Charly Wegman
Agence France-Presse
Jérusalem
Israël va construire 2000 logements à
Jérusalem-Est et en Cisjordanie et geler provisoirement le transfert de
fonds dus à l'Autorité palestinienne, en guise de représailles à
l'admission de la Palestine à l'UNESCO, a-t-on appris mardi soir de
source officielle.
«Ces mesures
ont été prises par le forum des huit principaux ministres sous la
présidence du premier ministre Benyamin Nétanyahou en guise de sanction
après le vote à l'UNESCO», a précisé cette source à l'AFP.
En début de journée, l'administration israélienne affirmait préparer sa
riposte qui pouvait aller, avertissait-elle, jusqu'à des sanctions
visant l'Autorité palestinienne.
«Nous allons examiner comment nous entendons réagir à ce vote», avait
déclaré à l'AFP un haut responsable gouvernemental israélien avant la
réunion dans l'après-midi du cabinet restreint de Benyamin Nétanyahou,
qui compte les huit plus importants ministres.
«Nous voulons peser nos réactions aux niveaux politique et diplomatique
en tenant compte de nos intérêts. Nous ne sommes pas seuls, loin de là,
et allons nous concerter notamment avec les États-Unis», a déclaré de
son côté le vice-ministre des Affaires étrangères Danny Ayalon à la
radio publique.
L'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la
culture a décidé lundi à Paris de l'admission de la Palestine comme
membre à part entière par 107 voix pour, 52 abstentions et 14 voix
contre (parmi lesquelles les États-Unis, l'Allemagne et le Canada).
Les États-Unis, qui fournissent 80 millions de dollars à l'UNESCO et
assurent 22% de son budget, ont automatiquement suspendu un versement de
60 millions de dollars prévu en novembre.
M. Ayalon a fustigé l'UNESCO en estimant qu'elle est «devenue une
organisation politique en intégrant en son sein un État qui n'existe
pas, à la suite du vote d'une majorité automatique de ses membres».
Selon lui, «cette démarche des Palestiniens prouve qu'ils ne veulent ni
la paix ni des négociations, mais entendent perpétuer le conflit».
M. Ayalon a par ailleurs indiqué qu'Israël allait faire part de sa
«déception» à la France pour son «oui» à l'admission des Palestiniens,
qu'il a jugé «bizarre», car la France, un pays ami, a cédé à l'Autorité
palestinienne après avoir essayé de la dissuader de sa démarche à
l'UNESCO».
Dans son discours d'ouverture de la nouvelle session parlementaire lundi
à Jérusalem, M. Nétanyahou a regretté «les démarches unilatérales» des
Palestiniens à l'ONU et averti qu'Israël «ne restera pas les bras
croisés».
Avant le vote fatidique, le chef de la diplomatie israélienne Avigdor
Lieberman avait appelé «à rompre tous les liens avec l'Autorité
palestinienne» du président Mahmoud Abbas.
L'entrée à l'UNESCO représente une victoire majeure pour les
Palestiniens dans leur démarche d'adhésion d'un État souverain à l'ONU
sur les lignes de juin 1967 avec Jérusalem-Est pour capitale.
Selon un responsable israélien anonyme cité par le quotidien Haaretz,
Israël pourrait répondre en accélérant la construction dans les
colonies ou en suspendant le transfert des fonds qu'il collecte pour
l'Autorité palestinienne sous forme d'impôts sur des produits transitant
via ses ports ou aéroports vers la Cisjordanie et la bande de Gaza.
De même source, les dirigeants palestiniens pourraient aussi être privés
des visas spéciaux leur permettant de circuler librement en Israël.
À en croire le quotidien anglophone Jerusalem Post, Israël «envisage» de reconsidérer sa coopération avec l'UNESCO.
Il y a un an, lors d'une précédente passe d'armes, Israël avait failli
suspendre ses relations avec l'UNESCO après l'adoption d'une résolution
décrivant le tombeau de Rachel, lieu saint juif à Bethléem
(Cisjordanie), comme étant également une mosquée.
Israël contribue à hauteur de 3% au budget de l'UNESCO et s'est félicité
de sa coopération avec celle-ci, notamment lorsque la «Ville blanche»
de Tel-Aviv a été classée en 2003 au patrimoine mondial de l'Humanité en
raison de son architecture Bauhaus.