Interview de G. Galloway 
          A l’initiative du convoi Viva Palestine, le député britannique  George Galloway, invité de Résistance Palestine, a su mettre en échec à 3  reprises la politique du siège imposé par israêl, les Etats-Unis,  l’Egypte et l’Europe.
George Galloway était à Lyon, le 26 janvier  2010
George Galloway est connu pour ses engagements et son  attachement à la cause palestinienne. Rappelons qu’il y a 10 ans  environ, il était de passage à Lyon « ville de la résistance » comme il  le dit si bien, avec son convoi de bus « rouges » londoniens pour se  rendre à Bagdad.
Mahmoud Dahloumi : George  Galloway ce n’est pas la première fois que vous venez, ici à Lyon ?
George Galloway : Non en  effet, la dernière fois que je suis venu à Lyon, c’était en 1999, je participais au convoi qui allait mener notre bus « rouge londonien » à  Bagdad, on a traversé l’Europe, l’Afrique du nord, de l’Egypte à la Jordanie, et de la  Jordanie à l’Irak. C’était pour briser le siège en Irak.
M.D : Dix années plus tard  vous êtes ici pour nous parler de la Palestine, pouvez-vous nous rappeler à quand remonte votre engagement pour la Palestine ?
G.G. : Bien, j’ai commencé  ma campagne pour la Palestine très exactement il y a trente-cinq maintenant, à l’été 1975 très exactement. J’ai milité pour la cause  palestinienne depuis ce temps et j’ai également vécu aux côtés des palestiniens des situations très  difficiles. J’étais présent lors des bombardements à Beyrouth en 1982 au moment de l’invasion  israélienne, j’ai été un témoin des massacres de Sabra et Chatila en 1982, je me suis retrouvé aux côtés  d’Arafat en Tunisie, puis à Ramallah.
J’ai donc une longue histoire avec la cause  palestinienne. Mais de tous les temps difficiles que j’ai connu, je n’ai jamais connu de situation plus  difficile que celle de Gaza aujourd’hui.
M.D : En décembre 2009  vous vous êtes rendu de nouveau à Gaza, pouvez-vous revenir sur les conditions de ce voyage et les raisons qui vous ont poussé à vous y  rendre ?
G.G. : Eh bien, rappelons  que les bombardements ont commencé le 27 décembre 2008 et de façon continue durant 22 jours, massacrant plus de 1400 personnes, dont  la plupart des femmes et des enfants. Les israéliens ont pris la précaution de fermer toutes  les portes de sortie de façon à ce que les gens ne puissent pas fuir et ce fut un massacre total.
J’ai donc décidé le 10 janvier 2009 de lancer un convoi d’aide matériel, appelé Viva Palestina qui  s’est mis en place seulement quelques semaines plus tard et qui a traversé l’Europe, l’Afrique du  nord... la même route que le bus rouge londonien qui c’était rendu à Bagdad et c’est devenu un  phénomène international.
Je crois fortement en la tactique qui consiste à mettre  en évidence le siège pour mieux le briser. Briser le blocus est un devoir maintenant pour tous le monde, et je m’y  suis rendu trois fois ces 12 derniers mois. En d’autres termes, l’action parle plus fort que les  mots et il est temps de passer à l’action. Viva Palestina s’est propagé à travers le monde,  maintenant nous avons Viva Palestina Malaisie, Etats-Unis, Australie, Afrique du Sud, Angleterre,  Irlande et maintenant depuis la semaine dernière Viva palestina Arabie.
M.D : Aujourd’hui quelles  sont les attentes des Gazaouis ?
G.G. : La situation à Gaza  est aujourd’hui vraiment catastrophique, les gens ont faim, ils manquent de tous les moyens pour vivre et personne ne vient les sauver. A  Berlin ouest, au début des années 60 les pays de l’ouest ont organisé un sauvetage aérien  pour briser le siège à Berlin ouest. Ce qu’il faut maintenant c’est un sauvetage par mer, Une  réponse d’urgence, particulièrement des pays arabes, en naviguant directement jusqu’au port  de Gaza, c’est ce sur quoi je travaille maintenant.
Laissez-moi vous lire ces quatre statistiques, 80% des  personnes à Gaza sont des réfugiés, 80% des personnes à Gaza sont sans emploi, 80% des personnes vivent à Gaza  avec moins d’un dollar par jour et 80% des enfants à Gaza sont victimes de malnutrition ou de  sous-nutrition. C’est quatre fois 80%, il n’y a aucun autre endroit dans le monde où il y a  ces quatre fois 80%.
Yasmina KADA : Qu’est ce  qui selon vous a fait la différence entre le mouvement Viva Palestine qui a trois reprises à défié et mis en échec la politique du blocus  imposé par les Etats- Unis/Israël/Egypte/Europe et la marche free gaza lancé par les  américains et rejoint par les européens, les français et qui on peut le dire a été voué à l’échec ?
