Prison de Gilboa - Une année est passée depuis mon emprisonnement, une année très longue.         
Mais qu’est-elle comparée aux trois décennies que  beaucoup de prisonniers palestiniens ont vécues et qu’ils continuent de  vivre dans les prisons israéliennes ? Aucune comparaison pourtant ne  doit être faite entre les militants palestiniens, ni entre les peines  que leur infligent des juges qui ne sont après tout que des instruments  au service de l’oppression. Ces peines sont toutes injustes et cruelles,  car leur seul but est de nous subjuguer par la terreur. Mais il faut  toujours garder à l’esprit une chose essentielle : quelle que soit leur  durée, elles passent.
Ce qui se passe en Palestine  obéit à une loi inexorable : à mesure qu’ils intensifient le terrorisme  d’Etat et son cortège de persécutions et de déportations, notre  détermination  dans la lutte devient plus forte et plus ferme. Aucune  force ne pourra arrêter la lutte que nous menons pour rester sur cette  terre, pour préserver notre identité et restaurer les droits dont nous  avons été spoliés. Ils voudraient réduire notre cause en des fragments  épars qui obéissent à leurs décrets, mais nous, le Peuple Palestinien,  sommes en train de nous relever plus forts que jamais, conscients que  notre cause est une et indivisible.
Ils sont enfermés dans la reproduction de l’oppression  alors que nous produisons sans cesse la liberté, la liberté du peuple et  de la patrie, capable de briser leur cercle vicieux et de faire de  leurs actions de simples réactions aux nôtres. Que nous soyons dans  notre patrie ou en exil, notre droit à la Palestine est un : le retour chez nous,  l’autodétermination, la fin de l’occupation, la libération des  prisonniers, le recouvrement des terres volées, le démantèlement des  colonies et du mur d’apartheid, la préservation de Jérusalem, du Néguev  et de la Galilée de la côte des entreprises d’expulsion et de  judaïsation, la fin du blocus de Gaza. Toutes ces cause ne font qu’une.
La machine de répression israélienne découle de  l’essence même de l’Etat d’Israël et conditionne le système et  l’ensemble des lois de cet Etat : la justice, l’éducation,  l’enseignement supérieur, l’aménagement, la législation, ainsi que les  institutions sécuritaires. Tous ces outils sont à la disposition d’un  seul système central, d’un centre politique unique et d’une seule nature  répressive, raciste et coloniale.
On peut envisager d’utiliser ce système, chaque fois que  cela est possible, mais on ne peut pas trop y compter ni se faire  d’illusions. L’expérience nous a enseigné que le seul moyen d’atteindre  nos objectifs et de recouvrer nos droits est la lutte. C’est uniquement  par notre combat que les prisonniers seront libérés. Les règles  israéliennes de ce jeu répressif ne seront remises en cause et nous ne  pourrons nous libérer que par la lutte populaire et internationale.
Sans doute que le prix à payer sera élevé, tant au  niveau personnel et familial qu’institutionnel. Mais la détermination  d’un captif libre prouve que ce qui le guide, c’est sa propre liberté et  celle de tous les prisonniers, c’est son refus de reconnaître toute  légitimité aux tribunaux de l’occupant car ceux-ci, garnis de juges  pantins costumés et beaux parleurs, n’usurpent le nom de « tribunaux »  que pour mieux servir l’institution sécuritaire dont ils ne sont qu’une  simple extension. Ce sont précisément ces juges-là qui sont, non pas  libres mais bien les prisonniers de l’Institution, de la sécurité et des  concepts sécuritaires. Ils se situent à l’opposé des valeurs de la  justice. Ce sont des prisonniers assoiffés de revanche.
Il faut dire que notre lutte pour la libération n’est  pas menée uniquement par nous, les Palestiniens, elle est fortement  appuyée par les révoltes dans le monde arabe et le mouvement BDS à  l’échelle de la Planète. Ces actions ne sont rien d’autre que le  prolongement du mouvement palestinien visant à priver le régime colonial  raciste de toute légitimité, à l’isoler, à nous conforter nous-mêmes et  à restituer le droit palestinien.
Au nom du mouvement des prisonniers, je dois mettre en  garde contre les dangers de la soi-disant coordination sécuritaire  entre, d’une part, Israël et, d’autre part, des Palestiniens et autres  parties arabes quelles qu’elles soient. Les victimes d’une telle  coordination ne sont autres que les combattants et les prisonniers de la  liberté, ainsi que les combattants Palestiniens et Arabes pour la Palestine.  Nous appelons les peuples arabes à mettre fin à la complicité de  certains régimes arabes avec Israël, complicité qui se traduit par la   compromission dans cette soi-disant coordination. Nous appelons, dans ce  sens, au lancement d’une vigoureuse campagne arabe et palestinienne.
 Passer une année en prison est un prix très élevé à  payer à un ordre oppresseur mais la volonté libératrice de notre peuple a  réussi à faire de cette année une année de résistance, de défi et de  lutte. Je transmets ici un message de gratitude et d’amour à tous ceux  qui activent en vue de ma libération et notamment au comité populaire  pour ma défense ainsi qu’au Comité Populaire pour la Défense des  Libertés Politiques lequel a lancé une campagne pour ma libération dès  le moment de mon arrestation. Depuis ma cellule, j’envoie mon affection à  ma famille laquelle m’a toujours entourée de son amour et de son  soutien ainsi qu’à tous ceux qui soutiennent notre cause, individus ou  organisations, qu’ils soient ici ou à l’étranger.
Ces gens sont constamment en contact avec nous. Ce sont  nos compagnons dans notre lutte pour la Libération.  Ce que nous nous  voulons, nous mouvement des prisonniers politiques, n’est pas de compter  les années qui passent en détention mais de conquérir la liberté. Cette  liberté est accessible car les humains sont nés libres, elle est un  droit et on a le devoir de la faire valoir.
Le 15 mai, nous avons commémoré le 63ème anniversaire de  la Nakba palestinienne, Nakba que nous vivons encore. Notre force a  toujours pour sources la justesse de notre cause et le caractère  inaliénable de nos droits. Ceux-ci ne peuvent être réalisés que par la  lutte. Lutter pour notre libération ainsi qu’œuvrer en vue de nous bâtir  nous-mêmes et de bâtir nos institutions sont pour nous un droit et un  devoir. Le prix à payer, qu’il soit individuel ou collectif, est  douloureux, mais il ne nous détournera jamais de notre objectif de la  libération de l’individu, du peuple et de la terre.
Leur domination quant à elle, quelle que soit sa durée,  passera alors que notre liberté est inscrite dans le mouvement même de  notre destinée.
25 mai 2011 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à : 
http://electronicintifada.net/conte... - Traduction : Najib Aloui