jeudi 13 août 2009

Les Affaires de l’Occupation

publié le mercredi 12 août 2009

MA’AN Development Center
Il y a plus de soixante ans, l’occupation israélienne a réussi à accaparer la terre palestinienne. Elle continue sur sa lancée en volant en plus les noms.

Introduction

Il y a plus de soixante ans, l’occupation israélienne a réussi à accaparer la terre palestinienne. Elle continue sur sa lancée en volant en plus les noms. Jaffa, par exemple, est utilisé comme un de ses labels sur le marché mondial.

Le nom israélien, est une marque coloniale florissante lancée sur le marché dans plus de 11 pays européens par Agrexco. Cette compagnie est le plus important distributeur de légumes, fruits et denrées alimentaires produits sur le sol palestinien volé et par le travail palestinien, lui aussi volé.

L’implantation des colonies agricoles dans les territoires occupés depuis 1967, l’annexion de plus de 300 villages pour la construction du mur de séparation et la fermeture de la bande de Gaza font partie de la politique israélienne pour avoir plus de contrôle sur les territoires palestiniens et pour exploiter les travailleurs vulnérables. Le gouvernement israélien soutient de grandes compagnies comme Agrexco en favorisant l’implantation de colonies illégales en Cisjordanie et en appliquant des mesures discriminatoires : frontières imposées entre les villes palestiniennes et contrôle total des frontières vers les marchés internationaux.

Agrexco tire profit de la politique de colonisation israélienne et récolte le fruit des implantations de colonies en Cisjordanie et à Jérusalem Est. En 2005, par exemple, le ministre israélien de l’agriculture a lancé un programme s’élevant à des millions de dollars pour augmenter le nombre de colons dans la vallée du Jourdain en créant de nouvelles colonies agricoles. En construisant ainsi plus de 51 colonies agricoles (moshav en Hébreu) et encore 27 colonies agricoles en coopérative en Cisjordanie, Israël intensifie contre les palestiniens ses attaques et sa violation des droits de l’homme et du droit international. Cela englobe la destruction des baraques où les fermiers et la population locale peuvent vendre et acheter les produits agricoles, la destruction des étables, la confiscation du sol empêchant les résidents d’accéder à leurs propres terres et le contrôle de tout mouvement par de nombreux check-points. Cependant les colons, eux, « apprécient » de vivre sur la terre fertile palestinienne et reçoivent des avantages et des primes comprenant 75% de réduction sur l’électricité et le transport. L’eau est confisquée aux Palestiniens et gratuite pour les colons israéliens.

A l’opposé, les Palestiniens de la vallée du Jourdain souffrent du harcèlement de 5.283 colons israéliens répartis en 36 colonies qui contrôlent les ressources d’eau et les terres fertiles. Ces villages là sont construits sur la terre palestinienne par le biais de sa confiscation. Par exemple, les forces israéliennes ont confisqué 1000 dunums de Tubas sur ordre militaire s’appuyant sur la loi des « propriétaires absents ». Les résidents de Al Aqaba n’ont le droit d’utiliser que 0,1% de leur terre ou 20 dunums. Les militaires israéliens ont également ordonné à plus de 120 personnes à Al Hadidiya de quitter leurs terres et ont interdit à Tamoun et aux villages avoisinants d’utiliser les puits d’eau prétendant qu’ils étaient sous le contrôle des colonies et des colons.

Avant 1967, les Palestiniens utilisaient l’eau du Jourdain grâce à 140 pompes qui ont été toutes confisquées ou détruites pendant et après cette guerre. De surcroit, Israël a saisi les vastes étendues irriguées de la vallée du Jourdain utilisées par les Palestiniens, les revendiquant comme « zones militaires ». Par la suite, elles ont été transmises aux colons israéliens.

Ce sont de petits exemples des constantes souffrances et de la violation des droits de l’homme que subissent les habitants de la Vallée du Jourdain.

