Shlomo Sand - Haaretz
Au cours des pourparlers qui se dérouleraient entre Israël et le premier ministre palestinien, Benjamin Netanyahu a demandé à son partenaire aux négociations de reconnaître Israël comme un État juif.
Soldat des troupes d’occupation israéliennes en transes, alors qu’il porte une torah, près de la clôture encerclant la bande de Gaza - Photo : AP/Tsafrir Abayov
On peut comprendre le premier ministre : cet homme observe si peu la tradition religieuse juive qu’il n’est pas certain de son identité juive, d’où son insécurité concernant l’identité de son État et la nécessité de la faire valider par ses voisins.
En Israël, cette dernière lubie jusqu’à récemment absente de la diplomatie israélienne, est beaucoup trop peu critiquée. Pendant des années, Israël s’est battu pour être reconnu par le monde arabe. Toutefois, en mars 2002, lorsque la Ligue arabe et le monde musulman ont abordé l’initiative saoudienne reconnaissant Israël dans ses frontières de 1967, une nouvelle menace est apparue : une paix qui peut fragmenter le caractère juif de l’État depuis l’intérieur et à juste titre.
L’accord est unanime sur la définition d’Israël comme un État juif, depuis le Yisrael Beiteinu jusqu’au Meretz, englobant les journalistes éclairés et les professeurs érudits . Mais cette notion ressemble de façon frappante avec celle qui définit l’Iran comme une république islamique ou les USA comme un pays chrétien. Il est vrai que certains évangélistes étasuniens croient que le caractère chrétien des USA est en danger et cherchent à le consolider dans la législation. Mais à l’instar du reste du monde éclairé,les USA se considèrent toujours comme appartenant à tous les citoyens, indépendamment de leur religion ou de leurs croyances.
La plupart des Israéliens rétorqueraient que le judaïsme et la judéité ne constituent pas une religion, mais un peuple, de sorte qu’Israël doit appartenir, non pas à tous ses citoyens, mais aux juifs du monde entier qui, comme le savons, préfèrent ne pas vivre ici.
Bizarre... je ne savais pas que vous pouviez faire partie d’un peuple uniquement en vous convertissant à sa religion sans prendre part à sa culture générale. Mais peut-être il y a-t-il une culture juive séculière que je ne connais pas ? Peut-être que Woody Allen, Philip Roth et d’autres maîtrisent secrètement l’hébreu, le cinéma, la littérature et le théâtre dans cette langue ? Pour moi, on n’appartient à un peuple que si on connaît le nom d’au moins une équipe de football d’une ligue locale.
Le problème est que l’entreprise sioniste, qui a créé un nouveau peuple ici, est loin d’être satisfaite de son oeuvre et préfère le considérer comme un bâtard. Elle préfère s’accrocher à l’idée d’un peuple/race juif profitant pour l’instant de son existence imaginaire. Souvenons-nous que ce n’est pas la forte solidarité entre chrétiens évangéliques, ni l’association entre membres de la foi bahaïe qui en font un peuple ou une nation.
Comme le savons, Rahm Emanuel appartient au peuple étasunien et Bernard Kouchner fait partie du peuple français. Mais si demain, les USA décidaient de se définir comme pays anglo-saxon plutôt que comme les USA, ou que la France cherchait à se faire reconnaître non pas en tant que que nation française, mais comme une république gallo-catholique, ces deux hommes devront émigrer en Israël.
Je suis certain que beaucoup d’entre nous le souhaiteraient. C’est encore une autre raison pour laquelle Israël insiste sur le fait qu’il est un État du peuple juif et non pas une démocratie israélienne.
Comme tous les non juifs parmi nous ne peuvent pas s’identifier à leur État, il ne leur reste donc plus qu’à s’identifier à l’Autorité palestinienne, au Hamas ou au film « Avatar » et à exiger peut-être demain que la Galilée, qui comme nous le savons n’a pas une majorité juive, devienne le Kosovo du Moyen-Orient.
1er octobre 2010 - Cet article peut être consulté ici :
http://www.haaretz.com/print-editio...
Traduction : Info-Palestine.net
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Traduction : Info-Palestine.net