Rasha Abou Jalal - Al Monitor
Malgré l’harmonie qui règne généralement entre le Hamas et 
le Djihad islamique sur les positions politiques concernant le conflit 
israélo-palestinien, une rivalité existe dans les coulisses. Les deux 
organisations sont en concurrence pour attirer les partisans islamiques 
et apparaître au yeux du public comme le groupe le mieux placé pour 
mettre en œuvre les aspirations et les espoirs du peuple palestinien.
Un militant du Jihad islamique lors d’une conférence de presse à Gaza après des frappes israéliennes, le 12 mars 2012 - Photo : AFP/Mohammed Abed
Ces mouvements islamiques utilisent diverses méthodes pour gagner ce 
soutien, comme les mobilisations de masse, les dons de nourriture et 
d’argent aux plus démunis, le prosélytisme, tout en insistant sur 
l’importance des constantes palestiniennes que sont Jérusalem et le 
droit au retour des réfugiés. En général, ils visent à satisfaire les 
aspirations de la population.
Bien que le Hamas soit plus populaire que le Jihad islamique, un 
récent sondage réalisé par le Centre d’études et de recherche Watan dans
 la bande de Gaza, laisse percevoir un soutien en hausse pour le 
mouvement du Jihad islamique en même temps qu’une baisse de popularité 
du Hamas. Parmi les habitants de Gaza, 23,3% ont exprimé leur soutien 
pour le Hamas tandis que 13,5 % ont préféré le Jihad islamique. Le 
Fatah, cependant, est plus populaire que les mouvements islamistes pris 
individuellement, avec le soutien de 32,9 % des habitants de Gaza. Il 
reste 4,2% pour le Front Populaire pour la Libération de la Palestine et
 1,5% pour le Front Démocratique pour la Libération de la Palestine. Sur
 l’ensemble des personnes interrogées, 24,6% n’ont pas d’opinion.
Comme le Jihad islamique n’a pas participé aux élections (de 2006), 
il est difficile de déterminer sa popularité à cet égard. Ce dernier 
sondage suggère une hausse de la popularité du groupe par rapport aux 
résultats des sondages précédents réalisés par les centres de recherche 
locaux ces dernières années. Dans un sondage réalisé en 2010, par 
exemple, le Jihad islamique enregistrait seulement 1% en terme de 
popularité comparé aux autres factions palestiniennes. L’enquête du 
Centre Watan  comprenait des entrevues avec 467 personnes des deux 
sexes, et a été menée sur tout le territoire de Gaza du 9 au 17 février.
 Les résultats ont été repris par différents médias à la fin mars.
Le sondage a également révélé que le public appuyait largement la 
résistance armée pour imposer les droits des Palestiniens. Parmi les 
personnes interrogées, 60,3 % pensent que la résistance armée est le 
moyen le plus approprié pour conquérir les droits du peuple palestinien 
si les négociations échouent, tandis que la poursuite des négociations 
recevait le soutien de 6,5% des personnes interrogées.
La charge de l’administration de Gaza a coûté au Hamas de la 
popularité sur le terrain, alors qu’il lutte pour organiser la vie dans 
le territoire assiégé malgré les difficultés dues au blocus 
israélo-égyptien et à une série de crises économiques et politiques. 
L’analyste politique Iyad Atallah explique : « le Hamas souffre d’une 
baisse de popularité en raison du mécontentement grandissant causé par 
son échec face aux crises subies dans les moyens de subsistance de base,
 tels que l’électricité et le carburant, et l’absence de solution dans 
le problème du passage de Rafah. »
Il également explique à Al-Monitor : « le Hamas est arrivé au pouvoir
 dans la bande de Gaza et a commencé à gérer les affaires civiles pour 
les citoyens. Cette responsabilité a éloigné le mouvement à de 
nombreuses reprises d’une confrontation militaire avec Israël, poussant 
ainsi le public partisan de la résistance armée vers le mouvement du 
Jihad islamique qui organise toujours des représailles contre les 
attaques israéliennes. »
Le 12 mars dernier, les Brigades Al-Quds, la branche armée du Jihad 
islamique, a tiré 130 roquettes fabriquées localement vers Israël dans 
le cadre d’une opération militaire baptisée « Briser le silence ». 
