Par Adnan Abu Amer
Les cercles politiques à Gaza se sont demandé si le Hamas reviendrait 
dans l'axe de l'Iran après une rupture qui a duré plus de deux ans. Le 
10 mars, Mahmoud al-Zahar, figure de proue du Hamas et dernier lien 
entre le Hamas et l'Iran, a annoncé que des démarches étaient 
entreprises pour restaurer la relation bilatérale.
Le ministre des Affaires étrangères du 
Qatar, le Dr. Khalid bin Mohammed Al Attiyah (à dr.), reçu par son 
homologue iranien Mohammad Javad Zarif  à Téhéran le 26 février 2014 (source photo)
Al-Monitor a appris d'une source proche de la direction politique
 du Hamas que l'Iran envisage aussi de recevoir bientôt le chef du 
Hamas, Khaled Meshaal, après un long bras de fer marqué par des 
discussions secrètes. La source a déclaré que le Qatar a servi de 
médiateur avec l'Iran pour rétablir les liens avec le Hamas. Fin 
février, le ministre qatari des Affaires étrangères Khalid al-Attiyah s'est rendu à Téhéran à cet effet.
La source a ajouté que la semaine dernière, l'Iran a donné le feu vert 
pour une visite de Meshaal, après des contacts entre Zahar et Marwan 
Issa, un haut dirigeant des Brigades Izz ad-Din al-Qassam, la branche 
armée du Hamas. Cette visite, attendue de longue date, se terminera par 
une rencontre de Meshaal avec le guide suprême d'Iran, l'ayatollah Ali 
Khamenei. 
Lors de sa rencontre avec Meshaal et de sa récente et première visite au
 Qatar, le secrétaire-général du Jihad islamique Ramadan Shalah a discuté des détails de la prochaine visite à Téhéran.
Développements régionaux
La reprise des relations entre les deux parties a été annoncée le 10 
mars par le chef du Conseil iranien de la Shura Ali Larijani, qui a dit,
 "L'Iran soutient le Hamas
 parce qu'il s'agit d'un mouvement de résistance. (...) Notre relation 
avec le Hamas est bonne et elle est revenue à ce qu'elle était. Nous 
n'avons aucun problème avec le Hamas."
Al-Monitor a interrogé un certain nombre de dirigeants du Hamas 
de premier et de deuxième rangs, dans le pays et à l'étranger, sur ce 
qu'ils pensent de la reprise de relations avec l'Iran. Lors d'une 
réunion dans son bureau à Gaza, un dirigeant du Hamas a déclaré à Al-Monitor, "Le
 mouvement ne saute pas d'un endroit à un autre, de l'Iran à l'Egypte, 
puis au Qatar et pour finir par revenir en Iran. Le Hamas ne s'est pas 
nécessairement trompé. Au contraire, le Hamas est en harmonie avec 
lui-même et avec sa ligne de libération nationale. Le Hamas s'est rangé 
du côté de la volonté du peuple, de son droit à la liberté et à former 
son système politique."
La source a admis que la tournure des événements dans la région, suite à
 l'éviction de l'ex-président Mohammed Morsi en Egypte a accéléré 
l'évolution des liens Iran-Hamas. L'amélioration des relations entre le 
Qatar, qui abrite Meshaal, et l'Iran est également un facteur clé dans 
le réchauffement des liens entre le Hamas et Téhéran.
"Bien sûr, les développements régionaux ont accéléré la reprise des relations entre le Hamas et l'Iran," a ajouté la source. "Peut-être le plus important [de ces développements] est
 la rupture brutale entre le Hamas et l'Egypte après le coup d'Etat, et 
la tension entre le Qatar et l'Arabie Saoudite. Cette tension a 
contribué à réchauffer les relations entre Doha et Téhéran, et a jeté 
une ombre sur le Hamas d'une manière positive."
Youssef Rizqa,
 ancien ministre de l'Information au gouvernement Hamas, a décrit la 
relation avec l'Iran comme stable et a dit que les deux parties étaient 
d'accord sur de nombreux points, en particulier sur le conflit avec Israël.
