Fadi Abu-Saada - Al-Akhbar
A la date anniversaire de la mort de Yasser Arafat, il y a sept
ans, de nombreux Palestiniens se demandent comment l’ancien dirigeant
de l’OLP aurait répondu aux défis auxquels le peuple palestinien est
confronté aujourd’hui.
Un Palestinien brandit un portrait
du défunt dirigeant palestinien, Yasser Arafat, pendant une cérémonie
marquant le septième anniversaire de sa mort, à Hébron, Cisjordanie, le
13 novembre 2011.
(Photo : Reuters - Mussa Qawasma)
Ramallah. Le 7è anniversaire de la mort d’Arafat
survient à un moment critique pour les Palestiniens. Beaucoup attendent
avec impatience le verdict du Conseil de sécurité des Nations-Unies sur
leur candidature pour un État et se demandent ce que l’Autorité
palestinienne fera en cas d’échec. Ils imaginent leur regretté dirigeant
parmi eux dans ces moments difficiles et spéculent sur qu’il aurait
fait.
Tout en convenant tous que la situation actuelle aurait
été différente du vivant d’Arafat, certains pensent qu’il aurait traité
la situation d’une manière similaire à Mahmoud Abbas, mais dans un style
et une approche différents. Mais d’autres disent qu’il aurait eu
recours à des mesures plus draconiennes.
Aoudat Nasser, de Bethléhem, pense que compte tenu de
l’habileté diplomatique d’Arafat, les Palestiniens se trouveraient dans
une situation meilleure, au moins politiquement. Selon Nasser, Israël
savait à quel point Abu Ammar - nom sous lequel Arafat était connu -
était respecté. Tout le monde accordait un poids énorme à ses paroles,
et il avait un impact retentissant, même sur ses ennemis.
« S’il disait de se soulever, en vérité, il y avait un soulèvement » affirme Nasser. « Israël
a le plus profité de la mort d’Arafat. Sur le plan intérieur, s’il
avait survécu, il n’y aurait pas eu cette division entre le Hamas et le
Fatah.
De Ramallah, un journaliste palestinien, Mohammed Hawwash, décrit Arafat comme un maître en théâtre politique. « De taupinières, il faisait des montagnes »
dit-il, mais les circonstances de la cause palestinienne aujourd’hui
sont plus complexes qu’elles ne l’étaient du temps d’Arafat.
Pour autant, Hawwash pense qu’Arafat aurait obtenu plus de la campagne actuelle. « Il
aurait fait ce que le président Abbas fait aujourd’hui, mais à une plus
grande échelle. La reconnaissance de la Palestine comme État membre des
Nations-Unies aurait été une cause politique et nationale pour Arafat ;
il en aurait fait un festival ambulant permanent, » dit-il.
Haytham Yakhlef, également de Ramallah, nous rappelle ce que les analystes ont déclaré précédemment. « Il est impossible pour tout dirigeant palestinien d’accepter ce que Yasser Arafat a refusé » dit-il, ajoutant, « Certes,
il aurait été en faveur de la candidature à l’ONU ; mais s’il vivait
aujourd’hui, il n’y aurait ni débat ni division sur ce point. Arafat
était un homme qui tenait fermement à ses convictions et décisions. »
Pour l’analyste palestinien Ramzi Khoury, la décision de
l’Autorité palestinienne de ne pas s’engager dans des négociations avec
Israël, en dépit des pressions et menaces internationales, ne contredit
pas le mode de fonctionnement d’Arafat. « Il est vrai
que les Palestiniens sont le côté faible, militairement, mais ils
possèdent une arme bien plus forte : leur légitimité est reconnue par la
plupart des pays » dit Khoury.
Le directeur du centre Masar, Nouhad Abu Gosh, rappelle
que les caractéristiques les plus marquantes du défunt président Yasser
Arafat étaient, « ses convictions inébranlables, mises en principe, et son approche hautement pragmatique dans la défense de ce en quoi il croyait », notant qu’« il
était capable de créer une harmonie apparemment impossible entre les
contradictions, et qu’il utilisait à son avantage. Arafat était avisé
dans les négociations formelles et informelles, tout en menant
secrètement une action armée en marge. »
Pour Abu Gosh, il manque à la cause palestinienne l’un
de ses aspects les plus importants, l’unité nationale, ce qui fait
obstacle à toute réussite réelle. « Arafat ne se serait
pas engagé dans des batailles majeures sans avoir réglé d’abord les
questions internes. Il aurait fait l’impossible pour réaliser l’unité
nationale, même au prix ce concessions cruciales » dit-il.
« Yasser Arafat vit toujours en nous »
déclare Kamal Khalil, président du Conseil américano-palestinien. Mais
il a été confronté à beaucoup trop d’obstacles pour pouvoir les
surmonter à lui seul, dit Khalil. « Quand Arafat est
revenu en Palestine après les Accords d’Oslo, ses méthodes avaient
changé par rapport à la période de la vallée du Jourdain et du Sud Liban » dit Khalil.
Et d’ajouter que si Arafat était toujours là, il aurait lancé le slogan, « La résistance, le peuple et l’État », le même que celui du Hezbollah au Liban, mais bien sûr, avec les nuances prenant en compte la différence des circonstances.
Le militant George Rishmawi pense, lui, que les
Palestiniens ont dépassé le point de non-retour. Vu les circonstances
actuelles, dit-il, « aucun dirigeant ne peut faire quoi que ce soit d’important, même si c’était Arafat lui-même ».
Suleiman Abu Audeh, de Ramallah, est certain qu’Arafat
n’aurait pas attendu que la lutte palestinienne soit dans une telle
impasse. « Il aurait fait appel à l’opinion publique,
directement, comme il l’a fait en 2000 avec le déclenchement de la
Deuxième Intifada. Si Abu Ammar était parmi nous, la situation aurait
été en notre faveur à plusieurs niveaux » dit Audeh
* Fadi Abu-Saada est reporter en Cisjordanie, Palestine, pour le journal libanais Al-Akhbar (Beyrouth).
Ramallah, le 13 novembre 2011 - Al-Akhbar - Article traduit de l’édition arabe - traduction de l’anglais : JPP