Le contexte

Carmel-Agrexco est la marque nationale israélienne de produits frais qui exporte le label Carmel sur les fruits, légumes, agrumes, fleurs, poissons, viande. Cette année, le Label Carmel concerne 2 350.000 tonnes de produits frais et de fleurs exportées vers plus de 11 pays de la planète. Son chiffre d’affaire s’élève à plus de 580 millions de dollars U.S. 50% de la compagnie Agrexco appartiennent à l’Etat d’Israël, 25% sont représentés par les agriculteurs israéliens et 25% appartiennent à la coopérative Tnuva.

Agrexco « revendique » des produits issus d’une « production de valeur qui tient compte d’une responsabilité sociale » envers les consommateurs et les producteurs. Sa création date de 1956 et le label Carmel peut se trouver dans les supermarchés d’Europe, d’Amérique Latine, d’Amérique du Nord, du Japon, de Singapour et de Hong-Kong. Son quartier général est à Tel-Aviv et plus de 10 succursales sont actives à Londres, Francfort, Paris, Rotterdam, New York, Zurich, Vienne, Madrid et Milan.

Le but de Carmel est de travailler avec les meilleurs producteurs d’Israël « amoureux de la terre, au regard continuellement tourné vers l’avenir ». L’ironie est que la compagnie atteint son but en utilisant plus de 60 à 70% de la production agricole provenant des colonies situées sur les terres palestiniennes occupées, en particulier celles de la vallée du Jourdain. Cette production est exportée sous différentes appellations telles que Carmel, Carmel Bio Top (production bio), Jaffa Jordan Plains, Alesia et Coral.

La Grande Bretagne est l’un des plus importants débouchés pour Agrexco et représente 60% de ses exportations vers l’Europe. Ses produits que divers supermarchés européens ont en rayon souvent mentionnent à tort « made in Israël ». Cependant, Agrexco affirme que 90% de ses produits proviennent d’Israël, 5% des territoires occupés palestiniens (les colonies israéliennes de Cisjordanie) et 5% d’ailleurs. Les marchés Agrexco en Europe montent en flèche habituellement durant quelques fêtes internationales telle que la Saint-Valentin le 14 février. Cette occasion est une des plus fructueuses de l’année car Agrexco vend des tonnes de fleurs.

Coup de projecteur sur l’accord commercial entre Israël et l’Union européenne.

Un nouveau traité entre Israël et l’Union européenne est signé en novembre 1995, remplaçant celui de 1975. Il inclut des éléments supplémentaires pour resserrer les liens économiques et politiques. Le Ministre Israélien des Affaires Etrangères déclare que politiquement, ce traité appelle à « un dialogue régulier à différents niveaux, ministériel, haut-fonctionnaires, diplomates, pour le développement d’un partenariat durable et pour renforcer la compréhension mutuelle et la solidarité ».

Sur le plan économique, cet accord tend à étendre les paramètres de l’existence d’une zone franche d’échange en mettant à jour les règles d’origine, en les rendant plus flexibles et en simplifiant les conditions du marché. L’accord de l’Association Israël-Union européenne stipule également un nouvel élément touchant la libéralisation des services du marché des capitaux et le droit de monter des sociétés israéliennes au sein de l’Union européenne.

Dans cet accord commercial, Israël a été accepté comme un membre à part entière du programme de l’Union européenne de recherche et développement (R & D). Cet accord ade R & D permet à Israël de faire partie du comité R & D (sans le privilège du vote cependant). Ce programme offre avant tout une vaste couverture des activités de recherches commerciales ainsi qu’une recherche académique sur fonds publics. A présent, Israël est une des deux nations, avec la Suisse, à pouvoir prendre part aux projets de R & D sans faire partie de l’Union européenne. Israël est membre de Framework Programs (programme de structures) N° 4, 6,7 (FP4, FP6, FP7).

Cet accord permet également aux compagnies israéliennes de participer aux appels d’offre dans l’Union européenne.

