Salwa Alenat - Kav LaOved 
          Kav LaOved (La hotline des travailleurs) est une O.N.G. engagée  dans la protection des droits des travailleurs désavantagés employés en  Israël et par les Israéliens dans les territoires occupés, incluant les  travailleurs Israéliens mal payés, les Palestiniens, les travailleurs  immigrés, les travailleurs des sous-traitances et les nouveaux  immigrants.         
 Ces travailleurs font souvent face à de sévères violations par les  employeurs et à un défaut d’application des lois du travail israéliennes  par les autorités israéliennes. Chaque catégorie de travailleurs fait  l’expérience de défis uniques ; une perspective comparative révèle que  les niveaux d’exploitation diffèrent dans chaque secteur.
Les travailleurs Palestiniens employés dans les colonies  de Cisjordanie souffrent d’épreuves provenant non seulement de  relations employeurs employées problématiques, mais aussi d’une réalité  politique et sociale qui rend leur situation encore plus difficile.  D’après un rapport de l’ILO de 2009 sur les conditions des travailleurs  Palestiniens dans les Territoires Occupés, le taux d’emploi des  travailleurs de plus de 15 ans en Cisjordanie était un peu plus de 34 % à  la fin de 2008. Près de la moitié de la force de travail a entre 15 et  29 ans. Les possibilités d’emploi sont très limitées. La moitié du  groupe d’âges 15-29 ans dans les Territoires Occupés n’est pas inscrite  dans une institution éducative et est au chômage. Le rapport appelle  cette situation « Une perte de force de travail de valeur ». Le rapport  note que le revenu moyen en Israël est 20 % plus élevé que celui dans  les Territoires Occupés. La baisse des sources de revenus des  Palestiniens, qui se reflète dans le déclin des revenus et de l’activité  économique, provient dans une large mesure de la poursuite du bouclage  et des restrictions de mouvement imposées par Israël.
La situation économique  difficile et le chômage élevé conduisent les Palestiniens à travailler  dans les colonies. En principe, les travailleurs pensent que les  colonies ont été construites sur les terres palestiniennes, mais la dure  réalité économique et le manque d’alternatives les forcent à faciliter  involontairement la croissance de ces colonies. Ce paradoxe politique a  un impact sur la question du statut légal et politique des colonies.  L’application des lois du travail israéliennes dans l’emploi des  Palestiniens dans les colonies constitue-t-elle une acceptation  implicite des colonies ? Certains en Israël pensent qu’un boycott  complet des colonies est la meilleure stratégie. Kav LaOved, avec ses  partenaires des syndicats palestiniens, essaie d’aider les travailleurs  déjà employés dans les colonies à parvenir à des conditions de travail  décentes garanties par la loi israélienne.
Le nombre de Palestiniens employés dans les colonies
D’après l’Administration Civile (l’organisme [militaire]  qui délivre les permis de travail pour les Palestiniens dans différents  secteurs tels que l’industrie, l’agriculture, la construction et  autres), il y a 20 000 palestiniens détenteurs de permis employés dans  les colonies. Kav LaOved et les syndicats palestiniens estiment qu’il y  en a 10 000 autres employés sans permis de travail. Et dont la majorité  sont employés dans les colonies agricoles de la vallée du Jourdain  pendant les saisons de récolte des dattes et des fruits, avec parmi eux  des enfants de moins de 14 ans. De plus, plusieurs centaines de  Palestiniens sont employés dans la zone industrielle Barkan au nord de  la Cisjordanie. Ces travailleurs n’ont pas obtenu de permis de travail  des autorités sécuritaires israéliennes, mais leurs employeurs ont pu  arranger des permis spéciaux leur permettant de travailler dans la zone.
En plus, 20 000 Palestiniens travaillent en Israël, la  plupart dans l’agriculture et la construction. Il y a aussi des milliers  de travailleurs qui entrent illégalement en Israël et travaillent sans  permis. Ces dernières années, le nombre de Palestiniens employés en  Israël a diminué à cause des restrictions de mouvement, de la sécurité  et de la situation économique en Israël et de l’augmentation de  l’embauche de travailleurs étrangers. En même temps, le nombre de  travailleurs Palestiniens dans les colonies a augmenté.
