Par Ramona Wadi
La décision tardive de recourir aux institutions internationales (1) a
été saluée comme une surprise par les médias, qui ont signalé un
changement radical de la soumission à l'indépendance. Le Président de
l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas est donc maintenant partiellement
revenu sur sa décision préalable de renoncer à adhérer à des traités
internationaux comme condition préalable au début des manœuvres
diplomatiques lancées par les Etats-Unis.
John Kerry et Mahmoud Abbas (photo Jim Young/AFP)
Toutefois, les discussions ne sont pas officiellement rompues et tandis
que la décision pourrait potentiellement élever le statut des
Palestiniens au sein des organisations internationales, c'est loin
d'être une démarche surprenante de la part d'Abbas.
L'Observateur permanent de la Palestine aux
Nations-Unies, Riyad Mansour, a régulièrement évoqué l'intention de
demander à adhérer aux traités internationaux et il n'y a pas lieu de
célébrer la dernière déclaration comme une victoire ou une défaite. Le
fait que Abbas donne la priorité aux négociations sur l'autonomie donne à
la décision une impression de dernier recours qui, bien qu'elle ait été
saluée comme une initiative positive, porte encore les stigmates de
l'injustice infligée aux Palestiniens au cours de ces derniers mois,
pendant lesquels le gouvernement de Netanyahu a saisi toutes les
occasions pour étendre le projet colonial de peuplement.
Pour les Palestiniens, l'avantage le plus important réside dans la
possibilité d'utiliser la plateforme des Nations-Unies pour transmettre
leurs exigences sans avoir à se livrer à une exhibition de mendicité
implorante. La légalité et la légitimité sont déterminées, au plan
international, par les interprétations impérialistes du droit
international, dont l'ONU est un complice volontaire. Idéaliser la
liberté selon le discours a donné lieu à une persécution résolue des
Etats rebelles qui est ensuite justifiée dans les interprétations du
droit international, qui cherche à transformer l'oppression en valeur
humanitaire. La Palestine ne fait pas exception à cette
règle. Malgré des décennies de violence coloniale, l'ONU a résolument
donné son soutien à l'abomination qu'elle a reconnue sous la forme de
l'Etat d'Israël, suite aux atrocités de la Nakba.
Négocier une position digne et résolue dans ce réseau complexe requiert
l'unité entre les dirigeants et le peuple - une unité que l'AP a maintes
fois fragmenté dans sa quête d'apaiser Israël et les
Etats-Unis. Jusqu'à présent, la décision récente reflète aussi une
désintégration de la loyauté : les négociations ont été priorisées au
détriment des Palestiniens et les demandes d'adhésion aux traités
internationaux sont toujours entravées dans la pratique par le niveau de
collaboration sécuritaire entre l'AP et Israël.
Conforme à la rhétorique internationalement acceptée, Abbas persiste à
réfuter la confrontation par la résistance, bien que la résistance soit
une composante nécessaire des vies des Palestiniens menacées par la
violence coloniale. Pendant ce temps, le Hamas maintient ses appels à la
résistance légitime comme un impératif.
La volonté d'adhérer aux traités, avec la possibilité de recourir à la
Cour pénale internationale à l'avenir et de tenter ainsi de faire
reconnaître la responsabilité d'Israël dans la
commission de crimes de guerre n'est pas sans conséquence pour la
direction palestinienne internationalement reconnue et le peuple qu'elle
prétend représenter. La complicité internationale dans la promotion de
crimes de guerre contre des nations résistantes est une récurrence
historique qui parvient à recruter des complices dociles.
Dans le cas de la Palestine, la violence israélienne a
été réaffirmée comme nécessaire pour sauvegarder l'Etat colonial contre
une possible destruction. En l'absence d'une déclaration sur le
démantèlement de la colonisation de la Palestine par Israël,
les traités internationaux seront manipulés pour obliger davantage les
Palestiniens à accepter des reliques et des symboles comme signes de
liberté, en échange de l'abandon de la libération de la terre et de la
population de l'oppression coloniale.
Le devoir d'Abbas envers les Palestiniens ne doit pas être circonscrit à l'époque contemporaine. Négliger la violence sioniste préméditée pour permettre l'établissement d'Israël revient à de la trahison.
Source : Middle East Monitor
Traduction : MR pour ISM
http://www.ism-france.org
http://www.ism-france.org