Chérif Ahmed
La paix dans la région et le règlement du conflit israélo-palestinien ont été des questions-clefs de cette visite du président Hosni Moubarak aux Etats-Unis. L’arrivée au pouvoir du président Obama a totalement changé la donne en ce qui a trait à la politique américaine dans la région. Pour la première fois, les Américains ont pris une attitude ferme à l’égard d’Israël en demandant à l’Etat hébreu de geler la colonisation. Le Caire perçoit depuis quelques mois un rapprochement des idées avec Washington concernant le problème palestinien. Les responsables égyptiens souhaitent donc saisir la balle au bond et mettre à profit ces évolutions positives et le climat favorable à une reprise des négociations afin de ramener Israéliens et Palestiniens à la table des négociations.
Le président américain Barack Obama a récemment envoyé 4 des plus hauts responsables de son administration en Egypte et en Israël, à savoir George Mitchell, son envoyé spécial pour le Proche-Orient, Robert Gates, son secrétaire d’Etat à la Défense, James Jones, son conseiller national à la Sécurité et Dennis Ross, son conseiller spécial pour le Proche-Orient. L’objectif est de relancer le processus de paix au Moyen-Orient, une des priorités de l’administration Obama. Depuis le discours que le président Obama a prononcé le 4 juin dernier au Caire, dans lequel il a appelé à un gel total des colonies israéliennes en Cisjordanie, l’axe Tel-Aviv-Washington a commencé à grincer. Les observateurs à Washington affirment qu’une tension existe actuellement entre Israël et les Etats-Unis. Et que les colonies israéliennes dans les territoires palestiniens constituent la principale pierre d’achoppement actuelle. « L’administration Obama est la seule à avoir insisté sur la nécessité d’un gel des colonies. Les administrations américaines précédentes considéraient que les colonies n’étaient que des obstacles devant le processus de paix. (…) Elles ont même utilisé le droit de veto à deux reprises contre des résolutions qui condamnent les colonies juives », note le porte-parole de la présidence de la République, Soliman Awad. Et d’expliquer que l’Egypte doit saisir cette opportunité pour tenter de relancer la paix.
Même son de cloche pour John Marechal, politologue spécialiste du Proche-Orient. Pour lui, l’appel au gel de la colonisation par le président Obama est un facteur qui doit être pris en considération dans la politique américaine. « On ne peut pas négliger ce changement important de la politique américaine sous l’administration Obama. Je pense que cela va mener à d’autres étapes en faveur de la cause palestinienne », explique-t-il. Et d’ajouter que c’est une occasion pour l’Egypte de renforcer la position des Palestiniens face aux Israéliens devant l’opinion publique américaine. C’est ce que le président Moubarak a tenté de faire tout au long de sa visite à Washington. Il existe pourtant quelques points de divergences notamment au sujet de la normalisation.
Sujet de discorde : la normalisation
L’administration souhaite en effet des efforts plus accrus des pays arabes dans le sens d’une normalisation avec Israël. A Washington, Moubarak a expliqué le point de vue des pays arabes et leurs difficultés à accepter la normalisation. « Le Caire a informé Washington de son refus des idées américaines sur la normalisation. Je ne pense pas que ces idées verront le jour », a déclaré à l’Hebdo Soliman Awad. Et d’ajouter : « Nous avons relevé que l’initiative de paix arabe prise en 2002 a établi des conditions claires à toute normalisation avec Israël. Elle doit intervenir après la paix et non pas avant ».
Toutefois, Obama attend des pays arabes des « gestes importants » pour la normalisation de leurs relations avec Israël. Washington souhaite que les dirigeants arabes se rendent à Jérusalem et que des dirigeants israéliens soient reçus dans des capitales arabes. Les responsables américains sont d’avis que les pays arabes doivent ouvrir des représentations d’intérêts en Israël et développer leurs relations commerciales avec l’Etat hébreu. Et le président Obama a envoyé des messages à plusieurs pays arabes, dont l’Egypte, dans lesquels il exige, en échange de l’arrêt des constructions de colonies, qu’ils soutiennent des mesures aptes à construire la confiance vis-à-vis d’Israël. Mais les pays arabes craignent qu’en normalisant avec Israël, ils aient gâché l’une des cartes maîtresses qu’ils possèdent pour faire pression sur lui. C’est ce que le président Moubarak a tenté d’expliquer aux responsables à Washington. « Il se pourrait que certains pays arabes prennent des mesures en faveur d’une normalisation avec Israël en guise de bonne volonté. Pourtant, nous pensons que c’est à Tel-Aviv de commencer par montrer sa bonne volonté », affirme à l’Hebdo Soliman Awad.
publié par al-Ahram hebdo en français