K. Selim  - Le Quotidien d’Oran
          Comment la civilisation compte-t-elle émouvoir des Palestiniens  à qui l’on dit aussi clairement que plus de 10 000 de leurs enfants  emprisonnés n’ont aucune importance mais que le destin de l’humanité se  joue pour un soldat israélien qui fête son 4e anniversaire loin de sa  famille ? Cela dépasse l’entendement !         
 La France et la Grande-Bretagne n’en peuvent plus de tant d’injustice,  elles demandent la libération des Ahmed, Tahar, Youssra et des milliers  de Palestiniennes et de Palestiniens détenus dans les prisons  israéliennes. Londres et Paris, capitales très civilisées, considèrent  que leur détention est « injustifiable et inacceptable ». Les pensées de  tous les Britanniques sont avec les détenus palestiniens et leurs  familles, alors qu’ils passent un nouveau ramadhan dans de terribles  conditions. Londres demande courageusement que ces Palestiniens détenus  par les occupants soient libérés immédiatement et sans conditions.
M. Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères de  la France, ne supporte pas que des milliers d’enfants palestiniens  soient contraints à vivre un nouvel Aïd El-Fitr sans leurs papas et sans  leurs mamans. La France demande leur libération immédiate et  inconditionnelle, leur souffrance et celle de leurs familles n’ont que  trop duré ! Fin de fiction.
Le lecteur a bien entendu corrigé de lui-même : il est  impensable que Londres ou Paris puissent avoir la volonté ou le courage  de montrer une once d’inquiétude ou de compassion pour les milliers de  prisonniers palestiniens. Les inquiétudes et les suppliques de la  civilisation ne concernent qu’une seule personne, le soldat israélien  Shalit, qui, le pauvre, va passer son 24e anniversaire en détention.
Ils sont plus de 10 000 prisonniers, dont de très  nombreux mineurs, mais la civilisation n’en voit qu’un, Shalit, et ne  s’attriste que pour lui. Ne croyez pas que la France s’inquiète pour  Shalit en raison de sa citoyenneté française. Le « mal nommé » Salah  Amouri est un citoyen français qui avait 20 ans au moment de son  arrestation par Israël. Il a « fêté » ses 25 ans début août dans une  geôle israélienne, et il ne suscite aucun intérêt de la part des  officiels français.
Les gens civilisés peuvent-ils s’intéresser à ceux qui  sont dans les prisons de Shatà, Be’er Shéva, Asel Shéva, Shéva, Hédarim,  Talmond Nafhà, Askalan, El Ramlah, Navi Teritsa, Majido, Naqab, Ofar,  Atlét ? Peuvent-ils avoir un peu de compassion pour leurs familles qui  souffrent et peinent ? Bien sûr que non, et il y aura toujours quelque  cynique civilisé pour essayer de nous dire qu’Israël étant une  « démocratie et un Etat de droit », ces milliers de Palestiniens sont à  leur juste place. Et qu’après tout, c’est la loi de la guerre ... Qui ne  doit pas s’appliquer au soldat Shalit !
La civilisation n’est pas informée de ce qui se passe ?  On peut lui suggérer des sites très documentés qui montrent clairement  que la Palestine occupée compte le plus grand nombre de prisonniers  politiques du monde. Que l’usage de la torture y est légalisé, que les  détentions sans jugement sont légion et que des centaines de familles  sont sans nouvelles des leurs.
Comment la civilisation compte-t-elle émouvoir des  Palestiniens à qui l’on dit aussi clairement que plus de 10 000 de leurs  enfants emprisonnés n’ont aucune importance mais que le destin de  l’humanité se joue pour un soldat israélien qui fête son 4e anniversaire  loin de sa famille ? Cela dépasse l’entendement !
                29 août 2010 - Le Quotidien d’Oran - Editorial