Publié le 21-08-2010 
                   Partie d’Abou Ghraib, la  soi-disant « dernière patrouille » a mis quatre jours pour couvrir  600km, roulant de nuit, protégée par des chasseurs F 16, des  hélicoptères Black Hawk et, au sol, par des troupes du régime de Bagdad.  Ils laissent derrière eux une population exangue aux mains de corrompus  protégés par des mercenaires.
"Retrait partiel d’Irak : un avant-goût de défaite,
par Gilles Munier
« Ils sont partis comme des voleurs… comme des  criminels », ont dit les Irakiens en apprenant que la 4ème brigade de  combat Stryker, de la 2ème division d’infanterie de l’armée étasunienne,  avait franchi la frontière du Koweït – sans tambour ni trompette -  à  l’aube, le 19 août 2010. Partie d’Abou Ghraib, la soi-disant « dernière  patrouille » a mis quatre jours pour couvrir 600km, roulant de nuit,  protégée par des chasseurs F 16, des hélicoptères Black Hawk et, au sol,  par des troupes du régime de Bagdad.
A part le carré pro américain, personne ne regrette leur  départ. Les brigades d’infanterie Stryker qui tirent leur nom du  véhicule blindé dont elles sont dotées, ont participé aux massacres  ayant ensanglanté l’Irak  - notamment à ceux de Fallujah et de Tell  Afar -, et aux opérations de ratissage contre la résistance et aux  tortures de civils dans les régions de Baquba, Rawa, Mossoul et Diyala.
Tout le monde se prépare au pire
Si certaines troupes d’occupation s’en vont, d’autres  restent. La guerre n’est pas terminée, n’en déplaise à Barack Obama en  campagne électorale de mi-mandat. Sept ans et cinq mois après l’invasion  du pays, environ 56 000 GI’s sont toujours en Irak, ainsi que plusieurs  milliers de mercenaires (contactors). Tandis que l’armée américaine  formera les troupes irakiennes, des forces spéciales – 5000 environ –  combattront le terrorisme, c’est-à-dire la résistance.
Personne ne sait quand les Etats-Unis se retireront  vraiment d’Irak, surtout si le régime de Bagdad, aux abois, demande  qu’ils restent. L’ancien chef rebelle kurde Babakr Zebari, actuel chef  d’Etat major de l’armée irakienne, estime que le retrait américain est  « prématuré » et que le régime ne pourra pas assurer, seul, sa sécurité…  d’ici 2020.
D’ailleurs tout le monde se prépare au pire. Signe qui  ne trompe pas : les 2400 diplomates étasuniens en Irak seront protégés  par une armée privée de 7 000 mercenaires disposant de 1300 véhicules  blindés et de 29 hélicoptères. Chaque antenne diplomatique américaine  aura une unité des forces spéciales à sa disposition. Dire que les  Etats-Unis n’occupent plus l’Irak, ne participent plus aux combats, ou  s’en abstiendront à l’avenir, sont des mensonges éhontés.
Pendant ce temps la population souffre
L’ONU a annoncé que, faute de moyens financiers, les  distributions de nourriture à 800.000 femmes enceintes et allaitantes et  à des enfants mal-nourris ont dû être suspendues, de même que les  distributions de nourriture à 960.000 enfants allant à l’école. De même  pour le plan d’action vivant à aider 22.500 familles déplacées  vulnérables avec des abris d’urgence. Des milliers de ménages vont  devoir continuer à vivre dans des abris de fortune, sans pouvoir se  protéger des conditions climatiques extrêmes.
Où passe l’argent du pétrole ?
Sept ans après l’invasion de l’Irak et le renversement  du Président Saddam Hussein, le régime de Bagdad rongé par la corruption  (2) quémande toujours des fonds à des pays donateurs, mais avec de  moins en moins de résultat. Cette année, sur 187,7 millions de dollars   requis pour la mise en œuvre du plan humanitaire de l’ONU, seulement 12%  des promesses de financement ont été honorés. Et pour cause : selon  Hussein al-Sharistani, ministre du Pétrole, les revenus pétroliers  irakiens se montent à 171 milliards de dollars pour la période 2006  /2009. L’Irak produit aujourd’hui 2,5 millions de barils de brut par  jour. Question : où passe l’argent du pétrole ?
A Bagdad et à Erbil (Région autonome du Kurdistan), les  contrats dits de reconstruction sont signés avec des entreprises  étrangères en fonction des avances sur commissions qu’ils génèrent. Tant  pis si les travaux ne sont pas réalisés, pour des raisons de sécurité  ou pour engagements non tenus (3). L’inculpation récente de Tarek Aziz  pour « dilapidation des deniers publics » - décision prise sans doute  pour relancer l’affaire « Pétrole contre nourriture » et faire chanter  des personnalités étrangères – ne trompe pas les Irakiens qui savent que  l’argent du pétrole engraisse les comptes bancaires ouverts dans des  paradis fiscaux par les politiciens et les chefs de milices parvenus au  pouvoir en 2003.
Notes :
(1) Iraq : le manque de fonds menace la distribution de l’aide alimentaire : http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp ?NewsID=22456&Cr=Iraq&Cr1=
(2) L’Irak est un des quatre pays les plus corrompus au monde, selon l’ONG Transparency International (rapport 2009).
(3) Lire : Sarkozy et le commerce  franco-irakien / Arnaques et pièges en tous genres :  http://www.france-irak-actualite.com/pages/Sarkozy_et_le_commerce_francoirakien_avril_2009-1982461.html
(4) Irak : quand le pétrole assure des  revenus juteux :  http://www.leblogfinance.com/2010/07/irak-quand-le-petrole-assure-des-revenus-juteux.html 
Gilles Munier
CAPJPO-EuroPalestine