L’exploitation des travailleurs
Les travailleurs Palestiniens sont durement exploités  dans les colonies. Kav LaOved dirige un projet destiné à assister les  travailleurs employés dans les colonies agricoles de la vallée du  Jourdain et dans les zones industrielles des colonies telles que Mishor  Adumim près de Jericho ; Barkan près de Salfit ; Shahak près de Jénine ;  Nitzanei Hashalom près de Tulkarem ; Alei Zahav ; Emanuel ; Karnei  Shomron et Alfei Menashe dans la zone de Qalqilya. Il y a 20 zones  industrielles de colonies de ce type, employant environ 5000  travailleurs réguliers et des milliers de travailleurs temporaires et  saisonniers employés via des prestataires Palestiniens. La majorité des  produits agricoles de la vallée du Jourdain est exportée en Europe.
D’après la loi israélienne, les travailleurs  Palestiniens ont droit à des contrats de travail et aux droits garantis  par les lois du travail israéliennes. D’après un jugement de la cour  suprême de 2007, ils devraient bénéficier des mêmes droits que les  travailleurs Israéliens. Ce jugement a été le résultat d’une lutte de 14  ans menés par Kav LaOved à la Cour du Travail israélienne. La durée de  la lutte et la résistance persistante de l’État d’Israël à appliquer les  lois du travail israéliennes aux colonies reflète la préférence de  l’État au maintien de bas coûts de travail dans les colonies. Une force  de travail bon marché et disponible fait partie des incitations pour les  Israéliens et les étrangers à investir dans les colonies.
Dans les deux années qui ont suivi l’extension des lois  du travail israéliennes aux colonies, plusieurs changements sont apparus  — certains dus à l’application des lois et certains à d’autres facteurs  sur le terrain.
1. Bas salaires et absence de  droits sociaux
Les salaires des travailleurs ont augmenté, mais n’ont  pas atteint le salaire minimum israélien (actuellement 20,7 shekels de  l’heure). En général, les travailleurs agricoles Palestiniens reçoivent  un tiers du salaire minimum, 50 à 60 shekels (15 $) pour huit heures de  travail. Ceci s’applique aussi aux enfants employés pendant la saison  des récoltes. Aucun changement important des salaires des travailleurs  n’a eu lieu dans le secteur agricole. En revanche, dans les zones  industrielles, les travailleurs reçoivent environ deux tiers du salaire  minimum, environ 80 à 120 shekels par jour. Les travailleurs de  plusieurs usines ayant demandé une augmentation ont été pacifiés par  quelques shekels supplémentaires.
Un intéressant phénomène associé, c’est la rédaction de  plusieurs dizaines de plaintes en nom collectif par des travailleurs  contre leurs employeurs dans les zones industrielles. Au cours des trois  dernières années, Kav LaOved a accompagné cinq cas de travailleurs  industriels faisant des procès à leurs employeurs. Les procès  demandaient l’application des lois du travail, en particulier le  paiement du salaire minimum et les droits sociaux associés, tels que les  congés maladie, les journées de vacances, de fêtes etc. La plupart de  ces procès sont toujours en discussion devant les prud’hommes.
Ces procès, avec des dizaines de procès personnels,  reflètent puissamment les changements des relations d’emploi entre  travailleurs Palestiniens et employeurs Israéliens dans les colonies.  Les travailleurs avaient l’habitude de se considérer comme travailleurs  de deuxième classe parce qu’ils n’étaient pas Israéliens. Ils croyaient  que leurs employeurs Israéliens leur faisaient une faveur en les  embauchant. Avec le temps, les travailleurs en sont venus à se voir  différemment, comme des égaux méritants un emploi décent. Cette  transformation est venue de l’éducation par Kav LaOved et par les  syndicats palestiniens concernant les lois israéliennes du travail et  les droits des travailleurs, et de l’assistance juridique de ces  organisations aux travailleurs dans des zones telles que Jéricho,  Jénine, Tubas, Salfit, Qalqilya et Tulkarem.
