Ramzy Baroud
Finkelstein produit une recherche détaillée et sans fautes qui  met en lumière la propagande répugnante qui a précédé et qui a suivi le  massacre de Gaza, écrit Ramzy Baroud. 								
Janvier 2008 : Norman Finkelstein s’est  rendu au Liban où il a, entre autres, rencontré des responsables de la  résistance libanaise (Hezbollah). Il est ici dans le camp palestinien de  Chatila.
Dans son rapport sur Gaza, publié à la fin de l’année  dernière, l’éminent juriste sud-africain, Richard Goldstone, a accusé  Israël et le Hamas d’avoir commis des crimes de guerre. Son rapport  montre bien qu’Israël est une puissance occupante détenant un arsenal  extrêmement sophistiqué (à preuve le nombre de victimes palestiniennes)  tandis que le Hamas est une faction assiégée, occupée,  en situation  d’autodéfense. Bien que Goldstone ait dû se rendre compte du genre  d’hystérie que son rapport provoquerait, il n’a pas permis que son  affiliation idéologique ou ethnique s’interposent dans ses convictions  morales.
Malgré une certaine appréhension initiale - étant donné  que Goldstone  se déclare sioniste et qu’il a des liens avec Israël -  beaucoup de partisans de la justice et de la paix ont été rassurés par  le passé de cet homme. Il a été juge à la Cour constitutionnelle  d’Afrique du Sud et procureur de la Cour pénale internationale pour  l’ancienne Yougoslavie et le Rwanda.
En avril 2009, le Conseil des droits de l’homme des  Nations unies (UNHRC) a chargé Goldstone d’une mission d’enquête sur les  crimes de guerre commis par Israël lors de la guerre dévastatrice menée  contre Gaza du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009. Goldstone a insisté  pour que son mandat inclue  également les violations qui auraient été  commises par les Palestiniens. Il a finalement été invité à rédiger son  propre mandat, preuve de la confiance que lui faisait l’UNHRC.
Le rapport a été publié en septembre 2009 et contient  des recommandations parmi les plus vigoureuses, sobres et claires jamais  faites par une mission des Nations unies depuis qu’Israël a commencé sa  campagne permanente de massacres et de violations de la souveraineté  territoriale et de la dignité humaine du peuple palestinien et de ses  voisins arabes.
C’est la nature des recommandations du rapport qui a  choqué Israël et ses partisans. Il y est demandé instamment à la  communauté internationale « d’entreprendre une enquête criminelle dans  les tribunaux nationaux.... devant lesquels ceux qui auraient perpétré  (les crimes de guerre) devraient être traduits et poursuivis  conformément aux normes de justice internationalement reconnues ». Mais  qui plus est, ce qui a mis en colère les Israéliens et les sionistes est  le fait que Goldstone est censé être « l’un d’eux ». Il n’est pas  facile de le tourner en dérision parce qu’il serait « un juif animé de  la haine de soi », ni de l’ accuser d’antisémitisme, accusation bateau à  l’encontre de quiconque ose critiquer la conduite criminelle d’Israël.
Je m’intéresse personnellement à Goldstone pour trois  raisons. D’abord, Gaza est toujours dans la douloureuse situation que le  juge Goldstone a si bien décrite dans son rapport. Rien n’a été fait  depuis pour soulager la douleur des victimes,  ni pour répondre à son  appel à la justice.
Deuxièmement, il y a une « controverse » au sujet de la  participation de cet homme à la cérémonie de Bar Mitzvah de son  petit-fils en Afrique du Sud. Il a maintenant été forcé de négocier sa  participation à cette cérémonie de passage avec un groupe de dirigeants  juifs sud-africains. Le rabbin chef d’Afrique du Sud, Warren Goldstein, a  accusé Goldstone d’être un menteur dont le rapport « délégitime  Israël ». Le Conseil sud-africain des députés juifs a accusé Goldstone  de « trahison ».
Il incombe de rappeler au rabbin Goldstein que c’est  uniquement l’assassinat barbare de milliers de civils innocents qui  « délégitime » Israël. Quant à la « trahison », Goldstone « trahit »  effectivement toute affiliation tribale aveugle, affiliation qui semble  l’emporter, pour le conseil des députés juifs, sur la cause de la  justice, de l’équité, de l’égalité et de la paix inscrite dans toutes  les grandes religions et philosophies du monde en dépit du judaïsme.
