Crispian Balmer, Reuters
Parmi  les dirigeants palestiniens interrogés cette semaine en Cisjordanie,  c’est la déception et le pessimisme qui prévalent, notamment sur la  capacité de Washington à faire avancer les choses.
Les négociations  israélo-palestiniennes sont dans l’impasse et ce blocage, s’il se  poursuit, ne peut que ternir l’image du président Mahmoud Abbas et des  modérés palestiniens aux yeux de leur propre population.
Relancées le 2 septembre à Washington, les discussions  directes ont été suspendues moins de quatre semaines plus tard, Israël  ayant refusé de prolonger un moratoire de dix mois sur les nouvelles  constructions dans les colonies juives de Cisjordanie, comme le  réclamaient les Palestiniens.
Parmi les dirigeants palestiniens interrogés cette  semaine en Cisjordanie, c’est la déception et le pessimisme qui  prévalent, notamment sur la capacité de Washington à faire avancer les  choses.
"Si les Etats-Unis n’arrivent pas à obtenir (d’Israël)  un nouveau gel des constructions dans les colonies, même de courte  durée, comment peuvent-ils nous aider à régler les gros problèmes ?",  s’interroge Yasser Abed Rabbo, membre de l’équipe de négociateurs  palestiniens [1].
"Nous avons aujourd’hui l’équipe dirigeante la plus  modérée de toute l’histoire du mouvement palestinien (...) C’est la foi  dans le processus de paix qui guide notre stratégie. Si nous échouons,  nous tomberons", ajoute-t-il, faisant allusion aux pressions de groupes  comme le mouvement islamiste Hamas qui contrôle la bande de Gaza depuis  juin 2007.
"DIRECTION PALESTINIENNE MODÉRÉE"
Les Palestiniens rappellent qu’ils avaient averti, dès  la reprise des discussions le mois dernier, qu’ils rompraient les  pourparlers si Israël ne prorogeait pas son moratoire sur les colonies  qui arrivait à expiration le 26 septembre.
"Les Américains nous avaient même dit en privé que les  constructions dans les colonies ne reprendraient pas pendant la durée  des négociations", dit un responsable palestinien qui requiert  l’anonymat.
Les autorités américaines n’ont pas révélé les détails  des discussions du mois dernier mais des diplomates ont confirmé que  Washington avait fait aux Israéliens plusieurs propositions, notamment  en matière de sécurité, afin de les convaincre de prolonger de deux mois  le moratoire.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a fait  savoir qu’il étudiait ces propositions mais, selon des sources  informées, il les jugerait encore insuffisantes.
Pour les Palestiniens, les Américains devraient  intensifier leurs pressions sur Israël au lieu de lui proposer de  nouveaux "cadeaux".
"Encore une fois, ils (les Américains) promettent toutes  sortes de chose à Israël en échange de tout petits pas, d’avancées  minuscules", déplore Hanane Achraoui, membre éminente du comité exécutif  de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP).
"Ils (les Américains) sont en train de détruire la  direction palestinienne la plus modérée de l’histoire pour sauver le  gouvernement israélien le plus dur, le plus à droite, le plus  extrémiste", ajoute-t-elle.
RECOURS À L’ONU ?
Pour Benjamin Netanyahu, les discussions directes  doivent se poursuivre sans aucune condition côté palestinien. Il  rappelle d’ailleurs que les précédentes sessions de négociations  s’étaient tenues sans aucun préalable.
L’Autorité palestinienne pense avoir convaincu une grande partie de la communauté internationale du bien-fondé de ses positions.
Si les discussions ne peuvent finalement reprendre,  certains suggèrent de se tourner vers les Nations unies afin que  celles-ci reconnaissent une Palestine indépendante, avec ou sans le  consentement d’Israël.
"Presque tout le monde est d’accord pour dire que la  solution à deux Etats est le moyen d’aller de l’avant. Mais si la  réalité en Israël la rend impossible, pourquoi donc nous considérer  comme des otages du bon vouloir des Israéliens ?", se demande le  porte-parole de l’Autorité palestinienne, Ghassan Khatib.
Israël a mis en garde les Palestiniens contre la  tentation de se tourner directement vers l’Onu, où, quoi qu’il soit,  toute décision dépendrait de l’accord des Etats-Unis.
Plusieurs responsables palestiniens s’interrogent sur  l’utilité de continuer à mener des discussions entre des interlocuteurs  aussi inégaux.
"Il est temps que quelqu’un impose une solution et dise à  Israël de mettre fin à l’occupation", dit Mohammad Chtayyeh, l’un des  dirigeants du Fatah de Mahmoud Abbas et membre de l’équipe des  négociateurs palestiniens.
"Si Washington n’est pas en mesure de faire pression sur  Israël, alors la dynamique doit changer", ajoute-t-il, soulignant que  la population palestinienne est vraiment fatiguée de tant d’années  d’échecs et de déceptions.
"Les gens sont écoeurés. Ils aimeraient voir la lumière au bout du tunnel, mais c’est un tunnel qui n’en finit pas..."
Avec Tom Perry, Mohammed Assadi et Ali Saouafta, Guy Kerivel pour le service français