Daoud Kuttab
La publication de ce rapport condamnant les actes de 
violence perpétrés par les soldats israéliens en Cisjordanie - à un 
moment où le monde a les yeux braqués sur la Syrie et sur l’Ukraine - 
aidera sans doute à recentrer l’attention sur le conflit 
israélo-palestinien.
- Arrestation musclée d’un manifestant palestinien par les FDI au cours de la 5ème campagne de protestation contre la fermeture de la rue Shuhada, interdite aux Palestiniens depuis 1994, dans le quartier Al-Khalil à Hébron, le 21 février 2014 - Photo : Reuters/Ammar Awad
 
Il ajoute  un élément fort à la discussion politique : la nécessité 
pour les puissances occidentales de cesser de vendre des armes à Israël 
en raison de ses violations flagrantes des droits humains et de ses 
crimes de guerre perpétrés en toute discrétion. Le fait qu’une 
organisation internationale majeure telle que Amnesty International 
soutienne le boycott des armes à Israël est une avancée politique 
majeure.
Dans son rapport puissant et complet sous-titré « La gâchette facile : le recours disproportionné à la force par Israël en Cisjordanie » ,
 Amnesty International, l’organisation internationale de défense des 
droits de l’homme, critique fortement les soldats israéliens sur leur 
usage aveugle de la force pour mater des manifestants palestiniens non 
menaçants.
Le rapport appelle Israël à cesser d’user de violence meurtrière 
contre les manifestants palestiniens et à annuler des ordres militaires 
qui font fi des droits palestiniens à la liberté d’expression et de 
réunion. Il appelle également l’Autorité Palestinienne et l’OLP à 
« signer et ratifier, sans réserves, les traités internationaux relatifs
 aux droits humains notamment le Statut de Rome de la Cour Pénale 
Internationale ».
Le rapport de 87 pages (*), qui cite des chiffres de l’ONU, révèle le
 mépris des militaires israéliens à l’égard de la vie humaine 
palestinienne. Il présente des enquêtes sur le terrain sur 22 civils 
palestiniens tués par des soldats israéliens en Cisjordanie en 2013. En 
outre, 261 Palestiniens dont 67 enfants ont été blessés par des tirs à 
balles réelles pendant la période 2011-2013. Le nombre de tués et de 
blessés en 2013 a fortement augmenté par rapport aux années précédentes.
 La plupart des cas étudiés concernent des jeunes gens de moins de 25 
ans, notamment 4 enfants.
Le rapport d’Amnesty s’ouvre sur le cas déchirant de Samir Awad,
 un lycéen de 16 ans du village de Bodrus, au nord-ouest de Ramallah. 
Avec d’autres lycéens,  Awad participait à une manifestation improvisée 
contre le Mur édifié sur le territoire de la ville, quand ils ont été 
pris en embuscade par des soldats israéliens. Awad a été touché par 
trois balles, dit le rapport. D’abord à la jambe, puis à l’épaule et 
finalement à l’arrière de la tête – balle qui lui a été fatale. Le 
rapport précise comment Awad s’est enfui dès les premiers tirs, prouvant
 clairement que les vies des soldats israéliens n’étaient aucunement en 
danger, ce qui en fait un assassinat « extrajudiciaire ».
Une enquête a été ouverte contre le soldat israélien coupable de ce 
qu’Amnesty nomme un « acte de guerre » présumé, mais aucun résultat n’a 
été publié. En fait, Amnesty note que depuis 1987, aucun soldat 
israélien n’a jamais été viré de l’armée israélienne pour des actes 
commis dans les Territoires Occupés.
Images et interviews sur le terrain à l’appui, le rapport d’Amnesty 
établit un certain nombre d’autres cas et parvient à la conclusion que 
les soldats israéliens agissent en toute impunité quand il s’agit de 
faire cesser par la force des manifestations palestiniennes menées sans 
aucune arme à feu et sans la moindre mise en danger des vies des soldats
 occupants. Ces abus résultent selon Amnesty « d’un usage inutile et 
arbitraire de la force brutale contre des Palestiniens ». Non seulement 
la vie des soldats israéliens n’a jamais été menacée, mais dans certains
 cas Amnesty déclare : « il existe des preuves que [les 
Palestiniens] ont été victimes de meurtres délibérés, qui feraient 
partie des crimes de guerre ». 
La force du rapport réside dans les détails fournis et dans les 
preuves avancées sur les assassinats commis par une force d’occupation 
qui a « la gâchette facile ». La section la plus puissante du rapport 
recommande la nécessité de rompre avec cette pratique israélienne qui 
dure depuis si longtemps. La liste des recommandations faites à Israël, 
s’il désire renverser ces pratiques actuelles de mépris des vies 
palestiniennes, est longue et d’une grande portée.
Mais Amnesty souligne ce que les principaux alliés d’Israël – les 
États-Unis et l’Union Européenne – doivent faire afin d’envoyer un 
message à Israël concernant son impunité, et il les appelle à mettre un 
terme à leurs envois d’armes et de munitions à Israël.
Ce rapport arrive à un moment où des négociations se déploient, en 
pleine « Semaine contre l’Apartheid israélien » dans beaucoup de campus 
étatsuniens, et il intensifiera les appels BDS
 contre Israël. Il sera difficile aux défenseurs d’Israël de continuer à
 défendre la poursuite de l’occupation, alors qu’une organisation 
internationale respectée diffuse un rapport dépeignant les soldats 
israéliens comme des criminels de guerre
(*) http://www.amnesty.org/fr/for-media...
* Daoud Kuttab : journaliste palestinien né à 
Jérusalem, il a enseigné le journalisme à Princeton et dirige 
actuellement le Community Media Network, organisation dédiée au progrès 
du journalisme arabe indépendant . Il est producteur de documentaires et
 titulaire de nombreuses distinctions. Il est chroniqueur pour Palestine
 Pulse de Al-Monitor, The Jordan Times, The Jerusalem Post et The Daily 
Star (Liban).
Du même auteur : http://www.al-monitor.com/pulse/ori...
Traduction : Info-Palestine.eu - AMM