Le ministre israélien de la défense a confirmé que 
l’opération militaire pour "éradiquer le Hamas" a comme objectif de 
prendre le contrôle des réserves de gaz de Gaza.
- Un jeune palestinien tente de récupérer quelques affaires dans les ruines de sa maison - Photo : MEE/Mohammed Asad
 
Hier, Moshe Ya’alon, actuel ministre israélien de la Défense et 
ancien chef d’état major des Forces de Défense Israéliennes a annoncé 
que l’Opération "Coussin de protection" était le début d’une large 
offensive contre le Hamas. L’opération "ne va pas durer seulement 
quelques jours" a-t-il dit, "nous nous préparons à étendre l’opération 
de toutes les manières possibles pour continuer à frapper le Hamas."
Ce matin, il a ajouté :
"Nos frappes continuelles causent de lourdes pertes au Hamas. Nous 
détruisons des armes, des infrastructures terroristes, des systèmes de 
commande et de contrôle, des institutions du Hamas, des bâtiments du 
régime, des maisons de terroristes et nous tuons des terroristes dans 
les différents niveaux de commande… La campagne contre le Hamas 
s’étendra dans les jours prochains et l’organisation paiera un lourd 
tribut."
Mais en 2007, un an avant l’opération "plomb fondu", ce qui 
préoccupait Ya’alon, c’était les 40 milliards de m3 de gaz naturel, 
évalués à environ 3 milliards d’euros, découverts en 2000 au large de 
Gaza. Ya’alon rejetait l’idée que "le gaz de Gaza puisse devenir le 
vecteur d’un état palestinien viable au plan économique" comme étant 
"erronée". Le problème selon lui était que :
"La  vente du gaz palestinien à Israël n’engendrera pas assez de 
richesse pour profiter à une population palestinienne très appauvrie. 
Par contre, si l’on en juge par le passé, elle permettra de financer 
d’autres attaques terroristes contre Israël…
Une transaction sur le gaz avec l’Autorité Palestinienne [AP] devra, 
par définition, inclure le Hamas. Soit le Hamas pourra bénéficier des 
revenus engendrés, soit il sabotera le projet en lançant des attaques 
contre le Fatah, les installations de gaz et Israël – ou contre les 
trois à la fois… Il est clair que sans une opération militaire 
d’envergure pour mettre fin au contrôle du Hamas sur Gaza, on ne pourra 
procéder à aucun forage sans l’accord du mouvement islamique radical.."
L’opération "plomb fondu" n’a pas réussi à anéantir le Hamas, par 
contre elle a pris la vie de 1387 Palestiniens (dont 773 civils) et de 9
 Israéliens (dont 3 civils).
Depuis la découverte de pétrole et de gaz dans les Territoires 
Occupés, la compétition pour les ressources s’installe de plus en plus 
au cœur du conflit, à cause, surtout, des problèmes énergétiques 
croissants d’Israël.
Selon Mark Turner, le fondateur de Research Journalism Initiative, le
 siège de Gaza et la pression militaire qui s’en est suivie avaient pour
 but "d’éliminer" le Hamas en tant que "entité politique viable à Gaza" 
 pour induire un "climat politique" favorable à un accord sur le gaz. 
Cela impliquait de réhabiliter le Fatah vaincu, d’en faire le principal 
acteur politique en Cisjordanie et de "rééquilibrer le rapport de force 
entre les deux camps en armant les forces loyales à Abbas et en 
recommençant à lui octroyer une aide financière ciblée."
Les propos de Ya’alon de 2007 montrent que le cabinet israélien n’est
 pas seulement préoccupé par le Hamas – mais par le fait que si les 
Palestiniens parviennent à exploiter leurs gisements de gaz, la 
transformation économique qui en résultera pourrait alors augmenter 
considérablement leur pouvoir.
Israël a fait plusieurs découvertes successives d’importance ces 
dernières années – comme par ex. le gisement Leviathan estimé à 453 
milliards de m³ –  qui pourrait faire passer le pays d’importateur 
d’énergie à exportateur potentiel d’énergie avec l’ambition de livrer 
l’Europe, la Jordanie et l’Égypte. Le problème est que la plus grande 
partie des 3 450 milliards de mètres cubes de gaz et des 1,68 milliard 
de barils de pétrole du Bassin du Levant se trouve dans des eaux 
territoriales disputées par Israël, la Syrie, le Liban, Gaza et Chypre.
En plus de ces luttes régionales pour le gaz, Israël doit faire face à
 ses propres défis énergétiques, souvent méconnus. Ce ne sera sans doute
 pas avant 2020, par exemple, que le pays parviendra à mobiliser 
correctement la plus grande partie de ses ressources nationales.
Mais c’est seulement la partie émergée de l’iceberg. En 2012, dans 
une lettre  – que le gouvernement israélien a gardée secrète– deux 
responsables scientifiques du gouvernement israélien ont prévenu le 
gouvernement que Israël, malgré toutes ses extraordinaires découvertes, 
n’avait pas encore la capacité d’exporter du gaz. Selon Ha’aretz, la 
lettre précisait que les ressources nationales israéliennes étaient de 
50% inférieures à ce qui serait nécessaire pour procéder à des 
exportations dignes de ce nom et qu’en plus elles pourraient diminuer 
avec les années :
"Nous pensons qu’Israël aura augmenté sa consommation [nationale] de 
gaz naturel en 2020 et ne devrait donc pas exporter de gaz. Les 
estimations de l’Autorité de gaz Naturel sont inexactes. Il y a un fossé
 de 100 à 150 milliards de mètres cubes entre les projections de 
consommation qui ont été présentées au Comité et les projections plus 
récentes. Les réserves de gaz dureront sans doute moins de 40 ans !"
