Profitant       d’un vide juridique, l’Etat hébreu veut à nouveau imposer un       fait accompli, non pas dans les territoires palestiniens,       mais au Liban cette fois-ci. L’enjeu porte sur deux       gisements offshore de gaz naturel, Tamar et Léviathan,       découverts récemment au large de l’est de la Méditerranée et       situés dans des zones maritimes contestées. Les réserves de       Tamar sont estimées à 8 milliards de m3 de gaz naturel et       celles de Léviathan, le plus important gisement découvert       dans le monde depuis dix ans, avoisinent les 450 milliards       de m3. 
            Le Liban, qui dénonce un empiétement sur ses eaux       territoriales, s’en est appelé aux Nations-Unies pour       qu’elles forcent Israël à arrêter ses projets de forage et       d’extraction, qui devraient commencer dans quelques mois.       Mais Israël fait, comme d’habitude, la sourde oreille. Il       assure que ces gisements se trouvent dans ses eaux. Mais       rien n’affirme que le champ de gaz ne s’étende pas       au-dessous des eaux territoriales du Liban. La Convention       des Nations-Unies sur le droit de la mer offre des lignes       directrices pour les frontières maritimes, mais Israël n’est       pas signataire de la convention et ne s’estime donc pas lié       par ses dispositions. Il a placé des bornes pour délimiter       sa frontière maritime avec le pays du Cèdre, mais l’Onu ne       reconnaît pas cette ligne unilatéralement tracée. La       frontière maritime entre les deux pays n’a jamais été       délimitée parce qu’ils sont officiellement en guerre depuis       l’établissement d’Israël en 1948. Bien que la Cour       internationale de justice ait statué, par le passé, sur des       cas litigieux de frontières maritimes, il est improbable       qu’elle se laisse entraîner dans un autre conflit de       frontière entre le Liban et Israël, en particulier avec       potentiellement des milliards de dollars de recettes       gazières en jeu. 
            Pour un pays pauvre en ressources énergétiques, les       gisements de gaz naturel découverts sont suffisants pour       l’approvisionnement du marché intérieur d’Israël pour des       décennies, ce qui réduira sa dépendance vis-à-vis de       l’étranger, notamment de l’Egypte. Bien que la découverte       soit d’une importance capitale pour le marché intérieur       israélien, elle ne fera pas de l’Etat juif une puissance       énergétique majeure. Les dimensions des gisements découverts       sont modestes à l’échelle mondiale. Les réserves de       l’Egypte, par exemple, sont quatre fois plus. Mais les       desseins d’Israël vont plus loin. Il cherche à exploiter la       récente découverte comme un levier au service de sa       politique régionale. Après ses derniers déboires avec la       Turquie, naguère son allié stratégique au Moyen-Orient, Tel- Aviv s’est rapproché de la Grèce — l’ennemi juré d’Ankara —       et de son allié, Chypre. Benyamin Netanyahu s’est ainsi       rendu à Athènes en août dernier dans la première visite       jamais effectuée par un chef de gouvernement israélien. En       décembre 2010, un accord a été conclu entre Tel-Aviv et       Nicosie sur le tracé de la frontière maritime commune,       ouvrant la voie, avec la bénédiction d’Athènes, à une       coopération énergétique et stratégique. Enfin, le chef de la       diplomatie israélienne Avigdor Lieberman entame ce mercredi       une visite en Grèce, inédite depuis plus de 15 ans, où il       discutera de coopération énergétique, sécuritaire et       militaire .
Dr Hicham Mourad