Israël a également signé un premier protocole avec la European Investment Bank (EIB) dans les années 70 et a signé un protocole complémentaire en juin 2000. Cette banque a un accord de structure financière avec 12 pays méditerranéens participant au Processus de Barcelone , qui n’a pas de budget spécifique dans le domaine des infrastructures. En juin 2000, Israël a signé un accord de structure (Framework) avec la banque EIB qui lui accorde des prêts pour ses projets. Cet accord inclus les projets d’infrastructures et d’environnement. Un fait mérite d’être souligné, à savoir que E.I.B. a été fondé en 1958 pour des buts non lucratifs et ses ressources budgétaires proviennent des fonds monétaires des pays membres de l’Union européenne.

En l’an 2000, le parlement de l’Union européenne a voté la suspension de l’accord de l’Europe avec Israël à cause des manquements de ce pays envers les droits de l’homme. De même, à cause des continuelles violations des droits de l’homme par Israël, les membres du parlement européen ont voté en décembre 2008 contre la promotion ou le rehaussement de cet accord.

Les profits tirés de l’occupation par Agrexco

En mai 2005, la compagnie annonce qu’elle va exporter ses premières cargaisons de figues Carmel vers l’Europe. Ces grosses figues noires sont produites à Neot Hakikar, une colonie agricole bâtie sur les terres palestiniennes au sud de la Mer Morte et relevant de la juridiction du Conseil Régional de Tamar. La compagnie annonce également que les figues de Masha, un village palestinien dans la vallée du Jourdain, seront exportées vers divers pays, tels l’Italie, le Royaume Uni, la Russie, l’Extrême Orient et l’Afrique du Sud.

Ceci est un exemple mineur des violations par la compagnie des lois du marché international et de l’exploitation des terres des Palestiniens ainsi que de leur travail. Un bon nombre de Palestiniens qui ont perdu leurs terres, en raison de la construction du mur de séparation ou de l’expansion des colonies de Cisjordanie, sont actuellement employés par Agrexco Carmel dans des établissements d’emballage. Les établissements sont situés dans les colonies construites sur les terres palestiniennes confisquées aux communautés auxquelles appartiennent ces fermiers vulnérables. Les employés sont habituellement sous-payés, pas plus de 30 shekels par jour (5,4 €), n’ont aucune assurance-santé, ni payées pour congé-maladie ou congé. Les fermiers palestiniens n’ont aucun accès au marché international à cause des restrictions israéliennes sur les déplacements et de leur contrôle total des frontières. Ces fermiers sont obligés de travailler ou dans les établissements d’emballage ou dans les champs israéliens. Ils perçoivent des gages minimes qui ne leur permettent pas de subvenir aux besoins de leurs familles.

Israël a isolé les fermiers de la vallée du Jourdain des marchés arabes, les réduisant à être dépendant du marché israélien tant pour l’exportation que pour le commerce avec le marché local palestinien. En confisquant la terre et en rendant l’eau inaccessible, Israël a réduit les fermiers palestiniens à être des travailleurs mercenaires sous payés dans les colonies. Les Palestiniens récoltent les produits, les conditionnent et doivent lutter pour les faire passer aux check-points militaires israéliens pour 35 shekels israéliens par jour.

Tout à l’opposé, les colons de la vallée du Jourdain jouissent de privilèges exceptionnels accordés par le gouvernement israélien pour les encourager à occuper la terre et à se servir des ressources naturelles également. Le développement de l’agriculture dans les colonies comprend l’exemption d’impôts, une indemnité mensuelle pour chaque famille de colons vivant dans la vallée du Jourdain et 70 dunums autour de chaque maison pour des raisons de « sécurité ». Certaines de ces colonies (8 d’entre elles) ne comportent pas plus de 20 familles israéliennes jouissant de vastes domaines agricoles avec toutes les commodités : eau, électricité, sécurité et surtout l’accès aux marchés européens et internationaux. Leurs produits se trouvent en rayon dans divers supermarchés et épiceries en Europe, trompeusement étiquetés « produits d’Israël », rendant ainsi impossible l’identification précise de leur véritable provenance.

