Comité palestinien de coordination des luttes populaires
          Si j’éprouve des remords au fond de mon coeur, c’est pour de ne  pas avoir joué un rôle prédominant dans cette journée de protestation,  et ne pas avoir accompli pleinement mon devoir qui est de faire tout ce  qui est en mon pouvoir pour changer la situation insupportable des  habitants de Gaza, et pour aider à mettre fin au contrôle israélien sur  les Palestiniens.         
Jonathan Pollak, Israélien, coordinateur au Comité  palestinien de coordination des luttes populaires, et l’un des  fondateurs des Anarchistes contre le Mur, a été condamné à trois mois d’emprisonnement ce matin par le tribunal de police de Tel Aviv  pour avoir participé à un défilé cycliste en 2008 protestant contre le  siège de la bande de Gaza. Il commencera à purger sa peine le 11  janvier.
Le juge du tribunal de police de Tel Aviv,  Yitzhak Yitzhak, a déclaré Pollak coupable de rassemblement illégal par  sa participation en janvier 2008 à un défilé cycliste de protestation  contre le siège de la bande de Gaza et l’a condamné à trois mois de  prison, peine qui commencera à courir le 11 janvier 2011. Pollak a été  le seul interpellé lors de cette manifestation, accusé d’avoir fait rien  de plus que circuler à vélo, exactement comme les autres manifestants.  Cette condamnation a réactivé une ancienne condamnation de trois mois  avec sursis, infligée à Pollak lors d’un procès antérieur pour avoir  manifesté contre la clôture de séparation. Une nouvelle peine de trois  mois est donc infligée aujourd’hui, et il y aura confusion des peines.
Sur sa condamnation, Pollak avance ses arguments : « Je  suis incapable d’éprouver des remords dans ce dossier (...). Si Votre  Honneur décide de poursuivre et de me faire exécuter ma peine de prison  avec sursis, j’irai en prison volontiers, et la tête haute. C’est le  système judiciaire lui-même qui, je crois, devrait baisser les yeux face  aux souffrances infligées aux habitants de Gaza, tout comme il baisse  les yeux et détourne son regard, jour après jour, quand il est confronté  aux réalités de l’occupation. »
Le 31 janvier 2008, quelque 30 manifestants organisaient un défilé cycliste à travers les rues de Tel Aviv  pour protester contre le siège de la bande de Gaza. Lors de la  manifestation, Pollak a été arrêté par des policiers en civil qui l’ont  reconnu suite à de précédentes manifestations et aussi parce qu’ils ont  supposé qu’il était l’organisateur et la figure de proue de  l’initiative. La manifestation a pu se poursuivre tranquillement après  l’arrestation de Pollak et s’est terminée sans autre problème ni interpellation.
L’arrestation et l’inculpation qui ont suivi semblent  être le résultat plus d’un esprit de vengeance de la part de la police  que du comportement de Pollak au moment de la manifestation ; Pollak  était un manifestant parmi d’autres manifestants qui se comportaient  exactement comme lui, or il a été le seul à faire l’objet d’une  arrestation. En outre, des manifestations sur les questions de  l’environnement se déroulent régulièrement à Tel Aviv sans qu’elles ne  suscitent jamais de telles réactions. D’autres manifestations qui  occasionnaient autrement plus de gênes sérieuses à la circulation (par  exemple, cette manifestation motorisée où il y avait des milliers de  motards) n’ont conduit à aucune arrestation, et encore moins à un procès  avec accusation pénale et emprisonnement.
Maître Gaby Lasky, avocate de Pollak : « La  police n’a pas fait que distinguer Pollak parmi toute une masse de gens  qui agissaient exactement comme lui, elle l’a choisi surtout dans toute  la manifestation pour la seule et unique raison de son alignement  politique. Des initiatives similaires ont lieu régulièrement à Tel Aviv sans qu’il n’y ait intervention de la police, à plus forte raison arrestation et mise en accusation. »
(Sur les faits, voir aussi : Un militant israélien emprisonné pour avoir protesté contre le blocus de Gaza - Ana Carbajosa - The Guardian) 
Plaidoirie de Pollak, déclaré coupable, avant sa condamnation
Plaidoirie de Pollak, déclaré coupable, avant sa condamnation
Votre Honneur, une fois déclaré coupable, il est  coutumier que l’accusé demande la clémence du tribunal et manifeste des  remords pour avoir commis une infraction. Pourtant, je me sens incapable  d’agir ainsi. Depuis le tout début de ce procès, il n’y a pratiquement  aucun désaccord sur la réalité des faits. Comme l’indique l’acte  d’accusation, je roulais effectivement à bicyclette, avec les autres, dans les rues de Tel Aviv, pour protester contre le siège de Gaza. Et effectivement, en circulant à vélo, les vélos étant des moyens de locomotion que la loi autorise dans les rues, nous avons  pu quelque peu ralentir la circulation. Le seul et léger désaccord dans  tout ce dossier tourne autour des témoignages des enquêteurs de la  police qui prétendent que j’aurais joué un rôle prépondérant tout au  long de ce défilé cycliste de protestation, ce que, à l’instar des  autres témoins de la défense, je récuse totalement.