Ceci m’amène à la troisième raison qui m’a obligé à  revenir à cette question : le dernier livre de Norman Finkelstein This Time We Went Too Far : Truth and Consequences of the  Gaza Invasion. 
  Finkelstein n’est pas un écrivain ordinaire. Ses lecteurs savent très  bien que peu d’écrivains réunissent autant de  qualités solides :  recherche académique irréfutable, moralité inflexible, style lucide et  refus de déshumaniser le sujet et la victime.
This Time We Went Too Far servira  dans les milieux universitaires et dans celui des défenseurs des droits  humains - tout comme le rapport Goldstone dans le domaine juridique - à  inculper catégoriquement Israël pour la brutalité de sa conduite à Gaza.  En outre, ce livre fera honte à jamais à ceux qui ont permis que leurs  titres, l’argent, le prestige et, à nouveau, une affiliation tribale  aveugle les rendent incapables de voir les actes inhumains indicibles  qui ont été perpétrés et qui continuent de l’être à Gaza et dans le  reste de la Palestine. Il est à regretter que cette cruauté continue à  sévir, tout comme les diatribes émanant des défenseurs d’Israël.  Finkelstein n’est pas épargné par les attaques ignobles des amis  inconditionnels d’Israël, et Goldstone finira aussi probablement par s’y  habituer.
Finkelstein place son livre dans les contextes  historiques appropriés : événements ayant conduit à la guerre  israélienne contre le Liban durant l’été de 2006, événements qui se sont  produits pendant et après cette guerre qui a tué et blessé des milliers  de victimes et détruit une grande partie de l’infrastructure civile.  Les similarités sont trop évidentes, mais Finkelstein les rend beaucoup  plus claires en évaluant avec patience les deux événements. En outre, il  revient à la guerre et à l’invasion du Liban par Israël en 1982, dont  il révèle en grande partie le comportement bizarre, mais prévisible.
Finkelstein produit une recherche détaillée et sans  fautes qui met en lumière la propagande répugnante qui a précédé et qui a  suivi le massacre de Gaza. Bien qu’il fasse allusion plusieurs fois au  début du livre à la mission Goldstone et à son rapport , il consacre la  plus grande partie de l’épilogue audit rapport et à ses nombreuses  conséquences. Ses révélations et son analyse sont encourageantes en ce  qu’elles suggèrent qu’en fait les choses changent. Israël, État voyou de  par des normes raisonnables, ne retrouvera jamais son ancien statut  fictif de phare du progrès et de la démocratie. Aucune quantité de  mensonges, d’intimidations ou de chantages, ne pourra faire passer les  crimes de guerre d’Israël pour de l’auto défense, ni salir ceux qui le  critiquent en les accusant d’antisémitisme. Le livre présente des  arguments très convaincants à l’appui de cette assertion.
« Les temps changent » a écrit Finkelstein. C’est vrai  et ce succès des plus impressionnants a été possible grâce à des gens  comme Jimmy Carter, John Mearsheimer, Stephen Walt, Richard Goldstone,  Richard Falk, John Dugard, et Finkelstein lui-même ainsi que les  innombrables écrivains, journalistes et blogueurs qui ont travaillé sans  relâche pour documenter la vérité.
Mais c’est aussi le courage des Palestiniens de Gaza et  d’ailleurs qui nous a permis de prendre de telles positions. Nos efforts  sont bien modestes comparés à leur courage, leur résilience et leurs  sacrifices.
Ajout de la Rédaction : Présentation de son livre par Norman Finkelstein
* Ramzy Baroud (http://www.ramzybaroud.net)  est chroniqueur syndiqué international, et rédacteur en chef de  PalestineChronicle.com. Son dernier livre est : Mon père était un combattant de la  liberté : l’histoire indicible de Gaza (Pluto Press, Londres),  actuellement disponible sur Amazon.com
6 mai 2010 - Transmis par l’auteur
Traduction : Anne-Marie Goossens
Traduction : Anne-Marie Goossens