L’attaque était une réponse à l’assassinat de trois combattants du Jihad
 islamique. Le groupe a menacé que les réponses à venir « seront de la 
même taille que les violations sionistes si celles-ci continuent. »
Khader Habib, un responsable du Jihad islamique, a déclaré à 
Al-Monitor que le mouvement auquel il appartient a gagné en popularité 
parce qu’il est resté lié à la résistance armée, n’a accordé aucune 
légitimité à l’existence d’Israël sur le sol palestinien, et est resté
 éloigné de la gouvernance et de la participation à l’Autorité 
palestinienne issue des accords d’Oslo de 1993. « Nous sommes un 
mouvement qui refuse de laisser Israël impuni quand il attaque notre 
peuple, et nous croyons que faire partie de l’Autorité serait 
catastrophique. C’est la raison pour laquelle plus de gens nous 
soutiennent », a affirmé Habib.
Les résultats du sondage du Centre Watan sont cohérents avec ceux 
d’une enquête réalisée par Alam wa Sinaa, une université iranienne, 
impliquant 1263 habitants de Gaza après les affrontements de mars 2014 
entre le Jihad islamique et Israël. Le sondage iranien a montré un net 
changement dans l’attitude des habitants de Gaza en révélant une hausse 
de popularité du Jihad islamique au détriment du Hamas, grâce à son 
attachement à l’option de la résistance à l’occupation.
Habib du Jihad islamique a déclaré aussi que son mouvement suivait de
 près les sondages d’opinion traitant du soutien dont il dispose dans la
 rue palestinienne, et selon lui, cela renforce la conviction de son leadership que la lutte armée est la seule façon de réaliser pleinement les droits des Palestiniens.
L’analyste Atallah étudie également la situation du Hamas, en 
déclarant : « Le Hamas a plus de combattants et de moyens que le Jihad 
islamique, mais il ne veut pas d’une confrontation permanente avec 
Israël ». « Une nouvelle confrontation militaire entraînera des pertes 
matérielles dont les maisons et même les usines et les ateliers de 
fabrication, créant encore plus de chômeurs et de personnes dans le 
besoin d’un abri. Cela alourdirait les responsabilités du Hamas ».
L’analyste politique Hassan Abdo déclare de son côté que la décision 
du Djihad islamique de s’en tenir à la résistance armée et de répondre 
immédiatement aux attaques de l’occupation sont les principales raisons 
de son soutien en hausse. Il estime que répliquer de façon immédiate à 
l’occupation inspire le peuple, gagne son admiration et satisfait son 
souhait de ne pas laisser sans réplique les actions d’Israël, ce qui 
entraine un renforcement de son soutien populaire.
Abdo a également noté que le Jihad islamique s’est tenu à ses 
principes politiques, malgré les changements locaux et régionaux. Ceci 
est démontré par le maintien du groupe aux côtés de ses alliés de Syrie 
et d’Iran, malgré les crises actuelles. Selon Abdo, ceci renforce 
l’impression des Palestiniens que le Jihad islamique est plus cohérent 
dans ses positions, comparé au Hamas.
Selon Atallah, une alliance du Jihad islamique avec la Syrie et 
l’Iran impose au mouvement à résister face aux attaques israéliennes. 
« L’attachement du Jihad islamique à l’axe Syrie-Iran est une source de 
force, surtout à la lumière de l’absence de sources de financement 
arabes pour [le mouvement], » dit-il. D’autre part, note-t-il, 
l’alliance du Hamas avec le Qatar n’a pas été très bien accueillie par 
la population locale. « [L’alliance entre le Qatar et le Hamas] est 
quelque chose que les Palestiniens réprouvent ... Les Palestiniens 
respectent le Qatar pour son aide et son argent, mais ils craignent un 
rôle politique [du Qatar] en raison de ses bonnes relations avec 
l’Amérique et Israël. »
* Rasha Abou Jalal est écrivain et journaliste à Gaza, spécialisée dans les questions politiques, humanitaires et sociales liées à l’actualité.