Talila Kosh - New Profile
          De Talila Kosh, animatrice de New Profile, ONG israélienne qui  se bat pour une "démilitarisation" de la société civile israélienne. NP  soutient notamment les refuzniks, les anarchistes contre le mur et sont  très actives dans le collectif israélien "women4peace".         
 Le vendredi 23 juillet, nous, une douzaine de femmes juives israéliennes  sommes sorties de Cisjordanie avec une douzaine de femmes  palestiniennes, un bébé, et trois enfants. Nous avons déjeuné au  restaurant, nous sommes baignées dans la mer et avons joué sur la plage.  Nous sommes reparties en traversant Jérusalem et avons contemplé la  Vieille Ville de loin. La plupart de nos amies palestiniennes n’avaient  jamais vu la mer, ni, de toute leur vie, jamais prié dans leurs lieux  saints. Leurs regards se sont longuement posé sur eux du haut du Mont  Scopus.
Aucune d’entre elles n’avait d’autorisation de passage  des autorités israéliennes. Nous leur avons fait passer le check-point  dans nos voitures privées, violant délibérément la Loi d’Entrée en  Israël. Cela, nous l’avons fait dans les traces d’Ilana Hammerman, après  que l’Etat ait émis une plainte envers elle, ainsi que la Police  israélienne, à la suite d’une sortie équivalente qu’elle avait faite  avec trois jeunes femmes palestiniennes. Nous avons décidé d’agir dans  l’esprit de Martin Luther King et avons ainsi symbolisé notre refus de  lois illégitimes et immorales.
Nous ne pouvons reconnaître aucune légalité à la "Loi  d’Entrée en Israël", loi qui autorise tout Israélien et tout Juif à se  mouvoir librement dans les régions situées entre la Méditerranée et le  Jourdain, tout en refusant ce droit aux Palestiniens. On leur interdit  tout libre mouvement dans les territoires occupés et ils ne sont pas  autorisés à visiter les villes et cités de l’autre côté de la Ligne  verte, où sont pourtant profondément enracinées leurs familles, leur  nation et leurs traditions.
En conséquence, nous avons suivi notre conscience et  décidé d’amener ces femmes à quelques uns de ces lieux. Nous avons  toutes pris ce risque ensemble avec un esprit clair et résolu. Ainsi,  nous, femmes israéliennes, avons eu le privilège d’expérimenter un des  plus beaux et des plus émouvants jours de notre vie : rencontrer des  femmes palestiniennes courageuses aimant la vie et la joie de vivre, et  ensemble, avec elles, être des femmes libres, même si ce n’était que  pour un jour.
Nous n’avons pas emmené avec nous des "terroristes" ou  des ennemies, mais des êtres humains. Les autorités nous ont séparées de  ces femmes par des barrières et des checkpoints, des lois et des  règlements. Pas pour sauvegarder notre sécurité mais pour perpétuer l’  hostilité et le contrôle de terres prises illégalement à leurs  propriétaires, à l’encontre des conventions internationales et des  valeurs universelles des droits de l’Homme, justice et humanité.
Ce n’est pas nous qui violons la loi : l’Etat d’Israël  le fait depuis des décennies. Ce n’est pas nous - femmes soucieuses de  démocratie- qui avons transgressé : c’est l’Etat d’Israël qui le fait,  nous entraînant dans l’abîme.
Henry David Thoreau, dans son célèbre essai "La désobéissance civile" (1845) écrit : "Quand  le sixième de la population d’une nation prétendant être un refuge de  liberté s’avère être esclave, et lorsqu’un pays entier est injustement  envahi et conquis par une armée étrangère, mis sous la coupe de lois  militaires, alors je pense qu’il est temps pour les hommes honnêtes de  se rebeller et de faire la révolution. Ce qui rend ce devoir encore plus  urgent est le fait que le pays ainsi dominé n’est pas nôtre, mais ce  qui est nôtre c’est l’armée d’invasion."
Entendez ces mots, voyez comment ils décrivent de façon adéquate notre situation ici et maintenant- et faites comme nous.
                25 août 2010 - sur UJFP