Comme je l’ai dit précédemment, il est de coutume à ce  stade de la procédure d’exprimer des remords, et en effet, j’aimerais  faire part de regrets, concernant un aspect particulier des évènements  de cette journée : si j’éprouve des remords au fond de mon coeur, c’est,  comme je l’ai avancé pendant le procès, pour de ne pas avoir joué un  rôle prédominant dans cette journée de protestation, et pour ne pas  avoir accompli pleinement mon devoir qui est de faire tout ce qui est en  mon pouvoir pour changer la situation insupportable des habitants de  Gaza, et pour aider à mettre fin au contrôle israélien sur les  Palestiniens.
Votre Honneur a déclaré pendant le procès, et très  probablement qu’elle le déclarera d’autres fois à l’avenir, qu’un procès  n’est pas une question de politique, mais de droit. A cela, je réponds qu’il n’y a quasiment rien dans ce dossier, « excepté » un désaccord politique. Il se pourrait que ce tribunal m’ait  empêché de construire une défense appropriée en refusant d’entendre mes  arguments sur la sélectivité politique dans la conduite de la police,  mais, rien qu’à regarder les témoignages reçus, il apparaît clairement  qu’une telle sélectivité existe.
 Le sujet de mon présumé délit, tout comme les  motivations qui se cachent derrière, est politique. C’est quelque chose  qu’il n’est pas possible d’écarter. L’État d’Israël maintient un siège  illégitime, inhumain et illégal sur la bande de Gaza qui est toujours un  territoire occupé au regard du droit international. Ce siège, imposé en  mon nom et aussi dans le vôtre, Monsieur, en réalité dans notre nom à  tous, est une punition collective cruelle infligée à des citoyens  ordinaires, les habitants de la bande de Gaza, des sujets sans droits, sous l’occupation israélienne.
Face à cette réalité, et en opposition à cela, nous avons  choisi, le 31 janvier 2008, d’exercer la liberté d’expression reconnue  aux citoyens juifs d’Israël. Cependant, il semble qu’ici, dans la nôtre  des multiples fausses démocraties du Moyen-Orient, cette liberté ne soit  plus librement admise, même pour les fils privilégiés de la société.
 Je ne suis pas surpris par la décision du tribunal de  me condamner, bien qu’il ne fasse aucun doute, dans mon esprit, que nos  actions de ce jour-là répondaient à la plus fondamentale, la plus  élémentaire définition du droit d’une personne à manifester.
En effet, comme le Ministère public l’a souligné, une  peine de prison avec sursis planait au-dessus de ma tête au moment de la  manifestation cycliste, puisque j’ai déjà été condamné sur ce même  article de la loi.  Et, bien que je maintienne ne pas avoir commis le moindre délit, je  suis conscient de la possibilité que, selon la justice israélienne, ma  peine avec sursis me soit imposée.
Je dois ajouter que si Votre Honneur décide de  poursuivre et de me faire exécuter ma peine de prison avec sursis,  j’irai en prison volontiers, et la tête haute. C’est le système  judiciaire lui-même qui, je crois, devrait baisser les yeux face aux  souffrances infligées aux habitants de Gaza, tout comme il baisse les  yeux et détourne son regard, jour après jour, quand il est confronté aux  réalités de l’occupation. »
A propos du Comité de coordination des luttes populaires
Le Comité de coordination des luttes populaires est  constitué des militants de premier plan des comités populaires dans tous  les Territoires occupés et de tout le spectre politique palestinien.  Les comités populaires présentent une forme unique d’organisation et de  résistance à base communautaire dans la tradition de la Première  Intifada palestinienne. Ces différents comités, non partisans,  conduisent une résistance communautaire à l’occupation israélienne sous  des formes variées, telles que marches, grèves, manifestations, actions  directes et campagnes juridiques, de même qu’ils soutiennent les  boycotts, désinvestissements et les sanctions.
Le Comité de coordination a été créé pour faciliter une  communication féconde entre les différents comités populaires : depuis  les villages de Bil’in, Ni’lin et al-Masara, - connus pour leur lutte  contre le Mur - en passant par de nombreux villages de la vallée du Jourdain et du sud du mont  Hébron - confrontés aux tentatives d’un nettoyage ethnique rampant -  jusqu’aux cités de Tulkarem, Naplouse, Qalqilya et Ramallah Ouest - qui  souffrent et résistent aux différents aspects de l’occupation. Le Comité  veut fournir une base pour une réflexion stratégique à plus grande  échelle, tout en conservant l’indépendance et le caractère unique de  chaque comité populaire.
Enraciné dans une confiance entière dans la puissance de la lutte  populaire pour vaincre l’occupation israélienne, le principal objectif  du Comité est d’encourager et de renforcer la résistance populaire  palestinienne et de répondre à ses besoins. Espérant reprendre la  stratégie d’irréductibilité de l’ANC, le Comité de coordination  s’efforce d’encourager l’émergence de nouveaux comités et initiatives et  de les soutenir, quelle que soit leur tendance politique.
Le succès de la lutte populaire s’appuie également et fortement sur le soutien de la communauté internationale à travers les initiatives BDS (boycotts, désinvestissements et sanctions),  les aides financières, une visibilité accrue et une solidarité directe.  Le Comité de coordination vise à renforcer les réseaux internationaux  de soutien et leurs liens directs avec la lutte pour la liberté en Palestine.
                27 décembre 2010 - PSCC - traduction : JPP