Le Hamas s'est félicité de la reprise de l'aide financière, car elle 
signale que les cercles décisionnaires à Téhéran n'ont pas émis de veto 
sur le mouvement. En outre, le Hamas est optimiste que la visite de 
Meshaal se traduira par une augmentation du soutien financier iranien.
Un soutien qui a été confirmé par Ahmed Youssef, ancien conseiller 
politique du dirigeant palestinien Ismail Haniyeh, qui a dit que le 
Hamas souhaitait développer ses relations avec l'Iran
 parce que ce sont des partenaires stratégiques et ils ont convenu de 
faire preuve de compréhension vis-à-vis de leurs positions respectives 
sur les questions litigieuses, en particulier la situation en Syrie.
Toutefois, la reprise des relations Hamas-Iran ne sera pas 
nécessairement saluée par tous alliés de Téhéran, notamment la Syrie et 
le Hezbollah, qui ne sont pas d'accord pour accepter le retour du Hamas dans leur axe.
Réconciliation avec le Hezbollah
Un dirigeant palestinien de premier plan au Liban a cherché à négocier 
la réconciliation entre le Hamas et le Hezbollah conjointement à celle 
entre le Hamas et l'Iran. Dans un entretien téléphonique avec Al-Monitor,
 il a confirmé que le Hezbollah affirme que des éléments du Hamas 
ferment les yeux sur la contrebande d'armes à la Syrie par le Liban et 
qu'on a découvert que des éléments du Hamas combattaient en Syrie. Il a 
aussi noté que certains Palestiniens ont été impliqués dans les 
bombardements des banlieues sud de Beyrouth, même si le Hamas réfutent 
ces accusations.
"Les efforts de médiation à huis clos entre le Hamas et le Hezbollah à
 Beyrouth ont abouti à un 'accord de désaccord' sur la Syrie et la 
poursuite d'un 'partenariat stratégique'", a-t-il noté.
La même position a été exprimée par Salah Bardawil, personnalité du 
Hamas, qui a dit que la relation du Hamas avec le Hezbollah est bonne, malgré des divergences sur la Syrie. Il a également fait remarquer que des efforts sont déployés pour rétablir les relations bénéfiques pour les deux parties.
Le Hamas ne se limite pas à parler de l'amélioration de ses relations 
avec le Hezbollah, mais il a commencé à envoyer des délégations aux 
partis libanaises pour qu'elles l'absolvent
 des accusations selon lesquelles il est le principal incubateur de 
groupes jihadistes et salafistes dans les camps palestiniens du Liban, 
au point que des représentants du Hamas se sont mobilisés pour prouver 
au Hezbollah leur innocence. Les liens entre les deux côtés existent 
toujours et aucun des deux ne songe à les rompre, en dépit des 
complexités et des divergences, en particulier parce que leur terrain 
d'entente est important.
Jihad Taha, personnalité Hamas au Liban, a dit lors d'un entretien du 16 mars avec Sadaaden.com que son mouvement envisageait de lancer une initiative pour renforcer les relations libano-palestiniennes
 et prévenir des affrontements interconfessionnels, indiquant que le 
Hamas souhaitait améliorer ses relations avec le Hezbollah par une série
 de réunions et de visites intensives avec les autorités libanaises de 
sécurité pour en assurer le succès.
Une source proche du Hamas a dit à Al-Monitor qu'on peut considérer la reprise des relations du Hamas avec Téhéran comme faisant partie de la "redistribution des cartes" dans la région au cours de ces derniers mois, en raison des évolutions en Egypte et en Syrie.
"La reprise des relations entre eux est maintenant à portée de main, 
parce que les décideurs du Téhéran shiite, à la lumière de la 
polarisation sectaire et politique qui domine la région, veulent 
rétablir les relations avec le Hamas sunnite et renforcer ses liens avec
 lui. Le Hamas, en retour, a besoin de cette relation à ce stade 
critique et il espère que la visite de Meshaal sera en cela positive. 
Elle insufflera un nouveau soutien au mouvement et l'aidera à résister 
au siège, qui s'aggrave comme jamais auparavant."
Source : Al Monitor
Traduction : MR pour ISM