Les plaintes en nom collectif ont un impact énorme.  D’une part, elles expriment une protestation collective par des  travailleurs contre les violations sur le lieu de travail. D’autre part  elles portent un coup sérieux aux employeurs ; dans deux lieux de  travail — une blanchisserie d’une carrière — les employeurs ont été près  de fermer leurs opérations dans les colonies à cause des plaintes des  travailleurs et des coûts élevés impliqués. À la suite de l’augmentation  des plaintes devant les tribunaux prud’homaux, des employeurs ont gardé  de leurs travailleurs des documents pouvant servir de preuves devant le  tribunal, comme des bulletins de paie. Dans la plupart des fabriques  les employeurs ont gardé les bulletins de paie. Dans certains endroits  où les bulletins de paie étaient distribués auparavant, les employeurs  ont commencé à les garder à la suite du jugement de la Cour Suprême sur  l’application des lois israéliennes du travail. Dans d’autres cas, les  employeurs ont falsifié l’information des bulletins de paie concernant  le nombre d’heures ou de jours travaillés et ne mentionnaient pas les  heures supplémentaires. Ainsi, les bulletins de paie reflétaient  faussement le paiement d’un salaire minimum aux travailleurs alors qu’en  réalité ceux-ci recevaient un salaire bien inférieur.
Un des cas les plus saillants a eu lieu dans la  municipalité de Maale Adumim, une colonie de Jérusalem Est, qui  employait environ 80 travailleurs Palestiniens. La municipalité a  argumenté que la loi du travail jordanienne devrait s’appliquer à ces  travailleurs Palestiniens. Les travailleurs, qui furent licenciés à  cause d’un conflit du travail, argumentaient qu’ils devraient se voir  accorder les droits garantis par les lois du travail israéliennes. De la  même façon, dans une usine de la zone industrielle Mishor Adumim  possédée par la compagnie israélienne Even Bar Ltd., les employeurs ont  argumenté que les travailleurs devraient être rémunérés selon la loi du  travail jordanienne.
Fréquemment, les employeurs ont forcé leurs travailleurs  à signer des documents de renonciation de leurs droits en hébreu. Les  travailleurs refusant de signer les documents étaient menacés de  licenciement. Dans une usine, un travailleur forcé de signer un document  en hébreu a écrit en arabe « mish aref » (je ne sais pas) ! Légalement,  ces documents n’ont pas valeur de preuves devant les tribunaux  prud’homaux.
2. L’emploi via des prestataires  Palestiniens
Dans les colonies la vallée du Jourdain, les employeurs  utilisent des prestataires Palestiniens, une pratique commune des 20  dernières années. Au cours de cette période, les prestataires se sont  établis comme des intermédiaires absolus entre les employeurs et les  travailleurs. Souvent les travailleurs ne connaissent pas le nom de leur  employeur israélien. Le travail du prestataire est d’amener des  travailleurs au travail selon la demande, de les payer et de s’assurer  qu’ils ne demandent pas d’augmentation. Dans la plupart des cas, les  prestataires licencient les travailleurs, changent leur lieu de travail  et les empêchent de demander leurs droits. De leur côté, les  travailleurs considèrent le prestataire comme une sorte d’agence de  l’emploi qui peut leur trouver du travail.
Les travailleurs et les prestataires sont en compétition  pour les jobs peu nombreux disponibles dans les colonies. Après le  jugement de la Cour Suprême, les employeurs de la vallée du Jourdain ont  essayé de présenter les prestataires eux-mêmes comme employeurs des  travailleurs. Ils ont exigé que les prestataires remplissant les  déclarations fiscales de salaires, une tâche qui incombe à l’employeur.  En outre, dans certains cas le nom du prestataire était écrit sous  ‘employeur’ sur les permis de travail. Les employeurs ignoraient les  demandes d’augmentation des travailleurs et les renvoyaient aux  prestataires pour ces questions.
