Il
est de cette trempe d’artistes, peu nombreux, qui ne craignent pas de
troquer leur habit de lumière contre celui d’artistes maudits, Roger
Waters, le bassiste de légende des cultissimes Pink’s Floyd, porte son
attachement à la Palestine à la boutonnière et ne perd pas une occasion
de briser l’omerta qui muselle la saine critique d’Israël, mais aussi de
son plus généreux mécène, les Etats-Unis.
Dans sa diatribe intitulée "Pourquoi la perversité morale de la position des Etats-Unis à Gaza est stupéfiante",
son ode à l’enclave palestinienne a les accents de l’indignation contre
un génocide insoutenable qui a bénéficié, une fois de plus, une fois de
trop, de l’odieuse complicité de Washington. Face à l’horreur indicible
du massacre de masse des Gazaouis, Roger Waters a néanmoins trouvé une
source inestimable de jubilation : les liaisons dangereuses qui font des
Etats-Unis le premier partenaire et comparse des criminels de guerre
israéliens ont été exposées au grand jour comme jamais auparavant, quant
à l’argument imparable, "le droit d'Israël à se défendre", derrière
lequel Obama, comme Bush avant lui, s’est abrité pour cautionner
l’innommable, il n’est plus audible.
Ce véritable "mantra ad nauseam", tel que
le décrit Roger Waters dans un article qui fustige l’insupportable
duplicité américaine, ne tient effectivement plus, comme n’est plus
recevable l’accusation, facile et utile, d’antisémitisme pour clouer au
pilori tous ceux qui ont la cause palestinienne chevillée au corps. Il
faudra désormais entonner une autre antienne pour tenter de justifier
des exactions barbares injustifiables aux yeux d’un monde qui, lui, n’a
pas d’œillères opaques et ne s’en laisse pas ou plus conter par une
communauté internationale définitivement discréditée.
Voix de la vérité s’élevant au-dessus des
médias-mensonges, le membre fondateur des Pink’s Floyd est un grand
pourfendeur de l’insondable hypocrisie de la première puissance
mondiale : "Comment le gouvernement américain peut-il demander
à Israël de faire plus attention à la vie des civils et en même temps
armer, puis réarmer, l'armée israélienne afin qu'elle puisse plus
efficacement parachever son dessein mortifère dans Gaza ?", proteste-t-il en appuyant là où le bât blesse.
Et de poursuivre : "Les États-Unis pourraient
agir pour arrêter ces massacres insensés, mais ils se garderont bien de
le faire. Les membres du Congrès sont des perroquets stupides qui
répètent en les approuvant les points de vue israéliens, sans avoir une
seule pensée pour le point de vue palestinien ou pour la préservation de
la vie humaine. Débordant de justice, ils plaident pour qu’Israël
relâche la pression, notamment le sénateur Rand Paul,
tout en invoquant le droit d'Israël à l'auto-défense, et ce en oubliant
que, en tant que puissance occupante, Israël a l'obligation de protéger
les Palestiniens qu'il gouverne, et non de les exterminer."
Roger Waters enfonce le clou en critiquant ces
parlementaires du Congrès peu téméraires, qui ne se hasardent pas à se
décentrer de leurs univers de référence et de leur petit confort : "Des
leaders du congrès se demandent-ils parfois ce qu'ils feraient s'ils
étaient nés Palestiniens, si leurs maisons et biens étaient spoliés,
s’ils étaient contraints de vivre privés de liberté sous une occupation
israélienne illégale pendant 47 ans ? Savent-ils ce que signifie
l’euphémisme israélien guerrier et barbare « tondre la pelouse à Gaza »?
Aucune condamnation ne sort d’aucune bouche pour défendre les droits
bafoués des Palestiniens qui sont roués de coups, périssent sous la
pluie d’obus ou sont tués par balle par l'armée la plus puissante de la
région. Je me demande ce que feraient les Américains s’ils étaient
envahis par leurs proches voisins et placés sous leur joug ? Je pense
que l’on peut affirmer sans risque de se tromper qu’ils ne le
toléreraient pas", assène-t-il à juste titre.
"En dépit de ces réalités irréfutables, il est
bien plus avantageux à Washington de vilipender les Palestiniens et de
clamer qu’ils sont les seuls responsables de leurs souffrances. Il faut
dire qu’accuser le peuple palestinien de tous les maux, applaudir les
crimes de guerre, l’occupation et la colonisation illégales n’ont jamais
nui à la carrière d’un quelconque politicien, bien au contraire", a
conclu le très lucide Roger Waters, épris de vérité, de justice et de
liberté pour Gaza et l’ensemble de la Palestine. La Palestine,
assujettie à une domination israélienne cruelle, illégale, et
interminable, qui a le triste privilège d'être entrée dans les annales
de l’histoire contemporaine en sa qualité de victime de la plus longue
occupation d’un territoire.