Antoine Raffoul
Intifada Palestine
Intifada Palestine
          Une lecture récente d’un ancien article écrit par le défunt  Edouard Said, auteur palestinien bien connu, écrivain et critique  culturel, m’a révélé une exceptionnelle réunion à Paris pour y discuter  les questions au coeur du conflit Palestine/Israël.         
Edward Saïd
Les participants étaient les « nouveaux » historiens émergents en Israël (Ilan Pappe, Benni Morris, Itamar Rabinowitch et Zeev Sternhell) et leurs contre-parties de Palestine (Elie Sanbar, Nur Masalha et Saïd lui-même).
Dans son article, Edward Saïd notait que pendant les discussions informelles qui ont eu lieu, le  côté israélien (à la rare exception du professeur Pappe) parlait du  « besoin de détachement, de distance critique et de calme dans la  réflexion », alors que le côté Palestinien était « beaucoup plus  pressant, plus grave et même émotif dans son insistance sur le besoin  d’une nouvelle histoire ».
L’article de Saïd traitait du sujet central de la  réunion : la nécessité de considérer l’histoire du conflit  palestinien/israélien du point de vue palestinien et de mettre en avant  les événements qui ont conduit à la Nakba palestinienne de 1948. En  dépit de la tentative par certains des historiens israéliens d’admettre  que « une injustice’ a pu avoir été commise par les Israéliens en 1948,  l’opinion de la plupart d’entre eux était que c’était « une conquête  nécessaire ». Seul le professeur Pappe a parlé avec une puissante  éloquence, exprimant, selon les mots de Saïd, « une adhésion au point de  vue palestinien et... [fournissant] la plus iconoclaste et la plus  brillante des interventions israéliennes. Oui, les Israéliens à Paris disaient vouloir la paix, mais, non, ils  n’ont pas infligé la responsabilité de la Nakba de 1948 aux Israéliens.
A nouveau, écrit Edward Saïd, à l’exception du  professeur Pappe, le reste des membres du groupe israélien ont montré  « une profonde contradiction, touchant à la schizophrénie qui donne une  idée de leur travail ». Ils ont semblé hésiter « une fois poussés dans  leurs derniers retranchements par Pappe ou par les Palestiniens ».
La réunion de Paris a eu lieu au début du mois mai 1998. L’euphorie d’Oslo était toujours dans l’air et (retenez votre souffle) Benyamin Netanyahu profitait de son premier mandat  comme premier ministre d’Israël (1996-1999). Sous son gouvernement,  Israël contrôlait tous les territoires palestiniens occupés par la force  en 1948, 1949 et 1967 (et pour ceux qui ont besoin d’un rappel, ce qui  représente TOUTE la Palestine historique) ; il disposait de la puissance  militaire la plus formidable dans la région ; il dictait toutes les  règles de l’occupation sur une population civile occupée dans les  Territoires Palestiniens sous Occupation [TPO] et il avait le temps et l’espace à sa disposition.
Allons sept années plus loin, en mai 2005, lorsque George W Bush  prétendait mettre en place un autre processus de paix voué à l’échec  (dans la foulée de son invasion criminelle de l’Irak et de  l’Afghanistan) et que Sharon ouvrait son chemin au bulldozer dans les  Territoires Palestiniens avec son mur de ségrégation.  Le professeur  Pappe a alors écrit un article dévastateur, perspicace, et intitulé : The Palestine Peace Process : Unlearned Lessons of History [Le processus de paix de la Palestine :  Leçons non apprises de l’Histoire]. Cet article se faisait l’écho des  échecs de tous les processus de paix précédents depuis Oslo, mais, de  façon prémonitoire, de l’échec prévisible de tous les processus de paix  qui ont été lancés depuis que son article a été écrit. Beaucoup de  processus, semble-t-il, mais aucune paix.
Dans son article, le professeur Pappe, avec la vision  d’un historien perspicace, avertissait que « à moins que les Etats-Unis  ne commencent à prêter attention aux leçons de l’histoire [lire celle de  1948], cette nouvelle ronde d’entretiens de paix finira non seulement  par un échec, mais les espoirs actuellement soulevés se transformeront à  nouveau en désespoir, en fureur et en une vague renouvelée de violence  et de dévastation ». Nous savons maintenant ce qu’il est advenu de Bush  et de son processus de paix.
Déplaçons-nous rapidement jusqu’à aujoud’hui, en novembre 2010, (douze années et demi après la réunion de Paris), et nous avons à nouveau Benjamin Netanyahu  comme premier ministre, l’occupation illégale des TPO continue  toujours,  avec bien plus de dévastation à travers toutes les terres de Palestine ;  la machine militaire israélienne est tirée vers le haut avec plus  d’arsenaux nucléaires et (retenez encore votre souffle) un nouveau  processus de paix lancé par Barak Obama, le président des États-Unis  avec le vent en poupe (à l’heure de son élection) et jouissant d’un  appui public plus important que celui de n’importe quel président  américain précédent. Mais à peine le processus de paix d’Obama avait-il  été lancé que les sables mouvants du Moyen-Orient ont commencé à  l’étouffer sans pitié.
À travers le paysage palestinien, et particulièrement à  Jérusalem-est sous occupation, se produisent toujours plus de  démolitions de maisons palestiniennes, plus de confiscation de fermes,  d’oliveraies et de vols purs et simples de propriétés privées par les  colons sionistes de droite sous la protection de la loi israélienne et de sa machine, tandis que la communauté internationale regarde et ne fait rien.
Qu’est-ce que tout cela démontre ?
Cela confirme ce que nous avons toujours pensé : que le projet sioniste d’occuper et de s’approprier toute la Palestine  historique était, est et continue d’être l’objectif principal et unique  des dirigeants sioniste en Israël. Pour que ceci se fasse et dans un  effort pour paver la voie d’un tel poids-lourd colonial, les médias  israéliens ont été mis en sommeil et le leadership  militaire israélien s’est fait le seul pourvoyeur d’informations,  fournissant ses versions aseptisées à un public israélien indifférent.
Depuis la réunion de Paris et depuis l’article  prophétique du professeur Pappe, le seul rayon lumineux sortant d’Israël  (et maintenant du Royaume-Uni) reste le ferme et courageux appel de ce  même professeur pour un débat sur la Nakba de 1948. Les autres « nouveaux historiens » réunis à Paris, restent curieusement silencieux et étonnement évasifs sur cette question.
Il est clair pour le lecteur et pour l’observateur  informé sur le conflit israélien/palestinien que rien ne sortira d’un  futur processus prétendant établir une paix juste et durable en Palestine  historique, à moins que la Nakba 1948, le retour des réfugiés  palestiniens et la règle du droit international soient reconnus et servent de base au prochain processus de paix.
En conclusion, il est également évident que les  dirigeants sionistes qui occupent la Knesset israélienne se sont à  présent rendus compte que leur poids-lourd colonial manque de carburant.  Aussi, afin de lui fournir plus de carburant colonialiste, ils ont  sorti de leur chapeau « le serment raciste à la nation juive ». Son  réservoir de secours a été rempli d’un appel à punir tout ceux qui  commémorent la Nakba 1948.
Un nouveau mirage ou une nouvelle réalité ?
5 novembre 2010 - Intifada Palestine - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.intifada-palestine.com/2...Traduction : Nazem