Marc Henry
Le 51e veto de Washington à une résolution condamnant Israël n’a été consenti qu’à contrecœur par Obama .
À Jérusalem
« C’est un succès qui risque de nous coûter très  cher » : commentateurs et diplomates tiraient dimanche un bilan plutôt  amer du veto imposé par les États-Unis ce week-end au Conseil de  sécurité de l’ONU. Comme le souhaitait le gouvernement de Benyamin  Nétanyahou, les  Américains ont refusé de condamner la poursuite de la colonisation  israélienne en Cisjordanie et dans la partie arabe de Jérusalem, où  s’est installé un demi-million d’Israéliens. Après cette « victoire »,  personne n’a cru bon de pavoiser dimanche à Jérusalem. Au contraire, l’heure était plutôt aux interrogations sur le prix politique à payer, tant Barack Obama a fait comprendre combien il avait agi à contrecœur dans cette affaire.
« C’était le 51e veto imposé par les États-Unis à une résolution anti-israélienne à l’ONU, mais cela  pourrait être le dernier, car les Américains sont fatigués de nous  défendre à propos d’une politique de colonisation qu’ils condamnent »,  prévoit Alon Pinkas, ancien consul général d’Israël à New York. Une  analyse également entendue sur la radio militaire. « À cause de nous,  les Américains se sont retrouvés totalement isolés, les 14 membres du  Conseil de sécurité votant contre eux, une situation qu’ils détestent  par-dessus tout », a ajouté la commentatrice en relevant les « critiques  très dures » lancées par Susan Rice, la représentante américaine à  l’ONU, dans son discours contre la colonisation. Autrement dit, les  Américains ont voté contre un texte avec lequel ils étaient  fondamentalement d’accord.
Enfoncer le coin
Dany Gillerman, ancien ambassadeur d’Israël aux Nations unies,  a plaidé une demi-culpabilité en soulignant que le refus des  Palestiniens du moindre compromis était à l’origine de ce veto  américain. Il reconnaît toutefois qu’Israël est « désormais en comptes  avec Washington ». Dore Gold, lui aussi ex-représentant de l’État hébreu à l’ONU et proche de Benyamin Nétanyahou, admet  que la colonisation constitue un « dossier très difficile à plaider »,  et ce d’autant plus que le premier ministre et le président américain  sont en froid. L’an dernier, Benyamin Nétanyahou avait refusé d’imposer  un gel de six mois à la construction de logements dans les colonies de  Cisjordanie. Barack Obama avait pourtant mis tout son poids dans la  balance pour obtenir ce « geste de bonne volonté », censé permettre une  reprise des négociations avec les Palestiniens, gelées depuis des mois.  Autre signe du malaise : le président américain n’a pas éprouvé le  besoin de consulter Nétanyahou ni avant ni après la chute de Hosni  Moubarak, alors que le traité de paix entre Israël et l’Égypte est  considéré, tant à Washington qu’en Israël, comme un test essentiel pour  juger du nouveau pouvoir en place au Caire.
Les Palestiniens sont bien décidés à enfoncer le coin en  poursuivant leur campagne anticolonisation devant l’Assemblée générale  des Nations unies, avec à la clé l’espoir de sanctions contre Israël -  sans que les Américains puissent cette fois imposer leur veto. Ce  programme s’intègre au projet de Salam Fayyad,  le premier ministre palestinien, qui veut jeter les bases d’un État  indépendant, dont l’existence pourrait être reconnue par presque toute  la communauté internationale, en septembre.