Stephen Lendman
En mai 2004, Marwan Barghouti a été illégalement condamné
pour son implication dans des attaques terroristes ayant fait cinq
morts. Un panel de trois juges a reconnu qu’il n’était pas impliqué.
Néanmoins quelques semaines plus tard, il a eu cinq sentences, plus 40
années d’emprisonnement. C’est un prisonnier d’opinion.
- Marwan Barghouti, "le Mandela palestinien", dirigeant du Fatah, est toujours très populaire auprès d’une majorité de Palestiniens (Getty)
Il se définit lui-même comme « un dirigeant politique, un membre du
Conseil Législatif Palestinien, élu par mon peuple. Israël n’a aucun
droit de me mettre en examen, de m’accuser ni de me juger. C’est une
violation du droit international. J’ai le droit (légal) de résister à
l’occupation ».
En octobre 2002, il a accusé "l’État d’Israël d’être directement et
indirectement responsable, pour avoir commis des actes spécifiques de
génocide, de nettoyage ethnique, notamment d’avoir déraciné des
Palestiniens par des attaques militaires, des arrestations arbitraires
et des incarcération illégales, des détentions administratives, des
attaques contre des femmes, des enfants et des personnes âgées, des
destructions systématiques et injustifiées de propriétés et de maisons
ainsi que l’expropriation et la spoliation systématique …"
Il y incluait de nombreux autres crimes. Il accusait Israël d’imposer
délibérément des conditions de vie inhumaines. Il est resté en prison.
Il a été interviewé le 15 avril dernier et a commenté l’imposture des
pourparlers de paix. Il avait encore beaucoup de choses à dire.
L’universitaire Adnan Abu Amer l’a interrogé en arabe
Les négociations Israël/Palestine ont commencé en juillet dernier.
Elles étaient mortes avant de commencer. Elles n’ont abouti nulle part.
Israël exige tout à sa façon, il n’offre rien en retour. Les pourparlers
ne servent à rien. Comme convenu, la date butoir du 29 avril approche.
Abbas est un collaborateur israélien de longue date. Il a accepté de
manière irresponsable de prolonger les négociations.
Il a dit "pour la fin de l’année - peut-être bien en 2015. En retour, il demande des concessions trop mineures pour compter.
Il a dit "pour la fin de l’année - peut-être bien en 2015. En retour, il demande des concessions trop mineures pour compter.
Pourquoi ? Il faudra qu’il s’explique. Le 18 avril Ma’an News
titrait : « Aucune percée dans les pourparlers de paix
israélo-palestiniens. Précisant : le 17 avril, cinq heures de
« discussions très difficiles » n’ont pas débouché sur un accord. Une
source palestinienne non nommée a dit : « Le fossé (entre les deux
parties) est toujours très large. Il n’y a eu aucune avancée ».
Le vendredi, le négociateur américain Martin Indyk a rencontré tour à tour chacune des parties. Rien n’a réussi.
Le commentateur israélien Nahum Barnea a comparé les 9 mois de
pourparlers à de la « torture mutuelle » prolongée. Il a dit : « Kerry
les a laissés aller comme un joueur de casino, qui insiste à remettre
son argent sur la roulette, dans l’espoir que la roue finira par
s’arrêter sur son numéro. Il a cru qu’il parviendrait à un accord de
paix. Ensuite il s’est limité à un accord-cadre. Ensuite il s’est encore
davantage limité, avec une proposition américaine pour un accord-cadre.
Puis juste à des idées. Finalement, tout le prestige des Etats-Unis a
été investi dans un accord marginal, contestable, qui ne fera que
prolonger la torture mutuelle ».
Il convient de répéter ce que soulignaient des articles précédents.
Les chances de parvenir à un accord juste et équitable sont
virtuellement nulles. Prolonger les pourparlers ne sert à rien. Les
multiples sessions précédentes n’ont abouti à rien. N’attendez pas qu’il
en soit autrement cette fois-ci.
Barghouti a des choses à dire.
C’est ce qu’il a fait depuis sa prison. En mai 2002 il a été
kidnappé, dit-il. Cet enlèvement succédait à différentes tentatives
manquées d’Israël pour le tuer. Trois mois d’instruction épuisante ont
suivi. Il a passé plusieurs années à l’isolement. Sa cellule faisait 2
mètres de long sur 1,5 mètre de large. Cafards, rats et moustiques
l’infestaient. Il n’existait aucune ventilation.
