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23/10/2009 Dans son logis chichement meublé d'un village proche de Ramallah, en Cisjordanie, Naama Asi brode des robes pour ses sœurs palestiniennes de la diaspora, des robes qui rapportent des centaines de dollars. A 48 ans, elle peut ainsi soutenir son père âgé et son frère handicapé, tout en préservant une tradition artisanale qui remonte à des générations et relie les exilés palestiniens à leur terre. "En faisant de la broderie, j'ai le sentiment que les femmes peuvent restaurer notre héritage et le sauver de la disparition", plaide-t-elle, ses doigts déformés enfilant avec dextérité une aiguille dans le tissu. Mme Asi, qui exerce son art depuis plus de 20 ans, enseigne à présent la broderie aux jeunes femmes d'une coopérative de la ville d'Al-Bireh, près de Ramallah. Ces dernières années, les Palestiniennes de Cisjordanie se sont mises à la broderie traditionnelle pour faire vivre leurs familles, les maris ayant du mal à trouver un travail stable. Une robe brodée à la main se vend de 1.200 à 1.500 dollars sur le marché international. Les brodeuses perçoivent environ 300 dollars pour ce travail qui requiert un à deux mois d'efforts, selon des statistiques de la coopérative d'Al-Bireh, qui compte environ 2.500 employées. "La broderie a permis aux femmes palestiniennes de trouver une source de revenus, d'autant plus nécessaire que les hommes ne peuvent pas travailler à cause des bouclages israéliens", explique Farida al-Amed, la directrice de la coopérative. Depuis la deuxième Intifada (soulèvement) de 2000-2004, Israël limite strictement les mouvements des Palestiniens en Cisjordanie et a réduit le nombre des permis de travail sur son territoire pour des raisons de sécurité. Pour la directrice, la broderie est non seulement une source de revenus mais aussi un moyen d'exprimer leur créativité pour des femmes vivant souvent dans des villages déshérités ou des camps de réfugiés. "Les femmes ont aussi choisi ce genre d'activité parce qu'elles peuvent travaillez chez elles", ajoute Mme al-Amed. La coopérative fournit surtout la diaspora palestinienne. Ainsi, un de ses récents clients est le propriétaire d'un restaurant aux Etats-Unis qui a commandé une série d'uniformes brodés pour son personnel. La broderie traditionnelle palestinienne est également populaire auprès des étrangers installés en Cisjordanie. Rija Ghazawna, une brodeuse de 40 ans, a récemment réalisé le logo d'une firme japonaise implantée à Ramallah. Commerçant à Ramallah, Suhail Shamaa, 40 ans, s'est spécialisé dans la vente des broderies locales qu'il achète dans les villages des alentours. "Les femmes aiment beaucoup cet artisanat, essentiellement parce qu'elles passent beaucoup de temps à la maison et que leurs loisirs sont limités", souligne-t-il. A l'intérieur de sa boutique, sont exposées des broderies reproduisant des des versets de la Bible ou des sourates du Coran. "Un des éléments caractéristiques de la broderie palestinienne, c'est qu'elle répond à la fois aux goûts des musulmans et des chrétiens de Palestine. En celà, elle est un symbole de notre culture", note-t-il. Mais depuis quelques années l'artisanat fait main subit la vive concurrence de la broderie mécanique ou des tissus bon marché importés de Chine. "Pourtant, cela n'a strictement rien à voir. Ce que l'on brode à la main est infiniment plus beau que ce qui est produit à la machine", assure Mme Asi avec véhémence.
Par Hossam EZZEDINE (AFP) http://www.almanar.com.lb/NewsSite/NewsDetails.aspx?id=108201&language=fr |