il n’y avait pas de problèmes de cohabitation...
Tout à fait.
La Palestine était alors sous mandat britannique. Comment les troupes britanniques se comportaient-elles ?
Les troupes britanniques arrivaient sans prévenir dans le village pour chercher des armes ou poursuivre des partisans. Une fois, les soldats britanniques sont entrés dans notre maison pour s’emparer de mon père, ils l’ont torturé sauvagement. Trois jours après, il est mort à l’hôpital de Tibériade.
Comment t’es-tu engagé politiquement ?
J’ai pris conscience avec beaucoup d’admiration que ma famille pratiquait le même système que le socialisme : « Chacun donne son travail et chacun prend ce dont il a besoin. » C’est le communisme primitif. Je suis devenu socialiste et j’ai adhéré aux idées du marxisme-léninisme. J’ai gardé de mon enfance des souvenirs très intenses, mais il y a deux événements qui m’ont profondément marqué et qui ont eu, jusqu’à aujourd’hui, une influence considérable sur ma façon de voir les choses et sur mon caractère.
Le premier est lié au jour où nous avons été obligés de quitter la Palestine. C’est ce qu’on appelle la Nakba de 1948. J’avais douze ans et je ne connaissais pas les raisons politiques de cet événement. Mais je n’oublierai jamais les souffrances que nous avons endurées lorsque nous avons dû nous rendre au Liban. Nous avons marché avec des milliers d’autres Palestiniens, croisant d’autres groupes qui venaient de toutes les directions. C’était une terrible épreuve.
Le second souvenir m’ayant profondément marqué se rapporte à la situation intolérable qui nous était imposée dans le camp de Ein el-Hilweh. Un jour, nous étions en train de discuter, exprimant nos craintes, notre impatience et notre désespoir. Ma mère, comme elle le faisait tous les jours, est alors venue apporter le thé et a cité, avec son accent bédouin, un proverbe arabe, qui dit : « Le gouvernement arabe est responsable de la perte de la Palestine, il faut que vous la repreniez. » A partir de ce moment-là, j’ai décidé de lutter pour le droit au retour dans ma maison, au village de Khoueir Abu Shoushih, de m’engager et de respecter cette promesse pour ma mère.
Ma famille et mes proches vivent encore dans le camp de Ein el-Hilweh. 1964 a vu la création de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), et, dès le début, j’ai eu une responsabilité dans son bureau de Beyrouth. En 1967, j’ai participé à la fondation du Front populaire de libération de la Palestine. J’y ai occupé des fonctions de direction jusqu’en 1992. J’ai été élu à la direction de l’OLP en 1972. J’ai démissionné de certaines de mes fonctions à la suite des accords d’Oslo. Je suis membre du Conseil national palestinien depuis 1970. Je suis également président du Comité permanent des réfugiés et, depuis 1989, président de l’association d’amitié entre Cuba et la Palestine.
Tu as également joué un rôle important dans la reconstruction du mouvement syndical palestinien dans les années 1960.
J’ai participé avec d’autres syndicalistes à la reconstruction de la confédération syndicale palestinienne en 1964. J’ai été élu secrétaire de la section libanaise par le congrès de 1965. En 1969, j’ai rejoint le secrétariat général au Caire. J’ai quitté le mouvement syndical en 1972, parce que j’étais trop impliqué dans les activités politiques.
Tu vas participer à la conférence d’Alger. Qu’en attends-tu ?
Nous avons beaucoup de choses en commun avec les organisateurs de la conférence. Nous avons le même point de vue sur la cause palestinienne. Nous croyons que la méthode juste et correcte pour mettre fin au conflit sanglant du Moyen-Orient et à ces guerres interminables est la création d’un Etat démocratique et laïque en Palestine. Nous défendons le droit des réfugiés palestiniens à retourner sur leur terre, dans les villages et les villes où ils habitaient avant la Nakba de 1948. Nous essayons de prouver cela en paroles et en actions. Je suis maintenant membre d’un comité international qui prépare une conférence sur les migrations et les réfugiés devant se tenir à Quito, en Equateur. Ce serait très bien si une délégation de participants à la conférence d’Alger pouvait se rendre à la conférence de Quito pour établir des contacts avec des militants d’Amérique latine qui nous apportent leur soutien.
Source : Parti Ouvrier Indépendant