« J’étais complètement isolé du monde » dit-il. Il a eu 6 livres tous
les 6 mois. C’est la Croix Rouge Internationale qui avait pu les lui
fournir. En prison il a appris l’hébreu.
Il dit la situation palestinienne « de plus en plus difficile ».
Israël « bloque » les efforts de paix. La dureté de l’occupation
persiste. Les Israéliens ont à nouveau élu un gouvernement pas du tout
disposé à mettre fin à l’occupation et aux colonies, ni à faire la paix
avec les Palestiniens.
Il blâme le Fatah de ne pas se réconcilier avec le Hamas. Cet échec
complique la scène palestinienne. Il soutient l’unité nationale :
parvenir à l’unité nationale constitue la loi de la victoire des
mouvements de libération nationale pour les peuples opprimés. La
réconciliation est un pré-requis pour l’unité du peuple et
l’établissement d’un Etat.
Il est confiant : un jour, l’unité et la réconciliation auront lieu. Les Palestiniens triompheront.
Les pourparlers de paix actuels sont vains. Ils ont échoué parce
qu’Israël donne priorité à la violence, à l’instabilité et à la
dominance.
Il veut que la Palestine soit membre à part entière de l’ONU.
Il veut une participation pleine et entière aux conventions et aux
accords internationaux. Il souhaite que les responsables israéliens
rendent des comptes devant la Cour Criminelle Internationale (CCI)
Il veut davantage d’aide de la communauté internationale pour isoler
et punir Israël. Il veut qu’Israël soit boycotté politiquement,
économiquement et militairement.
Il veut que la résistance populaire s’amplifie et que tous les éléments palestiniens y soient impliqués. Il veut un futur état palestinien dans les frontières de 1967.
Il veut que la résistance populaire s’amplifie et que tous les éléments palestiniens y soient impliqués. Il veut un futur état palestinien dans les frontières de 1967.
Il déplore l’implication des USA dans les pourparlers de paix, qui
fournissent un soutien unilatéral à Israël et qui rendent impossible
une résolution pacifique du conflit. L’Amérique n’est pas un honnête
courtier : si elle voulait la paix dans la région, elle l’aurait exigée
d’une manière claire et explicite.
Pour y arriver il faut mettre un terme à l’occupation des territoires
occupés en 1967, pour préparer la création d’un état palestinien avec
sa capitale à Jérusalem-Est, en application de la Résolution 194. Aux
termes de celle-ci, en décembre 1948, « ... il y a lieu de permettre aux
réfugiés qui le désirent, de rentrer dans leurs foyers le plus tôt
possible et de vivre en paix avec leurs voisins, et que des indemnités
doivent être payées à titre de compensation pour les biens de ceux qui
décident de ne pas rentrer dans leurs foyers et pour tout bien perdu ou
endommagé lorsque, en vertu des principes du droit international ou en
équité, cette perte ou ce dommage doit être réparé par les gouvernements
ou autorités responsables ».
L’admission d’Israël à l’ONU avait été subordonnée à l’acceptation et à l’application de la Résolution 194.
Les membres de l’Assemblée Générale ont affirmé le droit au retour des
dizaines de fois. Israël le dénie. Selon une décision de la Cour Suprême
israélienne : « La Judée, la Samarie et Gaza ont été sous occupation
belligérante de l’État. Ce ne sont pas des parties de l’état d’Israël."
Peu importe. Israël gouverne extrajudiciairement. Les extrémistes au
pouvoir ignorent les décisions de leur propre Haute Cour. Seuls les
juifs ont des droits. Tous les aspects de la vie en sont affectés. On
refuse systématiquement aux Palestiniens ce qui est trop vital pour
qu’ils y renoncent.
Les droits incluent la souveraineté, la terre, le logement, la
culture, l’éducation, les soins de santé, l’emploi et la liberté
religieuse, entre autres. Ils incluent tout ce qui se fonde dans le
droit international.
L’échec à obtenir un traité de paix juste et équitable menace de transformer un conflit à bas bruit en un conflit plus important
L’initiative arabe de paix constitue le minimum accepté par les
Arabes pour se mettre d’accord (équitablement) avec Israël. Mais ce qui a
été publié par la délégation ministérielle arabe à Washington quant au
fait d’être prêts à amender les frontières de 1967 et à accepter le
principe d’un échange de terres, a nui à la position des droits arabes
et palestiniens. Cela n’a fait qu’aiguiser l’appétit israélien pour
davantage de concessions. Personne n’a le droit de modifier ni
d’échanger une frontière de pays.