G.G. : Il y a eu trois  convois : le premier en mars 2009 d’Angleterre, le second en juillet  avec le convoi américain Viva Palestina et le plus récent en janvier 2010 le  convoi internationale Viva palestina. Il y a plusieurs raisons qui expliquent notre réussite  jusqu’à présent. S’il vous plaît ne pensez pas que je sois prétentieux, mais j’ai une certaine empreinte  dans le monde arabe, et ce n’est pas facile pour les régimes arabes de me refuser parce que  l’opinion publique « mashallah » m’apprécie beaucoup. Donc, c’est premièrement plus difficile de me  refuser, que de refuser n’importe qui d’autre. C’est selon moi la première raison.
La seconde raison, c’est l’existence maintenant d’Al  Jazzera. Parce que j’ai cette position dans le monde arabe, Al Jazzera à couvert notre convois au quotidien. Ce qui a  permit d’apporter une résonnance importante à notre convoi, impressionnant par sa taille,  auprès de l’opinion publique arabe faisant ainsi pression sur les régimes arabes.
La troisième raison, c’est que ceux qui ont fait la  marche free gaza ont eu des objectifs et des plans irréalistes pour pouvoir les mener à terme. Avec tout le respect  que je dois aux militants qui y sont allés. Je savais que cela allait terminer de la façon dont ça  s’est terminé. Je savais que ça ne marcherait pas. Parce qu’on ne peut pas penser pouvoir développer  une liberté au nom des autres. Pour faire une marche dans le pays d’un autre, c’est une  chose très difficile à faire.
Vous devez apporter de l’aide humanitaire, vous devez  apporter des moyens de vivre aux personnes assiégées et pas faire une manifestation dans le pays d’un  autre. Si j’apportais des milliers d’anglais pour faire une manifestation à Lyon qui est contre la  politique du Gouvernement Français, il y aurait forcément des problèmes.
M.D. : George Galloway,  vous êtes député britannique vous avez été élu a cinq reprises, quels échos trouvez-vous auprès des britanniques, au combat que vous menez  pour la Palestine ?
G.G. : J’ai été élu cinq  fois et j’espère être élu une sixième fois dans quelques mois. J’ai  beaucoup de personnes qui me soutiennent mais j’ai aussi beaucoup d’ennemis  (rires)... Je pense que la cause palestinienne a beaucoup plus d’échos en Grande Bretagne qu’en  France, probablement en raison des responsabilités historiques de la Grande Bretagne sur le  désastre en Palestine.
Deuxièmement, parce que la gauche et les musulmans en  Grande Bretagne travaillent ensemble, ce qui n’est pas le cas en France. Je répète la gauche et les musulmans  travaillent beaucoup plus ensemble Grande Bretagne ce qui n’est pas vrai en France. Ils  travaillent séparément et cela va affaiblir les deux.
Y.K. : Comment se sont  déroulées les négociations avec les autorités égyptiennes ? Quel a été le rôle des organisations turques dans le passage du convoi ?
G.G. : Le gouvernement  turc est le plus important nouveau facteur dans cette nouvelle équation, la Turquie rentre très sérieusement de nouveau dans le monde musulman et  le gouvernement turc a le respect de tous les musulmans. Le Président Erdogan est le  genre de leader que la plupart des musulmans espèrent avoir. Et parce qu’il est courageux et  clair, sont importance dans cette équation grandit presque chaque jour. Pas seulement en  Palestine, hier (LUNDI 25 janvier 2010) nous avons vu Le Président en Afghanistan, la politique  étrangère turque est en train de se réorienter en direction de l’est et du monde arabo-musulman,  ce qui représente un développement très significatif.
Sans les Turcs, on ne serait probablement jamais arrivé à Gaza, lors la dernière occasion. Nous avions le support maximal de  Erdogan et du Ministre des affaires étrangères et nous croyons que les turques dirigeront notre  prochain convoi marin, qui je l’espère, dans les prochains mois, atteindra avec succès le port de  Gaza.
M.D. : Quel regard  portez-vous sur la politique menée par le Gouvernement Français dans le blocus ?
G.G : Si vous me le  permettez, je vais répondre à la question en étant très direct. La politique française au Moyen-Orient est simplement catastrophique,  Bernard Kouchner, Ministre en charge des affaires étrangère est à peine plus qu’un agent  de l’impérialisme américain, il me semble que Sarkozy espère devenir le nouveau Bush  maintenant que Blair n’est plus de la partie mais l’influence française dans la région est quasi  nulle. Je crains que depuis la fin de Mitterrand à la Présidence, le rôle de la France dans cette région  est vraiment mauvais.
C’est dommage, parce que le rôle des Britanniques est encore pire, donc  franchement ça laisse à l’Europe une petite crédibilité. Seul le gouvernement de l’Espagne a  encore un peu de crédit dans le monde arabe mais pour je ne sais quelles raisons les espagnoles ne  donne pas la priorité à la politique étrangère en général et au Moyen-Orient en particulier. Voilà  j’espère ne pas avoir offensé les Français mais c’est honnêtement comme cela que je vois les  choses.
