Cisjordanie - 5 novembre 2011
Par William
Oui. Plus un système est absurde plus l'humour est vivace. Plus une 
répression est forte contre des individus ou une population, plus 
l'humour devient un système de soupape indispensable pour résister aux 
pressions quotidiennes. Les Palestiniens, comme d'autres peuples 
opprimés certainement, utilisent la déconnade soit pour atténuer leur 
souffrances soit pour résister politiquement - et pacifiquement - à 
l'agresseur israélien. Petit état des lieux :
Image du documentaire "Blague à part, un voyage en Palestine", de Vanessa Rousselot
L'autodérision : il est préférable de rire de soi-même 
avant qu'un autre ne le fasse à votre place. On choisit un archétype qui
 nous est proche et il prend pour tout le monde. En France nous avons 
les Belges, les Palestiniens ont les Hébronites (les habitants de la 
ville d'Hébron à l'accent long et lent). Exemple : un Hébronite est 
allé apprendre à fabriquer des roquettes aux États-Unis avant de revenir
 dans sa ville natale avec l'envie de frapper Tel Aviv. Quand cet 
ingénieur en herbe envoie sa roquette, elle s'effondre 300 mètres plus 
loin.  Il s'exclame alors : « Waou, si c'est comme ça ici, qu'est-ce que ce doit être à Tel Aviv ! »
Khaled al-Masri, Manal Awad et Imad Farajin, les vedettes de l'émission Watan ala Watar censurée par l'Autorité palestinienne après 16 épisodes, en août 2011.
Se moquer des élites et de l'actualité : la série 
télévisée satirique Watan ala-Watar (''un pays sur la corde raide'') a 
rassemblé pendant deux ans des milliers de téléspectateurs. Parodiant un
 journal télévisé d'une dizaine de minutes, Imad Farjin, scénariste et 
acteur principal, et ses deux comparses passaient à la moulinette les 
acteurs de la vie politique palestinienne, critiquant ouvertement la 
corruption, le népotisme et traitant de front des sujets comme les 
divisions entre Palestiniens, les relations avec Israël et le port du voile. « Pour
 moi, le plus important est de tourner la politique en dérision. Nous 
sommes sous occupation, le Fatah et le Hamas sont divisés alors qu'ils 
devraient n'être qu'un. Pour régler nos problèmes, il faut commencer par
 en rire, » explique Imad Farajin. Qu'une telle émission passe sur 
les ondes palestiniennes était un signe de bonne santé démocratique de 
la société. Hélas, l'émission a été suspendue en août 2011 suite à des 
plaintes des syndicats de médecins et de policiers (accusés de 
corruption par l'émission).
Image d'Intervention Divine, d'Elia Suleiman.
Rire par le cinéma : on peut se souvenir d'Intervention Divine
 du réalisateur et acteur palestinien Elia Suleiman, prix du jury à 
Cannes en 2002, et souvent comparé à Jacques Tati ou Buster Keaton. Plus
 récemment est sorti sur les écrans Le Cochon de Gaza.
 Si le réalisateur est français, de nombreux acteurs et actrices sont 
palestiniens et israéliens. Dans les deux films, la situation du 
Proche-Orient est traitée de façon burlesque pour mieux en dénoncer 
l'aspect kafkaïen. A chaque fois c'est drôle et ça fonctionne.
Lutter par l'humour contre l'occupation : en Palestine aussi on sait désobéir par le rire. Ainsi Mohammed Faqih est un comédien et imitateur. Il s'est rendu compte que son talent d'humoriste permettait souvent de désamorcer des situations tendues. Il intervient auprès des checkpoints et il n'est pas rare que les soldats israéliens, se tenant les côtes de rire, le laissent passer lui et ses compagnons malgré l'absence de visas... à condition qu'il promette de revenir par le même chemin.
Lutter par l'humour contre l'occupation : en Palestine aussi on sait désobéir par le rire. Ainsi Mohammed Faqih est un comédien et imitateur. Il s'est rendu compte que son talent d'humoriste permettait souvent de désamorcer des situations tendues. Il intervient auprès des checkpoints et il n'est pas rare que les soldats israéliens, se tenant les côtes de rire, le laissent passer lui et ses compagnons malgré l'absence de visas... à condition qu'il promette de revenir par le même chemin.
Dans le village de Bil'in, coupé en deux par le mur d'apartheid, des activistes palestiniens se sont déguisés en Na'vis, les extraterrestres bleus du film de James Cameron Avatar
 pour montrer que c'étaient bien eux les indigènes résistant à 
l'impérialisme. On a jamais autant parlé de ce village palestinien que 
lors de cette action en février 2010.
Toujours auprès de Bil'in (6000 habitants) s'étend une colonie israélienne de 48 000 personnes qui squatte des terres agricoles du village. D'autres facétieux activistes se sont introduits dans la colonie, ont construit une mini-maison durant la nuit et ont donc colonisé la colonie. Comme les terres étaient encore légalement aux Palestiniens, ce fut tout un bordel juridique pour les expulser.
Toujours auprès de Bil'in (6000 habitants) s'étend une colonie israélienne de 48 000 personnes qui squatte des terres agricoles du village. D'autres facétieux activistes se sont introduits dans la colonie, ont construit une mini-maison durant la nuit et ont donc colonisé la colonie. Comme les terres étaient encore légalement aux Palestiniens, ce fut tout un bordel juridique pour les expulser.
Image du documentaire "Blague à part, un voyage en Palestine", de Vanessa Rousselot
Enfin pour terminer, je vous conseille le documentaire de la française Vanessa Rousselot Blague à part, un voyage en Palestine,
 sorti en 2010. Je n'en connais que des extraits mais il a l'air 
particulièrement intéressant. Vanessa Rousselot n'a trouvé qu'un sujet 
qui n'est pas l'objet de plaisanterie, les colons. ''Les colons, ça ce n'est pas drôle,'' confiaient les interviewés.
Ainsi, les Palestiniens, malgré ou à cause d'un quotidien difficilement supportable et d'un horizon incertain, n'ont pas perdu le sens de l'humour. Il leur sert d'outil catharsis permettant d'évacuer pendant quelques instants savoureux colère, souffrance et frustration. C'est un moyen de résistance non-violente face aux agressions sionistes. C'est enfin un moyen de communiquer avec le reste du monde. C'est un message qui nous est adressé à nous tous : tant que les Palestiniens gardent le sourire moqueur, c'est qu'ils gardent confiance dans la vie et dans la lutte.
Bande-annonce du documentaire :
Ainsi, les Palestiniens, malgré ou à cause d'un quotidien difficilement supportable et d'un horizon incertain, n'ont pas perdu le sens de l'humour. Il leur sert d'outil catharsis permettant d'évacuer pendant quelques instants savoureux colère, souffrance et frustration. C'est un moyen de résistance non-violente face aux agressions sionistes. C'est enfin un moyen de communiquer avec le reste du monde. C'est un message qui nous est adressé à nous tous : tant que les Palestiniens gardent le sourire moqueur, c'est qu'ils gardent confiance dans la vie et dans la lutte.
Bande-annonce du documentaire :