14.06.11 
Monsieur le ministre d'Etat,
Les anciens diplomates signataires de cette lettre, parmi lesquels  certains eurent l'honneur de servir sous vos ordres, en vous exprimant  tous leurs vœux pour la haute mission qui vous incombe à nouveau,  souhaitent vous faire part de leurs préoccupations sur la conjoncture au  Proche-Orient et la question palestinienne.
La France a toujours su, dans le passé, exprimer sur ces problèmes ce  qui était juste et entraîner derrière elle ses partenaires européens.  Or, l'impasse est plus manifeste que jamais dans le processus de paix  entre Israéliens et Palestiniens. C'est pourquoi, nous avons l'année  dernière adressé une lettre ouverte au président de la République lui  suggérant de prendre une initiative aux Nations unies en vue de  réaffirmer les bases sur lesquelles un règlement de paix devrait être  fondé et  de rechercher auprès du Conseil de sécurité les moyens de les  imposer et de les garantir. Cette lettre a été publiée par Le Monde.fr, le 1er mars 2010.
Nous avons la conviction que le moment est venu de reconnaître un  Etat palestinien. Ne présente-t-il pas déjà les caractères d'effectivité  nécessaires : un peuple, un territoire, une autorité ? Les institutions  financières internationales ont d'ailleurs reconnu la bonne gestion de  l'Autorité palestinienne. La réconciliation des mouvements palestiniens  satisfait le préalable d'un engagement unitaire national.
La politique intérieure d'Israël ne peut l'emporter sur le droit  international. L'annexion ou l'occupation ne sauraient fonder un droit, y  compris à Jérusalem. En énonçant de manière unilatérale des conditions  injustifiables pour la reconnaissance d'un pseudo Etat palestinien, M.  Netanyahu a jeté un défi à la communauté internationale et accroît les  risques de conflits dans une zone du monde particulièrement vulnérable.
Il appartient, nous semble-t-il, à l'Europe et en particulier à la  France et à la Grande-Bretagne qui ont exercé des responsabilités  historiques dans la région, de faire prévaloir une solution équitable et  conforme aux aspirations légitimes du peuple palestinien. Désormais,  toute négociation bilatérale apparaissant vaine, la reconnaissance de  plein droit d'un Etat palestinien par les Nations unies à la prochaine  session de l'Assemblée générale, selon la procédure même qui a permis la  création de l'Etat d'Israël,  ouvrira la voie à une paix durable assurant la pérennité et la sécurité  d'Israël dans son environnement géographique et humain. Une telle  décision rencontrera la volonté de justice exprimée tant par les  mouvements arabes d'essence démocratique que par certains secteurs de  l'opinion publique en Israël même et permettra l'établissement de la  concertation méditerranéenne que la France souhaite intensément.
Nous ne sous-estimons pas, M. le ministre d'Etat, les obstacles  auxquels se heurte cette démarche mais nous espérons que, comme elle l'a  fait naguère dans la Déclaration du Conseil européen de Venise en vue  de la reconnaissance des droits du peuple palestinien, la France  affirmera son rôle traditionnel au service des valeurs dont dépendent la  liberté et la dignité de tous les peuples.
René Ala, Jacques Andréani, Yves Aubin de La Messuzière, Denis Bauchard, Pierre-Louis Blanc, Louis Dauge, Alain Dejammet, Bernard Dorin, Bertrand Dufourcq, Christian Graeff, Stéphane Hessel, Pierre Hunt, Pierre Lafrance, Patrick Leclercq, Jean-Louis Lucet, Gabriel Robin, André Ross, Jacques-Alain de Sédouy, Henri Servant, Alfred Siefer-Gaillardin.
        des anciens ambassadeurs
Lien