Brahim Senouci
Il est facile de condamner Israël.  Incontestablement, c’est lui qui a le doigt à la détente. Mais ceux,  Européens, Etatsuniens, ainsi que leurs valets arabes chargés de les  relayer, qui lui assurent l’impunité sont aussi coupables que lui.
L’attaque menée par des  commandos israéliens contre des humanitaires révulse le monde entier.  L’indignation n’a qu’un temps, malheureusement. Le massacre méthodique  mené par l’armée israélienne en décembre 2008 et janvier 2009 semble  bien loin. Depuis ce massacre, Israël a intégré l’OCDE et mène des  négociations avec l’Union Européenne pour mettre en œuvre le processus  de rehaussement de l’Accord d’Association qui lie déjà les deux parties.
Il faut noter que cet Accord avait fait l’objet d’une  résolution du Parlement Européen en avril 2002, résolution qui appelait à  sa suspension pour cause de non respect par la partie israélienne de  son article 2, relatif au respect des droits de l’homme. Cette  résolution a été ignorée par le Conseil de l’Union Européenne, instance  qui rassemble les représentants des gouvernements nationaux. De la même  manière, le Parlement a voté en octobre 2008, soit avant l’attaque de  Gaza, une résolution appelant à l’ajournement du rehaussement de  l’Accord. Cette résolution a subi le même sort que celle de 2002. Il  aura fallu la tragédie du massacre de 1500 personnes, dont des centaines  d’enfants, pour que les gouvernements de l’Europe consentent à différer  la procédure.
La liste des violations commises par Israël est bien  trop longue pour être rappelée ici. L’Avis de la Cour Internationale de  Justice, émis le 9 juillet 2004 après son adoption par 14 des 15 juges  qui la composent, récapitule l’essentiel de ces violations et appelle  notamment à la destruction du Mur et au dédommagement des populations  qui en ont subi les effets funestes. Le 20 juillet 2004, l’Assemblée  générale des Nations unies a adopté la résolution ES-10/15, après avoir  pris acte de l’avis consultatif de la Cour internationale de justice. La  résolution « exige qu’Israël, puissance occupante, s’acquitte de ses  obligations juridiques telles qu’elles sont énoncées dans l’avis  consultatif ». Il faut noter que la résolution a été votée par les pays  membres de l’Union Européenne, ce qui leur faisait théoriquement  obligation d’agir pour faire cesser les violations.
On connait la suite… Plutôt que de sanctionner, l’Union  Européenne et ses Etats membres n’ont cessé de dispenser des récompenses  à l’Etat d’Israël.
Que dire de la politique des Etats-Unis, de son  alignement sur leur allié, de son acharnement à peser de tout le poids  de la puissance étatsunienne sur les Palestiniens pour leur demander des  concessions, sans cesse ? Ce n’était donc pas suffisant d’accepter que  leur patrie historique soit perdue à près de 80 %. Ce n’était donc pas  suffisant qu’ils acceptent de négocier le sort des millions de réfugiés  qui croupissent dans les camps. Ils n’auront donc jamais avalé  suffisamment de couleuvres pour trouver grâce aux yeux de l’Europe et  des Etats-Unis.
Il est facile de condamner Israël. Incontestablement,  c’est lui qui a le doigt à la détente. Mais ceux, Européens,  Etatsuniens, ainsi que leurs valets arabes chargés de les relayer, qui  lui assurent l’impunité sont aussi coupables que lui. Ils participent de  manière égale à la destruction de la société palestinienne. Ils en sont  comptables.
C’est à ce titre que le Tribunal Russell sur la  Palestine a choisi de juger les complices de la politique israélienne.  Ses membres considèrent en effet que la culpabilité israélienne est  établie sur la base d’une littérature abondante dont le morceau de choix  est l’Avis de la Cour Internationale de Justice. Le vrai problème est  donc, non pas d’identifier l’auteur des violations mais d’examiner les  raisons pour lesquelles il n’encourt aucune sanction.
La première session du Tribunal Russell sur la Palestine  s’est tenue à Barcelone. Elle avait pour objet l’examen des  responsabilités de l’Union Européenne et des Etats membres dans la  permanence de la tragédie palestinienne. Elle s’est ouverte par un  rappel des violations israéliennes. Le jury a ensuite écouté des experts  et des témoins de haut rang, connus pour leurs compétences et leur  probité. Il a considéré dans ses conclusions comme étant établies les  responsabilités des institutions incriminées.
Trois autres sessions sont programmées. La prochaine  aura lieu à Londres en octobre 2010. Elle se penchera sur les  responsabilités des sociétés multinationales. Les suivantes se tiendront  aux Etats-Unis et en Afrique du Sud dans le courant de l’année 2011.
Nous avons expérimenté très largement durant des  décennies l’incurie de la bien mal nommée "communauté internationale".  Elle s’est révélée non seulement incapable de contraindre Israël à se  plier au droit mais encore elle l’a arrosé de ses bienfaits. Il n’y a  donc pas d’issue institutionnelle à la tragédie que vivent les  Palestiniens. Nous savons toutefois que l’opinion internationale est en  leur faveur, parce que la justice est de leur côté. C’est ce levier  qu’il faut actionner et c’est ce que s’efforce de faire le Tribunal  Russel. Ses conclusions seront régulièrement livrées aux peuples afin  qu’ils astreignent leurs gouvernements à les entendre et à les mettre en  application.
Voilà pourquoi il faut rejoindre le Tribunal Russell sur  la Palestine et le soutenir, moralement et financièrement !
Brahim SENOUCI est membre du Comité Organisateur  International du Tribunal Russell sur la Palestine