Don Futterman - Haaretz
Nous n’avons pas créé la première Assemblée de Juristes Juifs de  l’histoire pour que la loi soit contournée par délire de vengeance.  
Juste au moment où  commencent les neuf jours de deuil menant à Tisha B’Av [*], la  municipalité de Jérusalem tente d’imposer son Plan Directeur pour  Jérusalem comme Haaretz l’a annoncé le 28 juin. Le Plan comprend un  large programme de développement qui semble avoir pour but de saper le  projet sioniste et de provoquer une dangereuse levée de boucliers.
 Au lieu de réparer des dizaines d’années de négligence  en pourvoyant aux besoins des résidents palestiniens de Jérusalem, le  Plan répond au désir apparent du gouvernement local et national de  déplacer autant d’Arabes qu’il est possible vers les frontières de la  municipalité ; de provoquer le surpeuplement de Jérusalem dans l’espoir  que les Palestiniens quitteront d’eux-mêmes la ville, en construisant de  nouveaux quartiers aux frontières de la ville et en interdisant les  constructions au centre de Jérusalem Est ; et d’accélérer la démolition  de maisons et l’expulsion de leurs habitants.
Le Plan Directeur, le premier en 50 ans, fut élaboré par  la municipalité de Jérusalem dans les dix dernières années afin de  remodeler la ville pour au moins 25 ans. Le Plan doit répondre aux  normes publiques et être approuvé au niveau national par le Comité de  Planification et de Construction du District de Jérusalem avant de  devenir la politique officielle.
Selon un rapport de l’ONG Ir Amin (qui se consacre à  l’Education Publique et qui lutte pour que les besoins des deux peuples  qui partagent Jérusalem soient pris en considération et aussi pour  limiter les dégâts causés par des actions unilatérales), la mise en  oeuvre complète du Plan Directeur ne permettra toujours pas de  solutionner le manque endémique de logements dont souffrent les Arabes  ni de répondre aux prévisions du développement de la population.
 L’application du Plan entraînera aussi, semble-t-il,  des obstacles bureaucratiques insurmontables pour les Palestiniens qui  veulent construire des logements pour faire face aux besoins croissants  de la population. Les habitants de Jérusalem Est, par exemple, auront du  mal à prouver qu’ils sont propriétaires de leurs terres parce que les  Autorités Israéliennes ne tiennent pas de Registre de Terre  Palestinienne. Par ailleurs, leurs bâtiments manquent des fondations  nécessaires pour pouvoir appliquer les directives du Plan qui préconise  de surélever les bâtiments en ajoutant des étages supplémentaires aux  constructions existantes pour augmenter la densité de la construction.
Le projet du Plan de déporter des Palestiniens suggère  que le Plan ne se contente pas de ne pas prendre en compte les besoins  des habitants palestiniens de Jérusalem mais qu’il a des buts plus  inavouables. Il est à la fois l’instrument de la campagne menée par les  colons pour débarrasser la Vieille Ville de sa population arabe et celui  du gouvernement pour éviter que Jérusalem ne devienne un jour la  capitale d’un Etat Palestinien, contrairement aux déclarations pour la  forme en faveur de la solution de deux états.
Nous devons rejeter les Plan Directeur de Jérusalem mais  pas seulement parce que son acceptation a des chances de rendre furieux  les Américains et les Européens et de relancer les campagnes contre  Israël dans le monde entier.
Nous devons le rejeter parce que ce plan et ses  concepteurs sont anti-juifs et anti-sionistes. C’est le produit  d’esprits qui veulent montrer au monde entier qui est le boss à  Jérusalem. Le Plan souille tout ce qu’il touche, de la préservation des  sites historiques juifs à la demande de création de parcs et d’espaces  verts.
Aucun d’entre nous, dans nos synagogues ou nos  mouvements de jeunesse sionistes, n’avons souhaité l’avènement d’une  Jérusalem d’où l’on chasserait les familles arabes pauvres pour  construire un centre touristique bidon ou pour infiltrer des colons  juifs hostiles dans des quartiers palestiniens ou pour construire des  appartements financés par un magnat des casinos qui habite à des  milliers de kilomètres.
Nous n’avons pas créé la première Assemblée de Juristes  Juifs de l’histoire pour que la loi soit contournée pour satisfaire les  délires de vengeance des colons juifs soutenus par les faucons de la  Sécurité qui haïssent les Arabes. Nous n’avons pas rétabli la  souveraineté juive pour que la police juive reçoive l’ordre de taper sur  la tête de quiconque, juif ou non juif, se permet de protester et de  remettre en cause la légitimité des agressions dont sont victimes les  résidents palestiniens comme à Sheikh Jarrah et à Silwan.
Je veux que Jérusalem soit ma capitale, qu’elle soit  reconnue comme telle par le monde entier et je veux qu’elle le demeure  pour toujours. Mais tous les Juifs et les Arabes qui arpentent les rues  de Jérusalem savent que Israël exerce déjà sa souveraineté sur Jérusalem  et a utilisé ce contrôle pour s’assurer que la ville reste aussi  divisée qu’elle l’a toujours été. Il y a une Jérusalem juive et une  Jérusalem arabe et tous les slogans que répètent nos leaders et nos  défenseurs n’y changent rien.
Nous aurions pu développer une vision sioniste de la  Jérusalem de notre temps, un phare juif d’égalité et de respect mutuel  pour toutes les croyances et pour les deux peuples qui vivent ici. Mais  nous avons systématiquement négligé les besoins d’un quart de million de  résidents palestiniens, corrompu notre lutte désespérée pour la  sécurité en nous appropriant des terres, et consacré d’importantes  ressources construire des clôtures pour enfermer la population locale  arabe et empêcher le peuple Palestinien d’entrer.
Au moment où les Juifs du monde entier commémorent la  destruction de Jérusalem et notre expulsion de pays étrangers où nous  étions considérés comme des intrus, il faut s’insurger contre le mal qui  est fait en notre nom sous le prétexte de préserver "notre capitale une  et éternelle". Ne conviendrait-il pas que les rabbins insistent dans  leurs sermons de Tisha B’av sur la nécessité non seulement de nous  souvenir de nos propres souffrances mais aussi de ne pas utiliser cette  souffrance pour justifier le fait qu’à notre tour nous soyons devenus  des oppresseurs et qu’ils nous recommandent de nous opposer en tant que  Juifs à ce que les Palestiniens soient expulsés de leurs maisons ?
Il faut que nous disions au Premier Ministre Benjamin  Netanyahu, au Président des USA Barak Obama et au Comité de  Planification et de Construction du District de Jérusalem que la plupart  des Juifs ne sont pas des colons et ne haïssent pas les Arabes et que  nous ne partageons pas leur façon de voir. Nous croyons que nous pouvons  encore faire de Jérusalem la ville de nos rêves.
* Don Futterman est le  directeur de projet du Fund Moriah en Israël. C’est  une fondation privée américaine dont la mission est de soutenir la  société civile et la démocratie, l’insertion des immigrants et  l’éducation en Israël.
[*] Tisha B’av :  Jour de jeûne commémorant la  destruction du premier et du second temple de Jérusalem
                                  9 juillet 2010 - Haaretz - Vous pouvez consulter cet article  à : 
http://www.haaretz.com/print-editio...
Traduction de l’anglais : Dominique Muselet
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