Comme Dr Gary Luft - un conseiller du Conseil de Sécurité de 
l’Energie Etasunienne - l’a écrit dans le Journal de la Sécurité 
Energétique, "avec l’accélération de la diminution des ressources 
nationales de gaz et sans une augmentation rapide des importations 
égyptiennes de gaz, Israël pourrait être confronté à une crise 
énergétique dans les années qui viennent... Si Israël veut pouvoir 
poursuivre ses projets de gaz naturel, il doit diversifier ses sources 
d’approvisionnement. "
Les nouvelles découvertes nationales d’Israël ne permettent pas de 
solutionner le problème dans l’immédiat parce que les prix de 
l’électricité ont atteint des records, ce qui accroît encore la 
nécessité de diversifier les approvisionnements. Ces problématiques sont
 la raison pour laquelle le premier ministre Netanyahou a déclaré le 11 
février qu’il était temps de conclure un accord sur le gaz avec Gaza. 
Mais lorsqu’un nouveau cycle de négociations a été entamé avec 
l’Autorité Palestinienne, en septembre 2012, le Hamas a été exclu, et 
par conséquent il a rejeté l’accord comme illégitime.
Au début de l’année, le Hamas a condamné l’accord que l’AP avait 
conclu avec Israël pour lui acheter 845 millions d’euros de gaz 
provenant du gisement Leviathan sur les 20 années qui suivront la mise 
en service du gisement. Simultanément, l’AP a rencontré plusieurs fois 
le British Gas Group pour exploiter les gisements marins de Gaza, mais 
en excluant le Hamas –  et donc les Gazaouis – du processus. Ce plan est
 le bébé du délégué du Quartette du Moyen Orient, Tony Blair.
Mais l’AP a aussi sollicité la compagnie russe Gazprom pour la même 
chose et des entretiens ont eu lieu entre la Russie, Israël et Chypre, 
sans qu’on sache au juste ce qu’il en est sorti. On ne sait pas non plus
 comment l’AP se propose de contrôler Gaza qui est gouverné par le 
Hamas.
Selon Anais Antreasyan, du Journal des Études Palestiniennes de 
l’Université de Californie, la revue de langue anglaise la plus 
respectée de toutes celles qui traitent du conflit arabo-israélien, 
l’étranglement israélien de Gaza a pour but de rendre "impossible 
l’accès des Palestiniens aux puits Marine-1 et Marine-2." Le plan à long
 terme d’Israël "consiste non seulement à empêcher les Palestiniens 
d’exploiter leurs propres ressources, mais aussi à intégrer les 
gisements de gaz de Gaza dans les installations de forage en mer 
israéliennes adjacentes." Tout cela fait partie d’une plus large 
stratégie consistant à :
"…. séparer les Palestiniens de leur terre et de leurs ressources 
naturelles pour les exploiter et ainsi bloquer le développement de 
l’économie palestinienne. En dépit de tous les accords formels 
impliquant le contraire, Israël continue à gérer toutes les ressources 
naturelles qui sont nominalement sous la juridiction de l’AP, que ce 
soit l’eau, la terre, la mer ou les ressources en hydrocarbures.."
Pour le gouvernement israélien le Hamas continue d’être le principal 
 obstacle à la finalisation  de l’accord gazier. Comme le dit le 
ministre en exercice : "Notre expérience de la période d’Oslo nous a 
appris que les profits du gaz palestinien seraient sans doute utilisés 
pour financer le terrorisme contre Israël. Le Hamas n’est pas la seule 
menace… Il est impossible d’empêcher un groupe terroriste palestinien ou
 un autre de profiter peu ou prou de la manne gazière."
La seule option, par conséquent, est une nouvelle "opération militaire pour éradiquer le Hamas."
Malheureusement pour l’armée israélienne, anéantir le Hamas passe par
 la destruction de ce qui est perçu comme la base civile du groupe – et 
c’est pourquoi les victimes civiles palestiniennes sont infiniment plus 
nombreuses que les victimes israéliennes. Les deux camps ne valent pas 
mieux l’un que l’autre, mais la capacité de destruction d’Israël est 
simplement beaucoup plus grande.
Après l’opération "plomb fondu", le Comité Public contre la Torture 
en Israël (PCATI) de Jérusalem a découvert que l’armée israélienne avait
 adopté une doctrine de combat plus agressive basée sur deux principes –
 "zéro perte" pour les soldats israéliens même si cela nécessitait de 
tirer tous azimuts dans des zones fortement peuplées et la "doctrine 
dahiya" qui prône le bombardement des infrastructures civiles pour 
infliger de grandes souffrances à la population et les inciter à se 
révolter contre les opposants à Israël.
Cela a été confirmé dans les faits par la mission d’enquête 
diligentée par l’ONU à Gaza qui est arrivé à la conclusion que l’armée 
israélienne avait "délibérément fait un usage disproportionné de la 
force", contre les "infrastructures de soutien" de l’ennemi - 
"l’expression semble désigner la population civile", précise le rapport 
de l’ONU.
Les ressources ne sont pas la seule cause du conflit 
israélo-palestinien. Mais à une époque où l’énergie renchérit, la 
compétition pour le contrôle des énergies fossiles régionales influence 
de plus en plus des décisions qui ont le potentiel de déclencher une 
guerre.
http://www.theguardian.com/environm...
Traduction : Info-Palestine.eu - Dominique Muselet
http://info-palestine.net