Kav LaOved, avec les syndicats palestiniens de Jéricho, a  entamé un dialogue avec certains prestataires qui refusaient de  dissocier leur salaire de celui des travailleurs et s’appropriaient  ainsi un montant inconnu sur les salaires des travailleurs. Beaucoup  d’employeurs Israéliens dans la vallée du Jourdain admettent qu’ils ne  payent pas le salaire minimum, mais justifient la pratique en  argumentant que les travailleurs Palestiniens des colonies gagnent plus  que les travailleurs dans l’autorité palestinienne.
Dans certaines zones industrielles, des usines ont  commencé à employer leurs travailleurs via des prestataires. Dans  quelques cas les travailleurs ont été capables d’empêcher cette pratique  en résistant à l’introduction d’intermédiaires. Ces travailleurs  étaient plus mûrs, plus professionnels et unis et ainsi capables de  faire pression sur leurs employeurs en menaçant de faire grève. En une  autre occasion, la section syndicale palestinienne de Tulkarem a été  capable d’empêcher un prestataire d’entrer dans une usine en faisant  appel à la pression sociale.
L’emploi via des prestataires Palestiniens est un  important défi. Les changements des circuits d’emploi, particulièrement  dans la vallée du Jourdain, vont mener à des changements sociaux  profonds. Les prestataires ont souvent un statut social élevé, ils  emploient les membres de leur famille et il est difficile pour d’autres  de contester l’autorité qu’ils ont acquise au cours des années. Dans une  de nos sessions de travail pour les femmes dans le village de Zbidat de  la vallée du Jourdain, 20 travailleuses présentes se sont plaintes d’un  bas salaire de 60 shekels par jour. Quand nous avons expliqué qu’elles  devaient faire pression sur les prestataires elles ont répondu : « Ce  sont nos frères, nous ne pouvons pas revendiquer contre eux ».
3. Mauvais traitements des  travailleurs blessés
Quand ils sont blessés, la plupart des travailleurs  doivent parvenir par eux-mêmes à l’hôpital palestinien le plus proche  pour des premiers soins. D’autres sont évacués par MADA, le SAMU  israélien, au check-point le plus proche où ils sont transférés vers une  ambulance du Croissant-Rouge palestinien et conduits à un hôpital  palestinien. Dans tous ces cas, les travailleurs ont droit à un  traitement médical en Israël.
Exemple : le cas d’Ali Abu Ara, un travailleur agricole  dans la colonie Mechora de la vallée du Jourdain. Le 24 novembre 2008 à  10 h 30 et s’est coupé la main gauche en travaillant dans une palmeraie.  Il a saigné pendant 15 minutes, jusqu’à ce que le prestataire  Palestinien le conduise à l’hôpital palestinien de Naplouse, qu’il n’a  atteint qu’à 18 heures. (Devinez pourquoi ça a pris tant de temps).
Le travailleur dit qu’aucune ambulance ne fut appelée  sur le lieu de travail. L’employeur, en réponse à une demande de Kav  LaOved, a nié avoir jamais employé le travailleur. Le travailleur ne  connaît que le prénom de l’employeur parce qu’il était employé sans  permis de travail. Cette forme d’emploi est habituelle dans la vallée du  Jourdain lorsque les travailleurs sont embauchés par des intermédiaires  Palestiniens et n’ont pas de contact direct avec leurs employeurs  israéliens.
Un ouvrier palestinien travaille sur un  chantier de construction dans la colonie de Betar Ilit, en Cisjordanie,  au printemps 2008.
