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jeudi 3 juin 2010

Le raid israélien et les risques d’une guerre dans la région...

Par Scarlett HADDAD | 03/06/2010
Éclairage C'est une belle image de solidarité et d'unité que la classe politique libanaise a présentée hier, lors de la manifestation d'appui aux passagers des six navires de la « flotille de la liberté ». Toutes les parties politiques ont ainsi participé côte à côte à cette manifestation, montrant que lors des grands moments, l'élan de solidarité reste le plus fort. Est-ce le début d'une nouvelle page, maintenant que les échéances électorales sont terminées et que les dossiers urgents de la vie quotidienne se posent au gouvernement ? Les Libanais l'espèrent, mais une fois de plus, les regards sont tournés vers les développements régionaux qui ont atteint ces derniers jours une étape cruciale. Une source palestinienne bien informée estime ainsi que le raid israélien contre la « flottille de la liberté » avait été planifié et Israël cherchait par ce moyen à adresser un message fort au monde et en particulier aux Turcs, dont la politique actuelle est jugée trop pro-arabe. La source palestinienne dresse le tableau suivant : selon elle, Israël a profité de l'embarras causé à l'administration américaine par l'accord signé entre la Turquie, l'Iran et le Brésil sur l'échange d'uranium. Quelque temps auparavant, le président américain avait pourtant envoyé un message à son homologue brésilien pour l'encourager à tenter d'obtenir la conclusion d'un tel accord afin de débloquer l'impasse dans laquelle se débat le dossier nucléaire iranien et les pourparlers entre Téhéran et la communauté internationale. Toujours selon la source palestinienne, l'administration américaine misait sur un refus iranien qui lui aurait permis d'accélérer le processus de l'adoption de nouvelles sanctions contre Téhéran en arguant de son refus de toutes les propositions. Mais, contrairement aux pronostics occidentaux, l'Iran a signé l'accord déjouant les plans destinés à justifier sa condamnation et rendant plus ardue la mission du président Obama de convaincre la Russie et la Chine d'accepter le projet de résolution prévoyant de nouvelles sanctions. Or, la source palestinienne estime que le dossier nucléaire iranien constitue un sujet de divergence entre l'administration américaine et le gouvernement israélien. La première ne souhaite pas en arriver à une attaque militaire alors que le second ne croit pas qu'une solution économique et diplomatique puisse être efficace. Régulièrement, l'administration américaine se voit d'ailleurs contrainte d'adresser des messages forts à l'Iran, non pas tant pour l'effrayer que pour rassurer son allié israélien. D'ailleurs, les récents propos du général américain David Petraus, très fermes à l'égard de l'Iran, s'inscriraient dans ce cadre, selon l'interprétation de la même source palestinienne. Les Américains souhaiteraient donc enlever tout motif aux Israéliens pour qu'ils lancent une attaque en direction de l'Iran, mais les Israéliens ne sont pas rassurés pour autant. Et comme ils ont bâti leur existence dans la région sur la force, ils ont choisi d'utiliser la leur contre la « flottille de la liberté », qui regroupe 350 militants turcs et, par conséquent, ils ont voulu protester indirectement contre la nouvelle politique de la Turquie. La source palestinienne ajoute à ce sujet que dans les milieux diplomatiques, les Israéliens ne cachent pas leur amertume à l'égard des dirigeants turcs et ils leur en veulent bien plus qu'à leurs ennemis traditionnels. Selon l'interprétation de cette source, du point de vue israélien, le raid était une réussite, car le message est parvenu à ses destinataires, Israël a montré qu'il n'hésitait pas à agir lorsque sa sécurité est menacée, et la cargaison de « la flottille » n'est en définitive pas arrivée à destination.
Sur le plan de l'image, Israël a certes perdu une partie de l'opinion publique internationale, d'autant que les journalistes turcs présents à bord des six bateaux ont filmé des scènes assez violentes où les soldats israéliens n'ont pas le beau rôle. Mais les Israéliens se font forts de rectifier rapidement le tir. Ils misent d'abord, toujours selon la source palestinienne, sur l'incapacité des Arabes à réagir efficacement et sur le fait que les pressions américaines n'iront pas bien loin, l'administration américaine étant plongée dans la préparation des élections de novembre au Congrès. La source palestinienne relève ainsi que 20 militants algériens figurent parmi les volontaires présents sur les bateaux, et pourtant, le gouvernement algérien n'a pas adopté de position en flèche, comme l'ont fait les responsables turcs. La réaction des Arabes ne constitue donc pas vraiment un souci pour les Israéliens qui, selon la source précitée, pourraient songer sérieusement désormais à provoquer une nouvelle guerre dans la région pour retrouver l'appui de la communauté internationale. Si des roquettes sont ainsi envoyées sur Israël, ce pays en profitera pour se présenter en victime et lancer des représailles que la communauté internationale jugera justifiées puisque l'Occident reconnaît l'importance de préserver la sécurité d'Israël. Une fuite en avant donc, pour qu'une nouvelle actualité sanglante remplace celle de la « flottille de la liberté » ? La source palestinienne n'écarte pas cette possibilité, tout en espérant qu'aucune partie arabe ou palestinienne ne commettra l'erreur de donner à Israël le prétexte nécessaire...