C’est sans enthousiasme que les Palestiniens ont appris la nouvelle du retour de l’émissaire américain George Mitchell dans la région ce mardi pour des entretiens avec leur président, Mahmoud Abbass, concernant les négociations de proximité entre Palestiniens et Israéliens. Car, dans les territoires occupés et même dans les territoires autonomes, le processus de paix et la création d’un Etat palestinien, on n’y croit plus trop. Face à un gouvernement israélien qui crie haut et fort son intransigeance et qui laisse clairement entendre qu’il ne veut pas d’Etat palestinien, l’espoir de voir les négociations indirectes, entamées le 9 mai sous l’égide des Etats-Unis, aboutir à des progrès concrets visant à créer un Etat palestinien est bien mince. A peine commencées, les discussions ont achoppé sur le contentieux des colonies juives, Israël refusant de s’engager à un gel de la colonisation à Jérusalem-Est. C’est déjà tout dire.
Or, la colonisation est l’une des questions majeures à être résolue en vue d’un règlement définitif. Si l’on en juge ce simple point, on voit tout espoir se dissiper. Que dire alors des autres sujets hautement délicats comme Jérusalem, le droit de retour, ou encore les frontières ou l’eau ? Le tableau paraît sombre. Près de 19 ans après la Conférence de Madrid, qui s’est tenue en octobre 1991 et qui a mis sur les rails le processus de paix, les progrès réalisés sont minimes. Pire encore, l’enthousiasme d’alors s’est complètement dissipé. Et les faits, depuis cette date, ne font que confirmer le climat de pessimisme qui règne à l’heure actuelle. Depuis, ce sont des territoires en peau de léopard que les Palestiniens ont réussi à « libérer ». Des territoires sur lesquels ils n’ont qu’une autorité limitée et qui forme un ensemble désuni loin de ressembler à un véritable Etat souverain. Il suffit en outre de savoir que le dernier accord signé entre Palestiniens et Israéliens remonte à 1998, c’était l’Accord de Why Plantation, un accord qui, du reste, n’a jamais été mis en application et qui prévoyait de nouvelles évacuations israéliennes sur 13 % de la Cisjordanie.
Depuis cette date, c’est le blocage total. Les ambitions ne cessent d’être revues à la baisse au point d’arriver là où on en est : considérer que la tenue de négociations, même indirectes, est une avancée en soi.
Volonté d’unité
C’est donc sans grande illusion sur l’avenir du processus de paix que les Palestiniens ont d’ailleurs commémoré cette semaine la nakba, la catastrophe qui les a démunis de leur terre en 1948.
Aujourd’hui, s’ajoute à l’échec du processus de paix une autre catastrophe interne, celle de la désunion. Le Hamas et le Fatah ont consommé leur divorce en juin 2007, et depuis cette date, les multiples tentatives de réconciliation interpalestinienne ont échoué. La bande de Gaza demeure contrôlée par le Hamas, la Cisjordanie par le Fatah.
Pourtant, samedi dernier, à la date anniversaire de la nakba, les divers mouvements palestiniens ont affiché samedi leur volonté d’unité. A Gaza, près de 4 000 manifestants ont défilé depuis le Conseil Législatif Palestinien (CLP, Parlement) jusqu’à la représentation des Nations-Unies, à l’appel de l’ensemble des mouvements palestiniens, notamment le Fatah du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbass, et le mouvement islamiste Hamas. Les manifestants ont remis à l’Onu une lettre signée de tous les mouvements demandant au secrétaire général de l’organisation Ban Ki-moon « de s’activer le plus possible pour lever l’injustice contre le peuple palestinien », selon Zakaria Al-Agha, un haut responsable du Fatah. C’était aussi l’occasion d’évoquer la question des réfugiés. En commémorant la nakba, les deux mouvements ont tenté de mettre leurs désaccords de côté pour insister, entre autres, sur le droit de retour, un droit « sacré », selon Ismaïl Radouane, un dirigeant du Hamas. Aujourd’hui, l’Onu estime à quelque 4,7 millions le nombre de ces réfugiés avec leurs descendants. La Résolution 194 de l’Onu, adoptée le 11 décembre 1948 et renouvelée chaque année, stipule que « les réfugiés qui désirent rentrer dans leurs foyers et vivre en paix avec leurs voisins devraient y être autorisés le plus vite possible ». Une résolution parmi d’autres restées lettre morte en raison du refus israélien.
Abir Taleb