Publié le 8-01-2011
Les tribulations du Messie arrivant en Israël. Un texte désopilant et pas vraiment surréaliste de Bradley Burston, publié par Haaretz. Merci à Carole Sandrel pour la traduction.
Quand le Messie viendra, Israël l’expulsera
Quand le Messie viendra, la Droite le mettra en croix. Im Tirzu (NdT : mouvement ultra sioniste) déroulera des banderoles et collera des affiches le montrant avec une queue et des cornes.
Quand le Messie viendra, on l’emmènera dans une petite salle froide avec des murs blanchâtres, avec une chaise en métal gris de part et d’autre d’un bureau métallique.
Quand le Messie viendra, il sera interrogé par un jeune officier du Shin Beth, et par un officier du ministère de l’Intérieur qui a obtenu son job grâce à son cousin, inspecteur de rituel alimentaire et de fabrication dans une boulangerie-pâtisserie, qui a obtenu son job grâce au beau-frère de sa soeur, troisième assistant du vice-président du Shas à Ramla.
Quand le Messie viendra, personne ne s’en apercevra.
Son âne, qui est blanc et se nomme Snowpea, lui sera confisqué et mis au secret dans un local humide de la police qui jouxte la station de chemin de fer de Lod. Il n’y aura pas de paperasses administratives. A la nuit tombée, il aura disparu, dissous dans un camion bâché par le gardien du lieu, qui après son travail conduira l’âne dans un moshav (village) L’argent changera de main, l’âne aussi, quatre fois, jusqu’à ce qu’il soit vendu par des colons à des Palestiniens, dont les terres, pour certains d’entre eux, se trouvent désormais à l’intérieur du mur de la colonisation.
Quand le messie viendra, le premier geste envers lui sera un ordre d’arrestation.
Un rapport codé, sur un site web très influent sera fabriqué pour disparaître. Il réapparaîtra sur un blog de Seattle puis dans le Guardian. Le gouvernement différera sa réponse et finalement publiera une déclaration qu’on attribuera à des sources à Jérusalem, disant : « Nous n’avons pas connaissance de cette histoire ». L’armée israélienne de défense citant un ancien militaire anonyme, déclarera qu’il n’y a pas de preuve qu’un Messie, quel qu’il soit, soit arrivé. Elle atténuera plus tard son démenti en disant qu’elle vérifie le rapport et elle dirigera les journalistes sur le Ministère de la Défense, qui les renverra vers le bureau du Premier ministre, qui n’aura pas de commentaire à faire.
Quand le Messie viendra, les rabbins le traiteront comme Jésus.
Ils le stigmatiseront, le traitant de perfide, malade, sacrilège.
Sur les affiches, dans les sermons du Sabbat, les décrets rituels et les pétitions, on fera attention à ne pas utiliser son titre, les chefs rabbins des villes et villages mettront en garde contre la menace existentielle dirigée contre le caractère essentiellement juif de l’Etat. En aucun cas, les Juifs ne doivent vendre ou louer des maisons ou des biens à des gens comme ça. Les épouses de rabbins le diffameront, l’accusant de menacer la vertu (la chair) des filles juives.
Les déclarations des rabbins diviseront le peuple juif et amèneront colère et opprobre sur Israël. Les rabbins continueront à verser d’énormes salaires pour rémunérer des services civils, et des gratifications en cash, en marchandises et en dessous de tables non déclarés.
Quand le Messie viendra, la Droite le mettra en croix Im Tirzu brandira des banderoles et collera des affiches le montrant avec une queue et des cornes. Un bloggueur de Commentary le traitera de pleurnichard et de nigaud irritable. Dans le Ma’ariv et le Jérusalem Post, sept éditorialistes en l’espace de trois jours s’en prendront à lui. Un observateur d’une ONG fera appel à collecte pour démasquer l’origine de ses financements.
Quand le Messie viendra l’Occupation cessera.
Mais avant ça, un réseau social global dirigé par la Coalition Juive Républicaine, Fox News, l’Organisation Sioniste d’Amérique et Daniel Pipes (journaliste américain spécialiste du Moyen Orient), lancera une campagne pour démontrer que le Messie est un Musulman.
Quand le Messie sera mis en croix, l’armée démentira qu’il ait jamais été là, à notre époque.
Quand le Messie viendra, un parti politique israélien dont les électeurs sont eux-mêmes constamment caricaturés par les israéliens « de souche » comme étant des débauchés et des non-juifs, proposera une loi déclarant que c’est un délégitimeur d’Israël et de l’armée (à cause de la mise en croix), un blasphémateur du sionisme (pour avoir déclaré que les Palestiniens n’étaient pas les seuls obstacles à la paix) et visant à le rendre inéligible à la citoyenneté à moins qu’il ne signe un serment de loyauté, disant que même si Israël a pratiqué la crucifixion, il l‘a fait d’une manière démocratique et juive.
Les conseillers de Michael Ben-Ari, député de la Knesset, ainsi que les fans de l’équipe de foot Beiter Jerusalem, ouvriront une page sur FaceBook titrée « Mavet, l’Mashiah » - (Mort au Messie).
Quand le Messie viendra, les Etats-Unis lui donneront un statut de réfugié, autorisé à demander asile, mais enfermé dans un camp de détention, dans la zone 51 d’Israël, proche des installations nucléaires de Dimona où un juge le piégera en lui faisant signer un document illisible qui hâtera son expulsion vers le Tchad.
Au moment où le Messie quittera l’Etat juif, il sera trop heureux de partir."
Par Bradley Burston
(Traduit par Carole SANDREL pour CAPJPO-EuroPalestine)
CAPJPO-EuroPalestine