M.D. : Comme vous le savez  Résistance Palestine s’est engagé dans un combat qui rejoint le vôtre d’ailleurs, celui de soutenir toutes les résistances au  colonialisme, au sionisme et à l’impérialisme. Vous avez donc pu prendre connaissance des actions  menées - la plainte à la CPI, la campagne contre le Blocus... George Galloway, nous aimerions  avoir votre avis sur l’Association Résistance Palestine, qui à le plaisir de vous accueillir  dix-ans après votre premier passage à Lyon et un an après les massacres perpétré à Gaza.
G.G. : Eh bien j’espère  que nous pourrons travailler ensemble, cette une cause qui peut nous amener à une coopération, c’est la raison de ma présence ici, c’est  vraiment un appel à la collaboration je vous invite en tant que mouvement de solidarité en  France à rejoindre le mouvement international. Je ne dis pas de changer le nom de votre  organisation en Viva Palestina, mais simplement de nous rejoindre dans l’action unitaire que  nous essayons de mettre en place ensemble pour briser le siège.
Ce sera l’objet de mon intervention ce soir, La France devrait être le leader de cette force, vous avez 7, 8, 9 millions de  musulmans en France et vous avez une gauche bien plus forte ici que partout ailleurs en Europe, vous  avez une gauche qui attire des millions de votes lors des élections en France, il y a des  Fédérations de syndicats qui ont beaucoup de pouvoir et qui défendent très bien les intérêts  travailleurs français, mais pour certaines raisons la gauche ne semble pas donner de priorité à cette  question et j’espère pouvoir aider à les persuader. Parce que si vous faites une Alliance entre les  musulmans de France et la gauche française vous aurez une force qu’aucun autre pays en Europe ne  pourrait probablement avoir et la France serait à l’avant-garde de ça. Et je serais heureux de  dire « Vive la France. »
Y.K. : George Galloway,  Resistance Palestine a récemment lancé une campagne pour dénoncer le blocus de manière générale mais aussi la complicité de  l’Egypte dans le ce siège imposé à Gaza, pour mobiliser l’opinion publique nous avons diffusé 50  000 cartes postales à adresser à l’Ambassade d’Egypte en France. Alors bien sûr, c’est  l’occasion pour moi de vous demander ce que vous pensez de cette initiative mais aussi de connaitre  votre sentiment quant à la décision des autorités égyptiennes de vous désigner persona  non-grata.
G.G. : C’est une question  très délicate, et ce soir vous entendrez comment j’essaye d’équilibrer sur cette question difficile. Il est impossible d’ignorer le rôle de  l’Egypte, spécialement pour moi maintenant en tant que déporté et persona non-grata en Egypte, ce serait  ridicule pour moi d’être silencieux à ce sujet.
En même temps, ce serait une erreur par exemple de  monter une campagne de Boycott ou de sanctions contre l’Egypte, parce que les  seules perdants seraient les pauvres masses égyptiennes, le régime s’engrossit avec le dollar  américain, mais les pauvres masses en souffriraient et le régime égyptien en profiterait pour faire  que les masses se retournent contre nous, mais encore plus grave, que les masses se  retournent contre les Palestiniens parce que c’est exactement la manoeuvre qui est mise en  place maintenant. Ils essayent de retourner l’opinion publique égyptienne contre Gaza, contre  les Palestiniens comme si l’Egypte faisait ce qu’elle fait pour exorciser sa souveraineté.
Donc, les cartes postales sont très bien mais selon moi  il ne faut pas aller plus loin. Ils ont dit qu’il n’y aurait plus de convoi sur le sol égyptien, nous n’acceptons pas  cette décision, nous la refusons, nous avons donc décidé de nous battre devant la cour  égyptienne contre cette décision et sur ma déportation. Nous n’abandonnerons pas notre demande... mais la  mer est ouverte pour ceux qui ont le courage de s’y rendre et c’est maintenant la  priorité et si nous y arrivons nous pouvons briser le siège d’une façon plus importante encore qu’avec  des camions à travers l’Egypte.
Si nous pouvons conduire cinq, dix, quinze navires de  grandes envergures jusque Gaza et puis ça c’est ma nouvelle idée, à chaque fois qu’un navire arrivera  plein, il repartira aussi plein avec tout ce que la Palestine aura à revendre à l’Ouest : produits  agricoles, tout... Il faut que cela se fasse dans les deux sens et c’est possible. Nous pourrons alors faire  vivre Gaza par le biais de l’import/Export, le commerce.
Donc, voilà ma priorité maintenant, je n’oublie pas  l’Egypte, la population égyptienne mérite mieux que ce régime de dictature qu’ils ont, mais nous ne devons perdre  de vue la plus grande image.
Entretien réalisé par Mahmoud Dahloumi, « Radio Trait d’Union », et Yasmina Kada, « Résistance Palestine » 
                Diffusé le 21 février 2010 par Conseil_ResistancePalestine
Traduction : Alexandra Quadrelli et Naïma Bouteldja
Traduction : Alexandra Quadrelli et Naïma Bouteldja