Agrexco est le 1er et le plus grand exportateur des produits des colonies israéliennes de Cisjordanie. Les informations montrent que 70% de ses exportations proviennent des territoires occupés palestiniens. Les produits frais, fruits et légumes, sont achetés et emballés dans les colonies, en particulier celles de la vallée du Jourdain. Cette compagnie exporte également vers l’Europe des produits frais de Gaza, tels les œillets, les tomates-cerises et les fraises. L’étiquetage de ces denrées « Produits de Cisjordanie » trompent les consommateurs et font fi de la différence entre oppresseurs et oppressés. La compagnie a également commencé à utiliser des formes d’étiquetages très subversifs en employant les termes « Produits d’Israël Vallée du Jourdain ». De cette manière, les consommateurs pensent acheter les produits des fermiers palestiniens alors qu’ils achètent en réalité les produits des colons. Une autre forme d’étiquetage concerne la production de dattes. Des supermarchés en Europe utilisent le label « Dattes de Cisjordanie » faisant ainsi croire aux consommateurs qu’ils soutiennent les fermiers palestiniens. Cet étiquetage n’indique pas si ces denrées importées proviennent des fermiers palestiniens ou de négociants israéliens. Cette compagnie, comme n’importe quelle autre compagnie israélienne en Europe continue à trouver le moyen de contourner l’étiquetage pour tromper le consommateur très porté sur l’origine des produits qu’il achète. Aussi, une campagne de grande envergure est-elle nécessaire en Europe de la part des citoyens pour empêcher les importations de produits des colonies israéliennes et de soutenir le « boycott des produits israéliens ».

De plus, les groupes internationaux de solidarité sont appelés à intensifier la prise de conscience des citoyens européens sur l’impact de l’achat des produits israéliens sur les fermiers palestiniens sans défense. Carmel Agrexco est approvisionné par les colonies de toute la Cisjordanie. Ro’i est l’un de ces grands villages de la vallée du Jourdain près de deux villages bédouins, Al-Hadidiya et Humsa. Humsa a été rasé deux fois en 2007, avec la destruction des maisons, des citernes d’eau et des étables. Cette destruction inhumaine a laissé 25 personnes sans abri sous un soleil de plomb et Al Hadidiya a fait face à des déplacements successifs depuis 2007 dont l’un de plus de 100 personnes en mai 2008. Les colons envisagent d’utiliser Al Hadidiya et Humsa pour l’expansion de leur entreprise agricole et la fourniture de denrées prévues pour être exportées par Agrexco. Cette compagnie a des réserves dans toutes les colonies de la vallée du Jourdain. Al Hadidiya et Humsa sont juste des exemples de la souffrance continuelle des fermiers palestiniens.

En janvier 2008, le Président de la région Languedoc Roussillon en France a annoncé l’implantation à Sète d’Agrexco promettant la création de 200 emplois et un plan d’investissement de plus de 200 millions d’euros pour les 10 prochaines années. Ceci indique que la France rejoint les autres pays qui acceptent les succursales de cette compagnie qui tire profit de la colonisation et de commercer avec elle. Aussi, des groupes internationaux de solidarité sont nécessaires pour accroître la sensibilisation des citoyens européens aux conséquences de l’achat de produits « made in Israël » en général et de la production d’Agrexco en particulier. Les citoyens européens doivent se rendre compte que l’achat de produits Carmel Agrexco apporte son soutien à cette compagnie et encourage le gouvernement israélien à confisquer de plus en plus de terres pour l’expansion des colonies agricoles dans la vallée du Jourdain. Acheter ces produits encourage la compagnie à exploiter davantage les ouvriers palestiniens qui travaillent dans les établissements d’emballage ou à la récolte des fleurs en leur refusant les droits de l’homme les plus élémentaires. Plus la compagnie est florissante, plus de balles et de bulldozers sont achetés par les militaires pour confisquer plus de terres, pour construire plus de villages de colons et raser les maisons palestiniennes de la vallée du Jourdain.

Fin Juin 2009

Par l’ONG palestinienne MA’AN Development Center traduit de l’anglais par MA.P., AFPS