En plus de supporter le traumatisme physique de la  blessure, les travailleurs doivent trouver indépendamment un moyen  d’arriver à un hôpital ; ils ne reçoivent aucune aide de leur employeur.  D’après les témoignages de travailleurs, parfois un employeur les  conduit au check-point le plus proche, mais il n’appelle pas une  ambulance. La première réponse de l’employeur à la blessure d’un  travailleur, est semble-t-il de le retirer du lieu de travail pour fuir  ses responsabilités, plutôt que de fournir une première aide médicale.
Certains employeurs acceptent de payer pour les coûts  médicaux de départ, mais quand des soins médicaux prolongés et coûteux  sont nécessaires ils se désengagent souvent et laissent le travailleur  se débrouiller seul. Dans la plupart des cas, l’employeur vire les  travailleurs blessés au travail ou exige qu’il revienne au travail  rapidement, avant guérison complète. Les travailleurs notent que les  employeurs ne leur payent pas de congé maladie pour les absences dues à  un accident du travail, et refusent souvent de remplir les formulaires  qui permettraient aux travailleurs d’obtenir une indemnité de la  sécurité sociale. Les travailleurs n’insistent pas sur ces questions  parce qu’ils ont peur de perdre leurs sources de revenus ou celle des  membres de leur famille qui travaillent pour le même employeur. Ces  facteurs découragent le travailleur blessé de demander ses droits  légaux.
Nous avons abordé les autorités israéliennes sur ces  questions mais à ce jour nous n’avons pas reçu de réponse qui puisse  faciliter une solution du problème. Kav LaOved travaille pour que les  travailleurs blessés reçoivent un traitement médical initial dans un  hôpital ou une clinique israélienne. Une ambulance du MADA est exigée  par la loi pour les transporter en Israël, plutôt que pour de les  transférer par un check-point à une ambulance palestinienne qui les  conduit ensuite dans une structure médicale de l’AP. L’évacuation des  travailleurs par MADA en Israël leur épargnera beaucoup de souffrances  ainsi que le cauchemar bureaucratique de traiter avec les services de la  sécurité sociale — un processus qui prend des mois.
4. L’insécurité au travail
Les travailleurs sont aussi exposés à une incroyable  insécurité sur leur lieux de travail, qui ne sont pas surveillés par le  Ministère de l’Industrie, du Commerce et du Travail, ou par  l’Administration Civile (un organisme de l’armée dans les territoires  occupés qui opère depuis 1967).
L’enquête de 2008 de Kav LaOved dans 60 fabriques, qui  emploient 3000 Palestiniens dans les zones industrielles de Barkan,  Nitzanei Hashalom, Alei Zahav, Karnei Shomron et Emanuel au nord de la  Cisjordanie, dépeint un tableau choquant des conditions de sécurité au  travail. 97 % des travailleurs de ces zones sont directement exposés aux  dangers découlant de l’indifférence aux règlements élémentaires de  sécurité du travail. 59 % des travailleurs font face à des conditions  très dangereuses et ne disposent pas de matériel de sécurité basique et  approprié.
Un des exemples les plus frappants est celui des  travailleurs agricoles de la vallée du Jourdain. Chaque année, Kav  LaOved relève leurs conditions de travail, et souligne le travail sur  des palmiers dattiers élevés et l’emploi de pesticides dangereux. Ces  deux tâches sont accomplies sans aucune mesure de protection. Homme,  femmes et enfants sont exposés directement et indirectement à des  substances dangereuses. Les hommes répandent des pesticides sur les  champs sans vêtements ni équipements de protection. À côté d’eux, femmes  et enfants ramassent ou coupent les fruits et les plantes pollués par  les pesticides, un travail aussi dangereux que l’épandage lui-même. Les  enfants sont particulièrement sensibles à ces pesticides et risquent de  développer des problèmes de fertilité et des cancers.