Il veut le retrait israélien complet de Palestine selon les
frontières de 1967. Il y inclut "toutes les colonies, qui se trouvent
sur des terre palestiniennes volées".
Elles n’ont aucune légitimité, il exclut de les incorporer à Israël.
Elles n’ont aucune légitimité, il exclut de les incorporer à Israël.
La seule solution possible en ce moment est une solution à deux
états. Il met l’accent sur une Palestine souveraine dans ses frontières
de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale. Il ne faut pas l’abandonner.
Cette dure occupation doit cesser. L’unité palestinienne devra
travailler pour "un état indépendant avec la pleine souveraineté".
Les Israéliens devraient se rendre compte que le dernier jour de
l’ère de l’occupation sera le premier jour de paix dans la région. Ils
doivent annoncer leur bonne volonté pour mettre fin à l’occupation, se
retirer des frontières de 1967, reconnaître l’autodétermination des
Palestiniens, « y compris leur droit d’établir un état indépendant ayant
une pleine souveraineté, avec Jérusalem-Est pour capitale ».
Barghouti exige la fin de l’apartheid israélienne, basée sur l’occupation, les colonies et le racisme.
L’alternative à l’échec de la solution à deux états ne sera pas un
état binational mais la continuation et l’extension du conflit sur base
d’un conflit d’existence sans compromis. Que Israël fasse la paix avec
les pays de la région n’assurera pas la stabilité globale. Les
Israéliens se trompent s’ils croient que le statu quo va continuer, ils
devraient se rendre compte qu’ils n’obtiendront la sécurité que par la
paix, que le peuple arabe a changé et qu’ils ne pourront pas défier
éternellement la région.
Ces huit dernières années, Abbas a raté une occasion historique de
parvenir à la paix. Il conspire avec Israël, de manière irresponsable,
croit Barghouti. Il est l’homme de main d’Israël, il coordonne une
sécurité sans précédent contre son propre peuple. En échange, des terres
palestiniennes sont volées. Jérusalem a été judaïsé, des Palestiniens
sont déportés, leur maison, leur liberté et leur avenir sont détruits.
Il insiste sur le droit des peuples à résister, par tous moyens et
méthodes : c’est reconnu par la Charte des Nations Unies et par le droit
international.
Le temps d’Abbas touche à sa fin.
Les Palestiniens seuls doivent choisir son successeur. Barghouti
s’est engagé à lutter pour leur liberté, pour l’indépendance et pour la
paix. C’est sa priorité. Il a consacré toute sa vie à la lutte
populaire. Les Palestiniens seront libres un jour : la cessation de
l’occupation est inévitable.
Il croit que les arabes rejettent la tyrannie et la dictature,
l’occupation et la répression, et qu’ils n’ont pas à vivre enfermés dans
un régime arabe paralysé et impuissant, tourmentés et soumis à la la
domination de la sécurité politique américaine et de la force militaire.
Les régimes arabes ont échoué à construire des institutions
démocratiques. Une réforme constitutionnelle devra mettre un terme à des
décennies de dictature et de répression. Il faut construire de
nouvelles fondations, instaurer les droits démocratiques basés sur un
pluralisme politique, sur les droits religieux, la liberté
intellectuelle et le règne des principes du droit. Le changement
révolutionnaire en dépend, souligne-t-il. Les instaurer est le seul
moyen d’en finir avec la subordination.
La paix dans la région dépend de la réussite des Palestiniens à
établir leurs droits fondamentaux, dans lesquels Barghouti inclut
l’indépendance souveraine, l’équité et la justice. Il est persuadé que
cela sera fait, et quant à lui, libre ou prisonnier, il travaillera pour
que ce jour-là arrive.
* Stephen Lendman vit à Chicago. Auteur de plusieurs livres, il publie depuis 1999 ses chroniques de géopolitique, notamment dans son blog, et il présente des interviews sur Progressive Radio Network. Il est lauréat de Project Censored en 2008 et du Club des Journalistes Mexicains en 2011. Son adresse : lendmanstephen@sbcglobal.net.
22 avril 2014 - Steve Lendman Blog - Vous pouvez consulter et article à :
http://sjlendman.blogspot.be/2014/0...
Traduction : Info-Palestine.eu - AMM
http://sjlendman.blogspot.be/2014/0...
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