Laurent Zecchini   
Les délégations des pays donateurs pour la  Palestine, réunis lundi 12 et mardi 13 avril, à Madrid, ont dressé un  bilan positif de l’évolution de la situation économique en Cisjordanie.  Cet état des lieux repose sur les rapports de la Banque mondiale et du  Fonds monétaire international (FMI), lesquels soulignent les progrès  significatifs accomplis par le gouvernement du premier ministre  palestinien, Salam Fayyad, dont l’objectif est d’annoncer la création  d’un Etat palestinien "vers 2011".
Le rapport du FMI souligne le  contraste entre la Cisjordanie, où la croissance a atteint 8,5 % en  2009, et la situation de Gaza, où, en raison du blocus maintenu par  Israël, l’activité économique n’a pas dépassée 1 %. Trois facteurs sont à  l’origine des bons résultats de la première : les réformes menées par  l’Autorité palestinienne – notamment l’amélioration de la sécurité, les  finances publiques, la lutte contre la corruption et la gouvernance –  ont renforcé la confiance du secteur privé.
La communauté internationale est restée mobilisée, son  aide budgétaire à l’Autorité palestinienne représentant 22 % du PNB  palestinien. Enfin, Israël a allégé certaines restrictions s’agissant de  la liberté de circulation des personnes et des marchandises à  l’intérieur de la Cisjordanie. Mais outre que celles-ci restent fortes  dans les zones "C" (environ 60 % de la Cisjordanie), qui sont  entièrement sous contrôle israélien, rien n’a été fait pour alléger ces  restrictions s’agissant du commerce extérieur de la Cisjordanie.
RALENTISSEMENT DE LA MOBILISATION INTERNATIONALE
"Une économie avec un marché aussi limité ne peut pas  avoir une croissance soutenue sans exportations, à plus forte raison  sans port, ni aéroport", souligne Oussama Kanaan, représentant du FMI  pour les territoires palestiniens. Or les trois-quarts des marchandises  produites en Cisjordanie transitent par Israël ou sont vendues en  Israël. De septembre 2008 à fin 2009, Israël a supprimé 80 "obstacles"  (barrages, check-points) en Cisjordanie, mais 550 restent en place,  selon le FMI. Le chômage a légèrement baissé de 2008 à 2009 en  Cisjordanie (18 % contre 20 %), alors qu’il est resté identique à Gaza, à  environ 39 %.
L’une des préoccupations pour 2010 tient au  ralentissement de la mobilisation internationale : les déboursements de  l’aide sont particulièrement lents et certains engagements, notamment en  provenance de pays arabes, n’ont pas été concrétisés. Ainsi, sur les  1,24 milliard de dollars (914 millions d’euros) nécessaires pour  financer les besoins budgétaires de cette année, 174 millions de dollars  seulement avaient été déboursés au cours des trois premiers mois de  2010.
Le FMI constate que l’Etat juif n’a apparemment pas  intégré le fait qu’il a tout à gagner à une forte croissance de  l’économie palestinienne. "Il est important qu’Israël annonce une  stratégie pour la Cisjordanie, au lieu de se contenter de mesures  ad-hoc", relève Oussama Kanaan, pour qui, si les restrictions de  mouvement, intérieures et extérieures, ne sont pas levées, "l’économie  palestinienne reposera exagérément sur le secteur public". Les résultats  économiques dans l’ensemble encourageants de la Cisjordanie soulignent  davantage la précarité qui règne à Gaza, où la croissance est  extrêmement faible et où la situation humanitaire s’aggrave.
Dans ces conditions, l’objectif de Salam Fayyad de  déclarer un Etat palestinien indépendant est-il réaliste ? Le  représentant du FMI estime que différentes conditions doivent être  réunies : outre que l’Autorité palestinienne doit continuer à établir un  bilan, celui-ci devra montrer "que les objectifs de transparence, de  sécurité, de responsabilité, de construction d’un Etat de droit, sont  atteints. Il faut que ce gouvernement puisse montrer qu’on peut lui  faire confiance". Un Etat palestinien ne serait pas viable, ajoute-t-il,  "si les restrictions imposées par Israël à la liberté de mouvements ne  sont pas supprimées, si une grande partie des zones "C" ne passent pas  sous contrôle de l’Autorité palestinienne, et si le blocus de Gaza n’est  pas levé".
publié par le Monde