L’usine d’embouteillage de gaz de la zone industrielle  Nitzanei Hashalom près de Tulkarem est un autre exemple. En juin 2009,  Kav LaOved a envoyé une lettre à l’officier du bureau de l’emploi de  l’Administration Civile, présentant les plaintes des travailleurs  concernant leur exposition à des gaz dangereux tels que le bromure de  méthyle et d’autres. Les travailleurs sont exposés à la vapeur toxique  dégagée dans le processus de fusion du plomb, ils inhalent des vapeurs  de peinture, de la poussière des sels de nettoyage et des vapeurs des  détergents de nettoyage des bouteilles de gaz. Dans la lettre, Kav  LaOved indiquait aussi que les travailleurs étaient vulnérables à des  accidents du travail et à des maladies professionnelles. Kav LaOved  s’inquiète des conditions de santé et mentales des travailleurs de  l’industrie, particulièrement du fait que beaucoup d’entre eux ne sont  pas conscients des risques sur le lieu de travail et du fait que l’usine  ne fait pas de contrôle médical de ses travailleurs.
Kav LaOved a adressé ces réclamations à la direction de  l’usine, qui les a écartées. La direction argumente que l’officier du  bureau de l’emploi de l’Administration ‘Civile’ visite régulièrement  l’usine pour inspection. Aucune réponse a été reçue de l’Administration  Civile et à ce jour aucune inspection ni règlementation n’a été mise en  place dans l’usine. Les travailleurs souffrent gravement de leur travail  avec les substances chimiques dangereuses.
La plupart des Palestiniens travaillant dans les  colonies ne sont pas protégés sur le lieu de travail. Beaucoup signalent  différents douleurs, le plus souvent des migraines, des douleurs de  dos, aux jambes ou au bras et des difficultés respiratoires. Les  questions de santé tournent autour des maladies liées au travail qui  restent non diagnostiquées car il n’y a pas de clinique traitant ces  maladies-là dans l’AP et les travailleurs ne peuvent pas accéder aux  cliniques en Israël.
5. Dépendance financière et plus
La dépendance des travailleurs Palestiniens de leurs  employeurs dans les colonies n’est pas qu’économique. Les travailleurs  dépendent des employeurs pour leur permis de travail. Pour recevoir un  permis de travail, l’employeur doit soumettre une demande à  l’Administration Civile qui attribue au travailleur un accès à la zone  de la colonie. Le principal critère de délivrance des permis est le  certificat de sécurité. Le passé du travailleur doit être libre de toute  action ou déclaration pouvant mettre en danger la sécurité d’Israël.  Potentiellement, le travailleur impliqué dans un conflit du travail avec  un employeur peut se voir refuser l’accès pour « raisons  sécuritaires ». Cette crainte empêche beaucoup de travailleurs de  demander leurs droits légaux.
La peur de perdre le permis de travail est souvent plus  grande que celle de perdre un travail. Sans le permis, les chances  d’emploi de travailleurs dans les colonies sont proches de zéro. Les  employeurs Israéliens n’hésitent pas à utiliser cela comme un atout pour  faire pression sur leurs travailleurs pour qu’ils abandonnent les  procès devant les cours prud’homales ou s’abstiennent de demander une  augmentation. Dans un cas, des travailleurs qui poursuivaient leur  employeur devant la cour prud’homale de Tel-Aviv pour le salaire minimum  et d’autres droits ont déclaré que celui-ci, en réponse, les a dénoncés  à la police israélienne qui leur a par conséquent interdit de retourner  à leur travail. Les travailleurs ont dit qu’ils avaient travaillé pour  cet employeur pendant 10 ans et qu’il les aidait à rester sur le lieu de  travail sans permis quand ça l’arrangeait.
Souvent, l’employeur termine l’emploi des travailleurs  en appelant les gardes de sécurité de la colonie qui expulsent les  travailleurs. Par exemple, quand des travailleurs de deux installations  coloniales de la zone industrielle de Mishor Adumin ont protesté du fait  que leurs salaires n’étaient pas payés, les employeurs ont appelé le  personnel sécuritaire de la colonie pour expulser les travailleurs des  usines. Dans une des usines, l’employeur a suspendu les permis des  travailleurs pour les empêcher de revenir et d’exiger leur salaire. À la  suite de l’intervention de Kav LaOved, l’employeur a permis aux  travailleurs de revenir, excepté sept d’entre eux qui le poursuivent  maintenant devant la cour prud’homale de Jérusalem.
Défis et activités futures
Le projet de Kav LaOved d’assistance des travailleurs  Palestiniens dans les colonies continuera d’aider les plaintes  collectives et individuelles des travailleurs. Les cours prud’homales  israéliennes sont la destination des procès faits par les travailleurs  dont les droits sont niés. Cependant le travail légal ne suffit pas.  Notre expérience nous enseigne que l’élévation de la conscience parmi  les travailleurs et le suivi quotidien de leur plainte ont un impact  significatif. La phrase « savoir c’est pouvoir » n’est pas théorique, sa  vérité pratique est prouvée quotidiennement par les travailleurs qui  vivent différemment leurs conditions d’emploi après avoir appris leurs  droits. Dans certaines fabriques, les travailleurs ont même été capables  de former un syndicat et de commencer des négociations avec les  employeurs.
Les travailleurs Palestiniens conscients de leurs droits  ont une image plus positive d’eux-mêmes. La peur de perdre sa source de  revenus est toujours présente mais elle devient moins menaçante.  Résultat de quatre années d’activité, les Palestiniens savent qu’ils  sont des travailleurs égaux et non de deuxième classe.
Néanmoins, nous ne pouvons pas en rester au niveau  élémentaire si nous voulons changer considérablement les relations entre  employeurs Israéliens et travailleurs Palestiniens, qui ressemblent  souvent à une relation de maître à esclave. Nous devons faire pression  sur les autorités légales israéliennes pour mettre en oeuvre et  appliquer les lois israéliennes du travail dans les colonies. Kav LaOved  prépare plusieurs requêtes à la Cour Suprême contre des institutions  israéliennes telles que l’institut de sécurité sociale, le ministère de  l’industrie, du Commerce et du travail et l’administration civile.
L’engagement de clients, d’associations des droits  humains, de fédérations syndicales internationales et de citoyens qui  croient que les personnes sous occupation ont droit à un emploi correct,  et leur volonté d’exercer une pression sociale sont un autre outil  puissant pour faire pression sur les employeurs et sur l’Etat d’Israël  pour faire appliquer les lois du travail appropriées.
Dans un cas, les travailleurs d’une usine de Soda Club  de la zone industrielle de Mishor Adumim ont reçu une aide d’une origine  inattendue - les médias suédois ont pu faire pression sur la compagnie  en faveur des droits des travailleurs. En 2009, les travailleurs  reçoivent leurs droits selon la loi israélienne. Cependant ils sont  toujours au plus bas de la hiérarchie dans l’usine et craignent en  permanence leur licenciement. À l’inverse, dans d’autres usines, comme  Royalife — une usine de textile à Barkan, où les travailleurs sont  soumis à une dure exploitation et reçoivent huit shekels par heure de  travail (certaines femmes sont même payées moins), nous n’avons pas été  capables de faire appliquer la loi par une pression du public israélien.
Nous avons produit un film (*) expliquant l’exploitation  des travailleurs, les salaires de famine et les dangereuses conditions  de travail, et nous avons essayé d’amener à la connaissance du public  les violations légales qui ont lieu. Toutefois, l’indifférence d’une  grande partie du public israélien à la souffrance des travailleurs  palestiniens est un autre défi. Alors que notre vision à long terme  inclut la viabilité économique et l’indépendance palestinienne, notre  vision à court terme se focalise sur la construction d’une  infrastructure de direction des travailleurs Palestiniens qui traitera  de la réalité quotidienne des violations des droits des travailleurs.
(*) Royal Life http://www.youtube.com/watch?v=HJc3...
                                  13 mars 2010 - kavlaoved.org - Vous pouvez consulter cet  article à : 
http://www.kavlaoved.org.il/media-v...
Traduit de l’anglais par Jean-Pierre Bouché
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